Syrie : Le Front al-Nosra négocie sa sortie de la liste noire de l’ONU en échange des casques bleus fidjiens retenus en otage

Depuis le 28 août, 45 casques bleus fidjiens de la Force des Nations unies chargée d’observer le dégagement (FNUOD), déployée depuis 1974 pour surveiller le cessez-le-feu entre la Syrie et Israël au niveau du plateau du Golan, sont retenus en otage par le Front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda, par ailleurs concurrent de l’État islamique (EI).

Des discussions en vue d’obtenir la libération de ces soldats de la paix ont été dès lors engagées par une équipe de négociateurs des Nations unies. Dans le même temps, 75 casques bleus philippins de la FNUOD, qui étaient bloqués sur leurs positions par les militants du Front al-Nosra ont pu être exfiltrés.

Cependant, les négociations pour libérer les militaires fidjiens s’annoncent délicates, au vu des exigences exprimées par les jihadistes. Le Fron al-Nosra a en effet demandé, selon le chef de l’armée fidjienne, Mosese Tikoitoga, de sortir de la liste noire des organisations terroristes des Nations unies, l’envoi d’une aide humanitaire pour une ville située dans un de leurs bastions près de Damas ainsi que des « compensations financières » pour trois de leurs blessés.

« Ce sont les demandes officielles (du Front Al-Nosra) en échange de la libération de nos soldats », a indiqué Mosese Tikoitoga. Ces requêtes ont été transmises aux Nations unies. « Nos soldats se trouvent dans un endroit tenu secret, les rebelles refusent de nous dire où ils sont », a-t-il encore ajouté.

Mais d’après la presse fidjienne, le Front al-Nosra aurait présenté une autre demande : la libération d’un certain Setmariam Nasar, alias Abou Moussab al-Souri. Réfugié en Europe  après la répression des Frères musulmans à Hama par le régime syrien, en 1982, ce dernier obtint la nationalité espagnole après s’être marié à une athée gauchiste qu’il convertira à l’islam.

Son passeport lui donnant quelques facilités, al-Souri effectua plusieurs déplacement en Afghanistan et au Pakistan, où il rencontra les premiers idéologues d’al-Qaïda. Depuis Londres, où il s’installa au début des années 1990, il apporta son soutien au Groupe islamique armé (GIA) algérien en exaltant ses « faits d’armes » dans une feuille de choux appelée al-Ansar. En 1996, et après la victoire des taliban, il regagna l’Afghanistan, où là encore, il fréquenta les « pontes » d’al-Qaïda. Dubitatif sur la stratégie de l’organisation terroriste, il rédigea un manuel du jihad, « Appel à la résistance islamique mondiale », qui sera diffusé plus tard sur Internet. Ce « pavé » aurait, dit-on, inspiré l’État islamique…

En 2005, al-Suri fut capturé à Quetta (Pakistan) avant d’être remis aux services américains. Alors que Bachar el-Assad était encore fréquentable, il fut livré, deux ans plus tard, à Damas. Depuis, l’on ignore où il se trouve. Des sites jihadistes ont prétendu qu’il avait été libéré en décembre 2011. Aussi, la demande d’al-Nosra, si elle est confirmée, est troublante.

 » La demande de libération d’Abu Mussab al-Suri n’est pas officielle, on ne sait pas encore si c’est ce que veut réellement le front al-Nosra. D’autre part il est très peu probable que le gouvernement syrien accepte de le libérer. Mais en parallèle, nous ne savons pas ce qui se négocie en coulisses. Le front al-Nosra pourrait par exemple demander de l’argent, ou la libération de certains de leurs membres, moins haut gradés qu’al-Souri. Bref, nous ne connaissons pas la nature de la rançon qu’ils exigent », a réagi Roger Shanahan, chercheur à l’Institut australien Lowy, d’après Radio Australia.

Cela étant, s’agissant de la raison pour laquelle les casques bleus fidjiens ont été pris en otage, SITE, le centre américain de surveillance des sites Internet appartenant à la mouvance jihadiste, a reproduit un communiqué du Front al-Nosra dans lequel il affirme que les soldats de la paix sont retenus en  » représailles à la complicité de l’ONU avec le régime criminel de Bachar al-Assad ».

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