Les mystérieux avions qui ont bombardé les islamistes libyens auraient été fournis par les Émirats arabes unis
La semaine passée, des positions tenues par les milices islamistes dans le secteur de Tripoli ont été bombardées à deux reprises par des avions non identifiés. Visiblement, ces raids aériens ont été menés en soutien des brigades de Zenten, qui, proches des milieux libéraux, livrent des combats acharnés depuis la mi-juillet pour conserver le contrôle de l’aéroport de la capitale libyenne.
Comme l’on peut s’en douter, l’origine des appareils impliqués a fait l’objet de spéculations. La France, l’Italie et les États-Unis ont été soupçonnés d’avoir pris part à ces bombardements… Ce que ces pays ont nié. Ayant lancé, en mai dernier, l’opération « Dignité » contre les groupes islamistes et jihadistes implantés à Benghazi (est de la Libye), le général Khalifa Haftar a revendiqué ces raids sur Tripoli.
Revenu en Libye après un exil aux États-Unis, le général Haftar, qui n’a plus de fonctions officielles, a su en effet rallier à sa cause des unités des forces aériennes libyennes. Selon la version donnée par son entourage, les bombardements des positions islamistes à Tripoli auraient été effectués par des SU-24 Fencer. Seulement, aucun des appareils en service au sein de l’armée libyenne (une douzaine) n’ont été vus en vol depuis au moins 2011… Ont-ils été remis en état? Et par qui si c’est effectivement le cas? Et il a aussi été question de l’implication de mercenaires dans cette affaire…
De leur côté, les islamistes de Tripoli ont accusé l’Égypte et les Émirats arabes unis d’être responsables de ces raids nocturnes. Mais Le Caire, qui soutient par ailleurs le général Haftar, a immédiatement démenti toute implication. Ou du moins l’implication de ses avions. Seulement, d’après des responsables américains cités par le New York Times, il semblerait bien que les autorités égyptiennes (avec, à leur tête, le président Abdel-Fattah el-Sissi) aient joué un rôle.
Ainsi, selon le quotidien américain, les Émirats arabes unis ont envoyés des chasseurs-bombardiers sur des bases aériennes égyptiennes. C’est à partir de ces dernières qu’ils auraient décollé pour effectuer les deux raids aériens sur Tripoli. Les forces aériennes émiraties ont les moyens d’une telle opération : elles disposent en effet de F-16E/F Block 60 « Desert Falcon » (un exemplaire a été endommagé lors des opérations en Libye, en 2011) et, au besoin, de 3 avions ravitailleurs A-330 MRTT.
Toujours d’après le New York Times, l’Égypte et les Émirats arabes unis n’ont pas prévenu les États-Unis de leurs intentions… D’où une certaine surprise, à Washington, après les deux raids aériens.
A priori, il s’agirait d’un épisode de la guerre que se livrent par procuration la Turquie et le Qatar d’un côté (ces deux pays soutiennent les Frères musulmans) et, de l’autre, l’Arabie Saoudite, les Émirates arabes unis et l’Égypte. Ces dissensions ont récemment provoqué des tensions au sein du Conseil de coopération du Golfe.
« Lors du soulèvement contre le colonel Kadhafi, il ya trois ans, le Qatar et les Émirats arabes unis ont tous deux joué un rôle actif, mais chacun a favorisé différents clans parmi les rebelles. Tandis que le Qatar a soutenu certains islamistes, les Émirats Arabes Unis ont favorisé certaines milices tribales ou régionales, y compris les milices de Zenten », a expliqué Frédéric Wehrey, un expert de la Fondation Carnegie Endowment for International Peace.
Outre ces raids aériens, l’Égypte et les Émirats auraient mené, toujours selon les responsables américains, une opération spéciale contre un camp islamiste implanté dans la ville libyenne de Derna. Cependant, il n’est pas clair si les forces égyptiennes ont été impliquées : Le Caire aurait seulement fourni la base de départ.