L’échec du tir d’un missile M-51 en partie expliqué

m51-20140514Le 5 mai 2013, le sous-marin nucléaire lanceur d’engins « Le Vigilant » tirait un missile balistique intecontinental M-51afin de valider ses capacités après quelques mois passés en cale sèche pour une refonte. Seulement, l’engin s’était auto-détruit quelques secondes après son lancement. Il s’agissait là, pour la dissuasion française, du premier échec de ce genre depuis 1996.

Une commission d’enquête fut donc constituée pour tenter de trouver les causes de ce tir raté. Et l’on pensait alors que ses conclusions allaient rester confidentielles. Seulement, lors de la série d’auditions menées par la commission de la Défense et des Forces armées de l’Assemblée nationale sur le thème de l’avenir de la dissuasion nucléaire, l’échec du M-51 a été plusieurs fois abordé.

Président d’Astrium SAS/Airbus Defense & Space, le groupe qui développe le M-51, Alain Chameau a indiqué qu’un prochain tir du missile est « prévu dans moins d’un an » et précisé avoir « dégagé les ressources humaines nécessaires pour analyser très rapidement l’origine technique de l’échec du précédent essai, sans conséquences sur notre contribution à la posture de dissuasion ou à l’activité spatiale ». Et d’ajouter : « Les coûts associés (un M-51 coûte 120 millions d’euros) à cet événement ont été financés par un étalement de programme ».

Pour en savoir plus, il aura donc fallu attendre l’audition de Laurent Collet-Billon, le Délégué général à l’armement (DGA). Qu’a-t-il dit à ce sujet? « Après l’échec, en mai 2013, du sixième tir expérimental du missile M51, nous avons demandé aux services concernés d’Airbus Defence & Space des efforts accrus tant en matière d’ingénierie qu’en maîtrise de la qualité et de leurs sous-traitants », a-t-il expliqué aux députés de la commission, avant de souligner que « ces faiblesses », constatées par les services « qualité » de la Direction générale de l’armement, « doivent être impérativement être corrigées ».

« Les enquêteurs chevronnés qui ont analysé les causes de l’échec du tir d’essai de mai 2013 appellent à des efforts, à la fois dans le management et dans l’attention portée aux outils d’ingénierie système », a poursuivi Laurent Collet-Billon.

« Seule l’ingénierie système – et ses outils informatiques associés – nous permettront de gérer la complexité des interfaces et des évolutions successive des équipements, et d’assurer la démonstration de la sûreté nucléaire », a-t-il estimé, car, selon lui, « la question intéresse le domaine civil, le fabricant du M51 étant aussi le constructeur des fusées Ariane ».

Plus tard, en réponse à une question posée par un député au sujet de l’échec de ce tir, M. Collet-Billon a affirmé que « l’intégralité des événements techniques enregistrés a été analysée par les experts les plus chevronnés de la DGA qui avaient à leur disposition la totalité des plans concernés ». Aussi, cette « reconstitution (…) fiable » a permis « d’apporter des mesures correctives efficaces » et de mettre en évidence « des lacunes dans les plans qualité des industriels ».

« Nous y remédierons, même si un nouveau dispositif est difficile à mettre en place compte tenu de la faible cadence de production des missiles », a encore fait valoir le DGA.

Outre Airbus Defense & Space, la filière industrielle du M51 compte plus de 450 entreprises françaises, dont 140 fournisseurs directs et 40 maîtres d’œuvre de sous-systèmes (avec 25 % de PME et de TPE).

Mis en service en 2010 à bord du SNLE « Le Terrible », le M-51.1, à guidage inertiel avec recalage par visée stellaire, affiche une masse de 54 tonnes et a une portée supérieure à 6.000 km. Cette version sera progressivement remplacée par le M-51.2, qui aura une portée plus importante et dont la partie haute « possède une meilleure aptitude à pénétrer les défenses adverses ».

« Sur la base de ces engagements financiers, et après une longue phase de conception initiale qui a permis de mettre en œuvre les approches plus récentes en matière de ‘design to cost’, le développement de version M-51.3 va ainsi pouvoir débuter cette année avec toutefois une montée en puissance étalée », a indiqué Alain Chameau lors de son passage de la comission de la Défense.

« Cette version du M51, qui concerne l’étage supérieur du missile et les moyens sols associés a pour but, d’une part, de traiter les obsolescences et, d’autre part, de répondre à l’échéance des dix prochaines années aux évolutions des besoins opérationnels : adaptation du système aux nouvelles charges utiles, précision et souplesse d’emploi en portée et pénétration », a-t-il ajouté.

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