Des troupes de l’Otan ont défilé en Estonie, près de la frontière russe
En raison de leur histoire, les pays baltes craignent leur voisin russe. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ils ont intégrés l’Alliance atlantique en 2004, cette dernière leur garantissant une protection via l’article 5 de sa charte.
Seulement, l’annexion de la Crimée et les événements en Ukraine, où la Russie est accusée de soutenir les séparatistes du Donbass, ont ravivé les inquiétudes des États baltes. D’où les mesures dites de « réassurance » prises en leur faveur par l’Otan. Comme au football, il s’agit de bien marquer son territoire afin de décourager les attaquants de l’équipe adverse…
Ces mesures consistent donc à renforcer la mission de police du ciel « Baltic Air Policing » et d’organiser, sur les territoires de ces États, des exercices militaires. C’est ainsi que des forces de l’Otan sont actuellement en Estonie, où elles ont participé par une parade militaire à Narva, aux côtés de 1.300 soldats locaux, afin de marquer l’anniversaire de l’Indépendance de ce pays.
Actuellement, les symboles sont importants. Le défilé de Narva, où des blindés Stryker du Second Cavalry Regiment de l’US Army, drapeaux au vent, ont été vus, est ainsi un message envoyé à Moscou car le choix de la ville, où la population russophone est fortement majoritaire, n’est en effet pas un hasard.
Pour le comprendre, il faut remonter aux années 1918-20. Indépendante depuis la désagrégation de l’Empire russe (et le 24 février de cette année-là), l’Estonie est attaquée par l’Armée rouge. Elle bénéficie alors du concours du Royaume-Uni, qui a envoyé des navires de la Royal Navy en mer Baltique, de la Finlande, de la Suède du du Danemark et de Russes blancs (opposés aux Bolchéviques). Dans un premier temps, les Soviétiques prennent l’avantage, avant d’être mis en échec. Le 1er février 1919, ils sont repoussés hors du territoire estonien.
Pour autant, l’Armée rouge ne se décourage pas et porte ensuite ses efforts sur Narva, un carrefour stratégique qui ouvre la voie aux pays baltes, avec 160 000 hommes et 200 pièces d’artillerie. Mais là encore, les Estoniens opposent une résistance héroïque. Finalement, en février 1920, le traité de Tartu met un terme au conflit et Moscou reconnaît l’indépendance de l’Estonie. Une indépendance qui durera jusqu’au début de la Seconde Guerre Mondiale, l’URSS ayant envahi les pays baltes en vertu d’une clause du pacte germano-soviétique.
« Historiquement, nous savons que les actions de combat les plus tendues de la guerre d’indépendance ont commencé et ont fini autour de Narva », a rappelé, dans une allocution, le lieutenant-général Riho Terras, le commandant des forces d’autodéfense estoniennes.
Cependant, il n’est pas certain que le message soit bien passé à Moscou. Ou du moins il risque d’être interprété différemment, sachant que l’Otan, selon la doctrine militaire russe, reste une menace fondamentale. En outre, les Russes ne se rappelleront pas des combats de Narva de 1918-20 mais de ceux de 1944… Les troupes nazies (135.000 hommes dont 40 000 Estoniens), y remportèrent l’une de leurs dernières victoires défensives face à l’Armée rouge, ces dernières ayant subi de très lourdes pertes.