Pourquoi les militaires marchent-ils au pas cadencé?

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Une fois les formalités administratives accomplies (ou du moins une partie), la visite médicale passée, les cheveux (tondus) coupés ras et les effets militaires perçus, chaque recrue, et cela, quelle que soit sa future spécialité, ne se déplacera plus, pendant les semaines à venir, qu’en marchant au pas avec ses camarades de promotion. Pour aller en salle de cours, à la piscine, au mess ou à la chambrée, il n’y coupera pas. Et le plus souvent, ce sera en entonnant un chant militaire (parce qu’on n’est pas chez les Pink Floyd).

L’ordre serré – et plus précisément le pas cadencé – ne date pas d’hier. L’écrivain romain Végèce, avait écrit, dans le livre I de De Re Militari, la chose suivante : « Au début des exercices vient l’apprentissage du pas militaire. Rien de plus important, en route ou en bataille, que de faire observer à tous les soldats une marche uniforme. Le seul moyen d’atteindre ce résultat, c’est de les habituer assidûment à des promenades où la vitesse sera jointe à la régularité. Une armée divisée et sans ordre s’expose toujours à de grands risques de la part de l’ennemi. »

De nos jours, apprendre à marcher au pas est utile quand il faut défiler, que l’on soit fantassin, artilleur, cavalier, sapeur, marin ou aviateur. Mais cette pratique a cependant quelques vertus, à commencer notamment par renforcer la cohésion d’un groupe. Mais ce n’est pas la seule.

Une récente étude publiée par Daniel Fessler et Colin Holbrook, deux chercheurs du département d’anthropologie de l’Université de Los Angeles (UCLA) a mis en évidence l’influence que pouvait avoir le fait de marcher au pas cadencé sur les perceptions ressenties par un groupe.

Ainsi, les deux chercheurs ont fait parcourir  250 mètres à 96 étudiants répartis en deux groupes : ceux du premier pouvaient marcher sans contraintes tandis que ceux du second devaient synchroniser leur pas. À l’issue, des images leur ont été montrées en leur demandant de les décrire ou de donner une estimation.

Plusieurs d’entre elles montraient un homme à la mine patibulaire et à l’attitude hostile. Et il a donc été demandé aux étudiants d’évaluer les « attributs corporels » de cet individu patibulaire (taille, corpulence, etc…). Or, ceux qui avaient marché au pas ont systématiquement donné des estimations inférieures à ceux du groupe témoin.

En clair, selon ces chercheurs, marcher au pas cadencé amoindri la perception du risque chez ceux qui s’y adonnent. « Nous avons constaté que lorsque des hommes marchent en synchronisation avec d’autres, ils pensent qu’un ennemi potentiel est plus petit et moins redoutable physiquement et donc moins intimidant que quand ils marchent simplement », a résumé Daniel Fessler.

« Les hommes qui marchent au pas cadencé se sentent moins vulnérables et plus puissants et croient qu’un ennemi potentiel sera facilement vaincu. Nous pension que cela les rend aussi plus susceptibles de recourir à la violence », a encore ajouté le chercheur.

Voilà donc au moins une raison qui explique pourquoi, depuis l’Antiquité, les soldats marchent au pas cadencé. Une autre étant, bien évidemment, l’effet qu’ils produisent en se déplaçant de la sorte sur les personnes lambda. Et, généralement, il est toujours impressionnant.

Photo : (c) École de l’Air

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