Un haut responsable militaire de l’Otan évoque l’éventualité d’une action militaire russe contre les pays baltes

En matière de défense, il faut être en mesure de parer toutes les éventualités. Cependant, certaines sont plus probables que d’autres. Toute la difficulté est de savoir lesquelles. Par exemple, qui aurait pu penser, en 2012, que les cartes géographiques allaient être périmées deux ans plus tard après l’annexion de la Crimée par la Russie, avec en prime à un retour de la réthorique digne de l’époque de la Guerre froide (qui, encore une fois, n’a été qu’une parenthèse dans l’histoire)?

Désormais, l’on peut s’interroger sur les intentions de Moscou. Après la Crimée, la Russie a apporté son soutien aux séparatistes du sud-est de l’Ukraine. C’est ce qui explique les succès remportés par ces derniers sur les forces ukrainiennes. Dans le même temps, face à une Union européenne qui ne peut lui opposer que des sanctions économiques, le président russe, Vladimir Poutine, pousse ses pions.

C’est ainsi que, grâce au gaz dont plusieurs pays de l’est de l’Europe ne peuvent pas se passer, le maître du Kremlin a signé, il y a quelques jours, accords de coopération bilatérale dans les domaines énergétique, universitaire, médical et nucléaire, avec Viktor Orban, le Premier ministre hongrois. La Grèce, en délicatesse avec l’UE depuis qu’Alexis Tsipras dirige son gouvernement, fait les yeux doux à la Russie. Pour le coup, M. Poutine réussirait là où Staline avait échoué à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Et l’on ne parle pas du cas de Chypre, également membre de l’Union européenne (mais pas de l’Otan).

Alors, dans ce contexte, la Russie pourrait-elle avoir des vues sur les États baltes (Lituanie, Estonie, Lettonie), qui comptent, parmi leurs populations, de fortes minorités russophones? En tout cas, le général britannique Adrian Bradshaw, commandant adjoint de l’Otan, a évoqué cette éventualité lors d’un court discours au au groupe de réflexion londonien Royal United Services Institute (RUSI).

Il n’est pas le seul : avant lui, Michael Fallon, le ministre britannique de la Défense, a estimé cette semaine qu’un « danger réel » pesait sur les trois pays baltes, par ailleurs membres de l’Otan. Plus tôt, Anders Fogh Rasmussen, l’ancien secrétaire général de l’Alliance atlantique, avait exprimé les même craintes dans un entretien accordé au quotidien « The Daily Telegraph ». Pour lui, la Russie pourrait « tester la capacité de réaction défensive » des alliées, liés par l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord.

« La Russie pourrait croire que les forces conventionnelles de grande envergure qu’elle a pu mobiliser à très court terme – comme nous l’avons vu dans les exercices militaires qui ont précédé la prise de la Crimée – pourraient à l’avenir être utilisées non seulement pour intimider et contraindre (un État), mais aussi conquérir des territoires de l’Otan », a ainsi affirmé le général Bradshaw.

Aussi, a-t-il averti, « les forces de l’Otan doivent se préparer à une guerre éclair menée par la Russie contre un État membre de l’Europe de l’Est, conçue pour prendre l’Alliance au dépourvu et conquérir ainsi un territoire ».

Mais avant d’en arriver là, l’essentiel est de prendre en compte la menace de « guerre hybride », dont le cas ukrainien est un exemple. En août, le général américain Philip Breedlove, le commandant suprême des forces alliées en Europe (SACEUR) avait fait part de sa préoccupation à ce sujet.

« Des militaires armés, sans insignes, qui créent des troubles, occupent des bâtiments gouvernementaux, (…), forment et donnent des conseils militaires à des séparatistes contribuent à la déstabilisation significative d’un pays (…). Et il y a un danger pour que cela arrive aussi dans d’autre pays d’Europe orientale », avait-il affirmé. Et d’expliquer : « Notre nouvelle inquiétude est ce type de guerre hybride (…) qui fait appel à la diplomatie, l’information, l’économie et la force militaire ».

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