Malgré leurs engagements, plusieurs pays de l’Otan s’éloignent de l’objectif de consacrer 2% de leur PIB à leur défense

Lors du dernier sommet de l’Otan, qui s’est tenu à Newport (Pays de Galles) en septembre 2014, les pays membres ont convenu d' »inverser la tendance à la baisse que connaissent les budgets de défense, d’utiliser de la manière la plus efficace possible les fonds à notre disposition et de favoriser une répartition plus équilibrée des dépenses et des responsabilités ».

En clair, il s’agit pour chacun des États membres de l’Alliance d’atteindre l’objectif de consacrer 2% de leur PIB à leur effort de défense, conformément à la norme fixée par l’Otan.

Six mois plus tard, où en est on? Selon une étude [.pdf] du centre de réflexion European Leadership Network (ELN), basée sur des données officielles concernant 14 pays de l’Otan, la tendance est loin d’aller dans le sens des engagements pris à Newport. Et cela, malgré l’évolution du contexte international, marqué par les tensions et la menace posée par l’État islamique (EI ou Daesh) non seulement au Proche et au Moyen Orient mais désormais en Libye, c’est à dire aux portes de l’Europe.

Ainsi, l’ELN a relevé que seule l’Estonie consacrerait plus de 2% de son PIB à sa défense en 2015, avec un budget de 412 millions d’euros, en hausse de 28 millions par rapport à l’année précédente.

Les deux autres pays baltes vont aussi dans la « bonne direction ». La Lettonie a porté ses dépenses militaires à 253,8 millions d’euros (+0.1%) avec l’objectif affiché d’atteindre la norme des 2% du PIB en 2020. Le plus gros effort a été consenti par la Lituanie, qui partait de loin : cette année, son budget de la Défense a augmenté de plus de 30% pour atteindre les 424,5 millions d’euros, ce qui correspond à 1,11% de son PIB (contre 0.78% en 2014).

La Pologne se classe également parmi les bons élèves, avec un effort défense pas loin d’atteindre la norme fixée par l’Otan (1,95% du PIB). La Norvège devrait augmenter ses dépenses militaires de 3,5% pour atteindre les 6,8 milliards de dollars (1,6% du PIB), de même que la Roumanie, qui concernée par une possible déstabilisation de la Moldavie, va dépenser 1,7% de son PIB pour ses forces armées. Cela étant, sous perfusion financière, Bucarest a demandé à l’Union européenne et au Fonds monétaire international (FMI) d’être moins stricts quant au plan de réduction des déficits publics.

Comme on le voit, ces pays ont accru leur effort de défense en raison du réarmement de la Russie, sur fonds de craintes quant aux intentions de cette dernières. Cela vaut bien sûr pour les pays baltes et la Pologne, mais aussi pour la Norvège, qui répond ainsi au renforcement des moyens militaires russes dans l’Arctique.

Enfin, les Pays-Bas vont aussi augmenter leurs dépenses militaires en les portant à 8 milliards d’euros en 2015. Cela étant, après les coupes budgétaires effectuées ces dernières années, il faudra du temps aux forces armées néerlandaises pour remonter la pente. Si elles y arrivent.

Quant à la France, l’étude de l’ELN souligne que ses dépenses militaires seront stables en 2015, à 31,4 milliards d’euros, tout en relevant, toutefois, que son budget de la Défense a subi des annulations de crédits en 2014 (notamment pour financer les dépenses « imprévues » en fin d’exercice au niveau intergouvernemental). Cependant, le document ne parle pas de l’épée de Damoclès que constituent les ressources exceptionnelles qui, d’un montant de 2,4 milliards d’euros au total, ne sont pas encore au rendez-vous.

Viennent ensuite les mauvais élèves… Le Royaume-Uni en fait partie : en 2015, il dépensera 900 millions de livres sterling pour sa défense par rapport à l’année précédente. Et, comme le PIB britannique prend désormais en compte les revenus de la prostitution et de la drogue, mécaniquement, les dépenses militaires du pays ne représenteront plus que 1,88% du PIB.

Sans surprise, l’Allemagne est aussi dans le lot. Son budget militaire est de 32,26 milliards d’euros, soit seulement 1,09% d’un PIB, contre 1,14% en 2014 et 1,3% en 2013. Et la Bundeswehr ne s’en sort pas, alors qu’elle n’a pas de porte-avions, qu’elle n’a pas de mission de dissuasion nucléaire et qu’elle est moins engagée que les forces françaises… « Ceci pose la question de savoir si l’Allemagne pourra contribuer aux besoins généraux de l’Otan en matière de défense », estime l’étude de l’ELN, qui évoque aussi des « problèmes techniques » et un « manque de personnels qualifiés ».

D’autres pays de l’Otan suivent la même pente, comme l’Italie, qui a annoncé une réduction de ses dépenses militaires de près d’un milliard d’euros pour 2015, à 13,58 milliards d’euros contre 14,41 milliards d’euros en 2014.

Idem pour la Hongrie et la Bulgarie, dont les dirigeants ont pourtant annoncé, par le passé, une hausse de l’effort de défense. Dans les faits, Budapest a réduit son budget militaire à 790 millions de dollars (contre 1,03 milliard en 2014) et Sofia a diminué le sien d’une quarantaine de millions de dollars (soit à 565 millions).

Et encore, l’étude de l’ELN n’a pas abordé le cas de la Belgique, où les forces armées devront une nouvelle fois se serrer le ceinturon dans les quatre années qui viennent. Au final, Bruxelles ne consacrera plus que 0,5% de son PIB à sa défense… Soit quatre fois moins que la norme Otan.

« Je comprends que les dépenses de défense aient été fortement réduites après la Guerre froide », a commenté Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan, alors e visite à Rome. « C’était le dividende de la paix dont tous les pays ont voulu profiter. Et puis il y a eu la crise financière », a-t-il poursuivi. « Mais le monde a changé. Il y a de nouveau défis, à l’est avec une Russie plus péremptoire et au sud avec de la violence et de l’instabilité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord », a-t-il ajouté.

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