Un militaire américain fait prisonnier par les taliban échangé contre 5 détenus de Guantanamo
Après 5 années de captivité, le sergent Bowe Berghdal, seul prisonnier militaire américain détenu par les taliban et dont une preuve de vie avait été donnée en janvier dernier, a été libéré le 31 mai. L’annonce a été officiellement faite par un communiqué diffusé par la Maison Blanche.
« Aujourd’hui, le peuple américain est heureux de pouvoir bientôt accueillir chez lui le sergent Bowe Bergdahl », a ainsi affirmé le président Barack Obama. Le sergent, en « bonne condition », a été transféré sur la base de Bagram pour y être placé en observation médicale. Il rejoindra ensuite l’hôpital américain de Landstuhl (Allemagne). Là, « il commencera un processus de réadaptation, bénéficiera de temps pour raconter son histoire, décompresser et commencer à renouer des liens avec sa famille », a indiqué une source militaire.
Selon des responsables parlant sous le couvert de l’anonymat et cité par l’AFP, le sergent Berghdal a été remis à une unité des forces spéciales américaines, dans l’est de l’Afghanistan, par une vingtaine de combattants taliban.
Comment cela a-t-il a pu être possible? Dans un premier temps, les autorités américaines ont été relativement floues. Peu après l’annonce de la libération du sous-officier, le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, a indiqué avoir informé le Congrès que 5 prisonniers détenus à Guantanamo allaient être transférés vers le Qatar sans pour autant faire un lien entre les deux affaires.
Quasiment dans le même temps, John Kerry, le chef de la diplomatie américaine, a remercié l’émir du Qatar, le cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, pour l’important rôle qu’il a tenu dans la libération du sergent Bergdahl.
En clair, le sous-officier a été échangé contre 5 taliban, à savoir Mohammad Fazl, Norullah Noori, Mohammed Nabi, Khairullah Khairkhwa et Abdul Haq Wasiq. Ces derniers étaient des responsables influents du mouvement taleb avant les attentats du 11 septembre 2001 et l’intervention américaine en Afghanistan qui suivit.
« Le gouvernement qatari nous a donné l’assurance qu’il allait mettre en place des mesures pour protéger notre sécurité nationale », a déclaré, plus tard, le président Obama, sans donner plus de précisions.
S’il se réjouit de la libération du sergent Bergdahl, l’influent sénateur John McCain, candidat malheureux de la course à la Maison Blanche en 2008, a demandé la nature des mesures envisagées pour « s’assurer que ces extrémistes taliban violents ne retourneront jamais combattre les Etats-Unis ou nos alliés ».
L’on sait que le Qatar est impliqué dans les tentatives de dialogue entre Kaboul et les insurgés afghans. D’ailleurs, un bureau des taliban a été ouvert à Doha. A priori, le départ de Guantanamo de ces 5 hauts responsables était une des conditions posées par le mouvement taleb pour ouvrir des négociations de paix en Afghanistan.
Seulement, son porte-parole, Zabihullah Mujahid, a affirmé que cet échange « n’avait pas été fait dans l’optique du processus de paix ». « Il s’agit seulement d’un échange de prisonniers de guerre, cela n’a rien de politique », a-t-il affirmé à l’AFP.
Cela étant, cet échange n’est pas une surprise. En mai 2012, le gouvernement américain avait admis avoir engagé des négociations avec les taliban pour obtenir la libération du sergent Bergdahl. Plus tard, la Maison Blanche avait indiqué qu’elle était prête à libérer 5 responsables du mouvement taleb à cette fin.
Quant au sergent Bowe Bergdahl, alors âgé de 23 ans au moment de sa capture, le 30 juin 2009, dans la province de Paktia, il avait été porté disparu avant la diffusion d’une vidéo le montrant aux mains des insurgés. Sur ses images, il était apparu habillé à l’afghane. Répondant à des questions posées en anglais, il avait déclaré, sous la contrainte, que le gouvernement américain devant « retirer ses troupes d’Afghanistan ».
Par la suite, les taliban ne communiquèrent pas énormément au sujet de sa détention pendant ces 5 dernières années. En tous, ils diffusèrent 5 ou 6 vidéos, le plus souvent à des fins de propagande. En août 2010, un commandant taleb avait même affirmé que le sous-officier s’était converti à l’islam et qu’il enseignait aux insurgés des tactiques de combat. Ce qui avait été démenti par le Pentagone à l’époque (la version du responsable ne collait pas avec les éléments alors connus). Qui plus est, il fut rapporté, en décembre 2011, que le militaire américain tenta de s’évader.
