Otan : Que retenir du sommet de Newport?

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Sur fond de tensions avec la Russie en raison de la crise ukrainienne, les 28 chefs d’État et de gouvernement des pays membres de l’Otan se sont réunis à Newport (Pays de Galles) les 4 et 5 septembre. En voici les principales décisions.

1- Création d’une nouvelle force très réactive

C’est la conséquence des actions menées par la Russie en Ukraine. En août, le général Breedlove, le commandant suprême des forces alliées en Europe (SACEUR), avait insisté sur la nécessité pour l’Otan de se préparer à ce qu’il avait appelé la « guerre hybride », laquelle « fait appel à la diplomatie, l’information, l’économie et la force militaire ».

L’Otan dispose déjà d’une force de réaction rapide (NRF, Nato Response Force), déployable partout dans le monde à faible préavis. Là, il est question de mettre en place un « fer de lance », c’est à dire une force très réactive, mobilisable quasiment immédiatement. Elle devra pouvoir engager un bataillon dans les 2 jours, une brigade (5.000 à 7.000 hommes) dans les 5 à 7 jours. Des bases logistiques avancées, avec des équipements et des munitions prépositionnées, seront ouvertes notamment dans les États  baltes, en Pologne et en Roumanie. Il n’est donc pas question pour l’Otan de disposer d’emprises militaires permanentes dans ces pays.

L’acte fondateur de 1997 signé par l’Alliance atlantique et la Russie n’autorise pas l’installation de bases permanentes de l’organisation dans les anciens pays du bloc de l’Est.

2- Adoption d’un Plan de réactivité (Readiness action plan, RAP)

Cette nouvelle NRF fait partie d’un Plan de réactivité, qui vise surtout à renforcer la visibilité de l’Otan dans les pays d’Europe de l’Est. Sa vocation est défensive, puisqu’il s’agit de « réagir » à une éventuelle agression.  « Je pense que cela envoie un message très clair à Moscou »,  a commenté Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Otan. « Nous nous sommes mis d’accord aujourd’hui pour maintenir une présence et une activité continues dans l’air, sur terre et en mer dans la partie orientale de l’Alliance, sur la base de rotations », a-t-il expliqué.

3- Faire face à la guerre hybride

Parallèlement à la mise en place du Plan de réactivité, l’Otan entend prendre des mesures pour réponde « efficacement aux défis spécifiques posés par les menaces que représente la guerre hybride, dans le cadre de laquelle un large éventail de mesures militaires, paramilitaires ou civiles, dissimulées ou non, sont mises en œuvre de façon très intégrée ».

Cela passera par le développement d’une communication stratégique, l’élaboration de « scénarios d’exercice » prenant en compte ces menaces et le renforcement de la coordination entre l’Otan et « d’autres organisations, conformément aux décisions prises en la matière, le but étant d’améliorer le partage de l’information, les consultations politiques et la coordination interservices ».

4- Un plan de soutien à l’Ukraine

L’Ukraine ne fait pas partie de l’Otan et ce sera le cas pendant encore longtemps. Pour cela, il faut que Kiev en fasse la demande et que cette dernière soit acceptée à l’unanimité par les 28 États membres. Une fois cette étape passée, il lui faudra intégrer le MAP (le plan d’action pour l’adhésion), qui suppose de remplir toute une série de critères au niveau de la qualité des forces armées et de l’état de droit.

Comme l’a rappelé le Premier ministre canadien, Stephen Harper, l’engagement au sein de l’Otan repose sur des valeurs qui sont « la liberté, la démocratie, le respect des droits de la personne et de la primauté du droit ».

Cela étant, l’Ukraine est partenaire de l’Otan. À ce titre, ses forces armées ont pris part à plusieurs opérations de l’Alliance (Afghanistan, Ocean Shield, etc…).

« Nous apprécions vivement les contributions de l’Ukraine à nos opérations et à la Force de réaction de l’Otan. L’Ukraine a été aux côtés de l’Otan. Aujourd’hui, en ces temps difficiles, c’est l’Otan qui est aux côtés de l’Ukraine », a affirmé M. Rasmussen.

Aussi, il a été décidé un « paquet global et adapté de mesures » pour aider l’Ukraine, qui fait face à une rébellion pro-russe. Le soutien de l’Otan concernera 4 domaines : réadaptation des soldats blessés, la cyberdéfense, la logistique, et le commandement, le contrôle et les communications. Le montant de cette aide s’élèvera à une quinzaine de millions d’euros.

