Le général Haftar nommé commandant en chef de l’armée libyenne

haftar-20150303Tout vient à point à qui sait attendre…  Fin 2011, le général Khalifa Haftar avait été désigné à l’unanimité pour occuper les fonctions de chef d’état-major de l’armée libyenne par des officiers ayant rejoint les rangs de la rébellion contre le colonel Kadhafi. Seulement, cette nomination n’avait jamais été rendue officielle étant donné que des chefs de milices islamistes ont contesté cette décision. Du coup, le choix du  Conseil national de transition (CNT) se porta sur le colonel Youssef al-Mangouch.

L’une des raisons de cette opposition tenait alors au passé du général Haftar. Fait prisonnier lors de l’aventure libyenne au Tchad, en 1987, lors de la bataille de Ouadi Doum, cet officier formé à l’école soviétique est retourné par les services américains. À la fin des années 1980, il forme une troupe de 2.000 hommes avec le concours de Washington avec l’idée de renverser le colonel Kadhafi. Ce sera un échec.

Exilé en Virginie (près du siège de la CIA, à Langley), le général Haftar retrouve son pays natal en 2011, à la faveur du soulèvement contre le colonel Kadhafi, et commande une brigade rebelle engagée dans les combats du golfe de Syrte et de Braga. Il côtoie alors le général Abdel Fattah Younès, un ancien ministre qui sera assassiné dans des conditions encore obscures en juillet de cette année-là.

Après la « révolution » libyenne, le général Haftar est donc mis sur la touche, ses détracteurs estimant qu’il est « l’homme des Américains ». Puis, la Libye s’enfonce progressivement dans le chaos : les milices refusent de rendre les armes, les tensions entre libéraux et islamistes s’exacerbent, les groupes jihadistes s’implantent, dans le sud et l’est, notamment dans la région de Benghazi.

Pendant ce temps, le général Haftar s’organise. Il monte sa propre coalition en fédérant autour de lui des unités régulière de l’armée libyenne (en particulier des forces aériennes), des milices tribales ou anciennement révolutionnaires ainsi que des groupes divers, dont celui qui contrôle les installations pétrolières dans l’est du pays. En mai 2014, il lance ainsi l’opération Dignité afin de chasser les islamistes et les jihadistes de Cyrénaïque, dont Ansar al-Charia, responsable de l’attaque du consulat américain de Benghazi.

Alors que les divisions s’amplifient à Tripoli, où siège un Parlement dominé par les islamistes [le Congrès général national], le général Haftar s’invite dans le débat en exigeant la mise en place d’un « Conseil présidentiel ». Il est alors accusé de vouloir fomenter un coup d’État.

Depuis, de nouvelles élections ont eu lieu. Mais leurs résultats ne sont pas acceptés par le CGN. Du coup, la Libye compte deux gouvernements et deux Parlements. Les institutions reconnues par la communauté internationale se replient alors à Tobrouk tandis que celles soutenues par les islamistes restent à Tripoli, où la milice Fajr Libya (Aube de la Libye) chasse les brigades de Zenten, alliées du général Haftar et soutenues par les Émirats arabes unis et l’Égypte, qui s’opposent ainsi au Qatar et à la Turquie.

Au final, les autorités libyennes reconnues par la communauté internationale se reposent de plus en plus sur le général Haftar. Au point que ce dernier est devenu incontournable. Pour avoir émis des critiques à son encontre, le ministre libyen de l’Intérieur a même été suspendu…

La semaine passée, ces mêmes autorité ont créé le poste de « commandant en chef » de l’armée. Une fonction taillée sur mesure pour le général Haftar puisqu’il occupera après avoir prêté serment ce 3 mars à Tobrouk. L’annonce a été rendue officielle par Aguila Salah Issa, le président du Parlement reconnu par la communauté internationale.

Photo : Le général Haftar, par Magharebia, via Wikimedia Commons

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