L’armée allemande n’est pas certaine de pouvoir envoyer en Ukraine les drones proposés à l’OSCE
Après la publication de rapports mettant en avant le faible taux de disponibilité de ses équipements, l’histoire de ses avions de transport Transall C-160 tombant en panne les uns après les autres pour envoyer une équipe d’instructeurs militaires au Kurdistan irakien, la Bundeswehr ne serait pas maintenant en mesure d’envoyer en Ukraine les drones Luna X-2000 que Berlin a promis à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Pour rappel, la France et l’Allemagne ont officiellement proposé l’envoi de drones dans l’est de l’Ukraine afin d’y surveiller le cessez-le-feu. Côté français, le 61e Régiment d’Artillerie serait sollicité, avec ses drones tactiques Sperwer.
Seulement, ce 17 octobre, à l’antenne de la radio DeutschlandFunk, Gernot Erler, le coordinateur gouvernemental allemand en charge de la coopération avec la Russie et l’Asie centrale a émis des doutes sur la capacité des drones Luna X-2000 : ils ne résisteraient pas au froid.
La veille, le quotidien populaire Bild a indiqué que ces appareils ne peuvent pas être engagés quand la température est inférieure à -19°C. Et, « durant l’hiver ukrainien, les températures aux altitudes de vol des drones, c’est-à-dire entre 3.000 et 5.000 mètres, sont beaucoup plus basses », a-t-il fait remarquer.
« C’est la raison pour laquelle la proposition du ministère de la Défense (de les envoyer) était dès le départ conçue comme ne devant durer que jusqu’à la fin de l’année », a alors expliqué M. Erler. Or, la durée de ce déploiement n’avait, jusqu’à présent, jamais été évoquée.
Le ministère allemand de la Défense n’a pas démenti cette limite de température pour les drones Luna X-2000, dont le constructeur, EMT, assure qu’ils sont « tout temps ». « Il ne s’agit pas d’une défaillance mais d’une donnée physique », a fait valoir son porte-parole, lors d’un point presse gouvernemental. Et cela concernerait également « tous les drones qui pourraient être utilisés en Ukraine ».
« Par ailleurs, le modèle Luna a été utilisé au Kosovo, sur 5.000 vols, en hiver comme en été et il est théoriquement possible de l’utiliser en hiver, il faut juste regarder chaque jour quelles sont les conditions climatiques, a-t-il ajouté. Le Luna X-2000 a également été employé dans le nord de l’Afghanistan, région qui ne passe pas pour avoir des hivers doux…
Quoi qu’il en soit, cette mission franco-allemande dans l’Est de l’Ukraine doit encore franchir des obstacles juridiques et politiques. Si la Russie n’a pas marqué d’opposition pour la surveillance de la frontière ukrainienne avec des drones, il faut obtenir l’autorisation de Kiev, étant donné que l’offre faite par Paris et Berlin prévoit aussi le déploiement d’une force de protection.
« Il s’agit de savoir également comment, quand et si le Parlement ukrainien peut se trouver en situation de ratifier la présence d’un élément armé d’un Etat étranger sur son territoire », a expliqué Martin Schäfer, le porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères. « Les questions portant sur les spécificités techniques ne sont absolument pas décisives. Ce qui est important, c’est que les signataires du protocole de Minsk, à savoir le gouvernement russe, le gouvernement ukrainien et les différents groupes de séparatistes soient effectivement prêts à accepter ces drones », a-t-il encore insisté ce 17 octobre.
En outre, la question de la protection de ce détachement de drones franco-allemand pose aussi problème à l’OSCE, dont les observateurs ne sont pas armés. Le 15 octobre, le ministre français des Affaires étrangères, Laurant Fabius, a dit souhaiter « vivement que les questions juridiques soient résolues mais cela dépend de l’OSCE ». Le même jour, son homologue allemand, Frank-Walter Steinmeier, a de son côté estimé « que concernant les examens et les expertises nécessaires pour préparer cette décision, tout devrait être terminé dans le courant du mois ».