La Turquie a mené une opération militaire en Syrie

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Le Caber Kalesi, bien que situé en Syrie, fut placé sous souveraineté turque en vertu de l’article 9 du traité d’Ankara, signé en 1921 par la France et la Turquie. La raison de cette disposition était que ce site abritait alors la tombe de Suleyman Shah, le grand-père d’Osman Ier, fondateur de l’empire ottoman, mort dans le désert syrien au XIIIe siècle, en fuyant devant les armées mongoles. Depuis, le mausolée a été déplacé plus au nord, toujours en territoire syrien.

Depuis mars 2011, la Syrie a sombré dans la guerre civile, ce qui a profité aux groupes jihadistes, dont l’État islamique (EI ou Daesh), qui s’est emparé d’une vaste partie du territoire syrien. L’an passé, le ministre turc des Affaires étrangères, qui était alors Ahmet Davutoglu, avait averti qu’Ankara n’hésiterait pas à intervenir militairement si, d’aventure, le tombeau de Suleyman Shah, alors gardé par une vingtaine de soldats turcs (leur effectif a doublé par la suite), venait à être menacé.

Le 1er octobre dernier, encore, le président turc, Recep Tayyip Erdogan avait prévenu que toute attaque contre le mausolée de Suleyman Shah serait considérée comme une attaque contre la Turquie. Et techniquement, Ankara aurait pu invoquer l’article 5 e la charte de l’Alliance atlantique, lequel prévoit la solidarité des alliées dans le cas où l’intégrité territoriale de l’un d’entre eux est menacée.

Or, l’enclave turque a fini par être encerclée par l’EI. D’où la décision d’Ankara de mener une vaste opération militaire, appelée « Shah Firat », pour évacuer la dépouille de Suleyman Shah du Caber Kalesi et les militaires chargés de sa garde. Et cela, « en raison de la détérioration de la situation » dans la zone, a expliqué l’état-major turc.

« Une opération a été lancée à 21H00 (locales 19H00 GMT) avec le passage de 572 soldats par le poste-frontière de Mursitpinar (sud-est) », a ensuite précisé M. Davutoglu, devenu Premier ministre en août dernier, aux côtés de son ministre de la Défense, Ismet Yilmaz, et du général Necdet Özelu, le chef d’état-major des armées.

Ainsi, l’opération a mobilisé une quarantaine de chars et de plusieurs dizaines de véhicules blindés et a bénéficié d’une couverture aérienne, afin de parer à toute menace. L’incursion en territoire syrien a donc menée sur environ 35 km. « Nous étions prêt à riposter de la manière la plus forte à toute attaque qui aurait pu avoir pour cible nos troupes », a expliqué M. Davutoglu.

La dépouille de Suleyman Shah a été rapatriée « temporairement en Turquie pour être inhumés ultérieurement en Syrie », a encore indiqué le Premier ministre turc. En outre, une zone a été sécurisée en territoire syrien près de la localité d’Eshme, à quelques kilomètres de la frontière, afin d’y transférer les restes du dignitaire ottoma « à cet endroit dans les jours suivant ».

Du point de vue d’Ankara, cette opération est légale. « La Turquie a été privée d’aucun de ses droits en ce qui concerne le droit international », lequel l’autorise à disposer d’un territoire en Syrie pour le tombeau de Suleyman Shah, a fait valoir le Premier ministre turc. Comme il a été dit plus haut, le mausolée a déjà été déplacé en 1973, avant la mise en eau du lac el-Assad.

Cette incursion turque n’a pas donné lieu à de combats. Seul un soldat y accidentellement perdu la vie, d’après un communiqué de l’état-major. « Toutes les troupes turques et le contingent gardant la tombe sont rentrées sains et saufs tôt dimanche en Turquie et tout ce qui reste du lieu saint a été détruit », a précisé M. Davutoglu.

Photo : Archives (c) Forces armées turques

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