5- Incertitudes au sujet de l’Afghanistan

Le mandat de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF) se termine à la fin de cette année. Une nouvelle mission de l’Otan, Resolute Supporte, devrait prendre le relais afin de continuer à soutenir, avec des effectifs limités, les forces de sécurité afghane. Des négocations sont en cours à cette fin… Seulement, elles sont suspendues à la ratification d’un traité bilatéral de sécurité conclu entre Washington et Kaboul, le président sortant, Hamid Karzaï, ayant pris le soin de « refiler le bébé » à son successeur. Seulement, les deux rivaux de la présidentielle afghane, Abdullah Abdullah et Ashraf Ghani, ne sont toujours pas arrivés à se mettre d’accord sur les résultats du scrutin.

« Il ne faut pas se voiler la face : le temps nous est compté », a averti M. Rasmussen.

Nous avons besoin de savoir très rapidement si les arrangements de sécurité nécessaires seront signés par le gouvernement afghan, car c’est une condition préalable pour notre présence en Afghanistan après 2014″, a-t-il rappelé.

6- La priorité des capacités de cyberdéfense réaffirmées

Pour l’Otan, « les cybermenaces et les cyberattaques continueront de se faire de plus en plus fréquentes, sophistiquées et potentiellement dommageables ». Dans la droite ligne des sommets de Lisbonne (2010) et de Chicago (2012), il a été réaffirmé « les cybermenaces et les cyberattaques continueront de se faire de plus en plus fréquentes, sophistiquées et potentiellement dommageables » et rappelé « que la responsabilité fondamentale de l’Otan en matière de cyberdéfense est de défendre ses propres réseaux et que l’assistance aux Alliés doit être envisagée dans un esprit de solidarité ».

Aussi, est-il affirmé dans la déclaration finale, les Alliées restent « déterminés à développer plus avant leurs capacités nationales de cyberdéfense » et à renforcer la  » cybersécurité des réseaux nationaux dont l’Otan dépend pour mener à bien ses tâches fondamentales, afin de contribuer à assurer la résilience et la protection complète de l’Alliance ».

7- Des initiatives pour le développement de capacités de défense à l’égard de pays non membres

Les États membres ont décidé de lancer « une initiative de renforcement des capacités de défense et des capacités de sécurité » afin « d’accroître » les engagements de l’Otan « à l’égard des pays partenaires » et « d’aider l’Alliance à projeter la stabilité sans déployer des forces de combat importantes ».

« Sur la base de notre coopération étroite, et suite à leur demande, nous sommes convenus d’élargir cette initiative à la Géorgie, à la Jordanie et à la République de Moldavie », peut-on lire dans la déclaration finale. Deux de ces pays entretiennent des relations compliquées avec la Russie. Le premier a été engagé dans une guerre (2008) avec cette dernière pour le contrôle de l’Ossétie du Sud (région séparatiste géorigienne, ndlr) tandis que le second redoute une sécession de la Transnistrie, prête à rejoindre le giron russe.

8- Mettre fin à la baisse des budgets de la Défense

La norme fixée par l’Otan veut que les États membres consacrent 2% de leur PIB à leur effort de défense. Peu l’ont respectée jusqu’à présent. « Nous convenons d’inverser la tendance à la baisse que connaissent les budgets de défense, d’utiliser de la manière la plus efficace possible les fonds à notre disposition et de favoriser une répartition plus équilibrée des dépenses et des responsabilités », affirme la déclaration finale, qui souligne par ailleurs qu' »une industrie de défense forte dans toute l’Alliance, notamment une industrie de défense plus forte en Europe et une coopération industrielle de défense accrue en Europe et de part et d’autre de l’Atlantique, reste indispensable à la fourniture des capacités requises ».

Ainsi, les États membres dont le budget militaire est inférieur à 2% de leur PIB (ce qui est le cas de la France, ndlr) devront cesser « toute diminution des dépenses de défense » et chercher les augmenter « en termes réels à mesure que croîtra leur PIB ». En outre, l’objectif de consacrer 20% des dépenses militaires à l’acquisition de nouveaux équipements ainsi qu’à la R&D (recherche et développement) a été affirmé.

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