La situation en Ukraine crispe les relations entre l’Union européenne et la Russie

Quand, le 21 novembre 2013, le président urkrainien Viktor Ianoukovitch renonce à la signature d’un accord de libre-échange et de coopération avec l’Union européenne (UE), en cours de négociation depuis 5 ans, pour se tourner vers la Russie, des manifestations pro-européennes éclatent alors à Kiev et les opposants au gouvernement occupent la place de l’Indépendance. Le mouvement « EuroMaïdan » est né.

Mais cette opposition au président Ianoukovitch ne se compose pas seulement de partisans d’un rapprochement avec l’Union européenne et l’Occident en général. Parmi eux se trouvent en effet des militants d’extrême droite du groupement « Praviy Sektor », qui, selon la BBC, prennent un part active aux affrontements contre les forces de l’ordre ukrainienne.

Par ailleurs, des lignes de fracture réapparaissent à la faveur de cette crise. L’ouest de l’Ukraine est plutôt favorable à l’UE, ce que l’est ne veut pas, dans la mesure où il est plus proche de la Russie, tant économiquement que culturellement. Ce tiraillement entre ces deux sphères d’influence est ancien.

En 2004, l’élection de Viktor Ianoukovich, pro-russe, avait été invalidée suite à la révolution Orange à cause de fraudes massives. Finalement, Viktor Iouchtchenko, victime d’une tentative d’empoisonnement quelques mois plus tôt, fut élu président. Avec un chef d’Etat pro-européen et  favorable à l’adhésion de son pays à l’Otan, l’Ukraine semblait avoir choisi de rejoindre la sphère d’influence occidentale. Ce que la Russie voyait d’un très mauvais oeil étant donné ses relations économiques avec Kiev (ce pays n’était-il pas le « grenier » de l’ex-URSS?) et ses facilités militaires, notamment à Sébastopol. D’où, en 2006, le chantage aux livraisons de gaz naturel…

Six ans plus tard, la parenthèse Iouchtchenko fut refermée, avec l’écrasante victoire de Viktor Ianoukovitch à l’élection présidentielle. Pour autant, les négociations portant sur une association avec l’UE continuèrent. Jusqu’en novembre 2013 et les manifestations pro-européenne, durement réprimées par les forces de l’ordre ukrainienne.

Seulement, cette situation est la source de tensions avec la Russie d’un côté et l’Union européenne et les Etats-Unis de l’autre. L’ancien ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a ainsi, en décembre, qualifié « d’inacceptables » les « menaces et pressions économiques » exercées par Moscou sur Kiev pour empêcher tout accord avec l’UE. Ce à quoi la diplomatie russe a répondu en dénonçant les « ingérences étrangères » en Ukraine, son chef, Sergueï Lavrov, allant jusqu’a déclaré que  » l’Occident se comportait de manière hystérique ».

Le 14 février, le ministre russe a répété ses accusations. « En pressant l’Ukraine d’aller d’un côté, et en l’avertissant qu’il faut choisir soit l’un soit l’autre, d’être soit avec l’Union européenne soit avec la Russie, montre que dans le fond ils essaient de créer une sphère d’influence », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse donnée à Moscou avec son homologue allemand, Frank-Walter Steinmeier.

« Il me semble qu’il n’est pas tout à fait correct, pas tout à fait poli, quand on parle de liberté de choix, d’envoyer chaque jour des émissaires », a-t-il ajouté, en faisant une allusion aux visites de responsables européens et américains à Kiev au cours de ces dernières semaines.

Cela étant, la contestation n’a pas faibli en Ukraine, alors même que le président Ianoukovitch a, fin janvier, promulgué une loi sur l’amnistie des manifestants interpellés, ainsi que l’abrogation de plusieurs amendements controversés sur la répression des manifestations, en échange d’une obligation, pour l’opposition, d’évacuer dans les 2 semaines tous les lieux publics et bâtiments qu’elle occupaient alors. Ce qu’elle a refusé.

Aussi, cela laissait présager le pire… Tout s’est accéléré le 18 février, avec un ultimatum exigeant le départ des opposants de la place de l’Indépendance. Résultat : au moins 25 personnes ont été tuées, dont des policiers, lors de l’assaut donné par les forces de l’ordre. Et les violences se sont propagées dans 3 villes situées dans l’ouest du pays.

Devant ce bilan, Moscou a affirmé qu’il s’agissait de la « conséquence directe de la connivence de responsables politiques occidentaux et des structures européennes qui ont fermé les yeux (…) sur les actions agressives de forces radicales ». Mais pour les responsables de l’UE, il est désormais question de sanctions à prendre à l’égard des responsables des violences.

« Je suis très préoccupée par la nouvelle et inquiétante escalade à Kiev », a ainsi affirmé Mme Catherine Ashton, le Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui avait multiplié les déplacements en Ukraine ces dernières semaines.

« Je condamne tout usage de la violence et exhorte les autorités ukrainiennes à s’attaquer aux racines de la crise », a-t-elle ajouté, par voie de communiqué, en demandant la « formation d’un nouveau gouvernement rassembleur », « des progrès pour une réforme constitutionnelle » et « des préparatifs d’une élection présidentielle transparente et démocratique » en Ukraine.

Le lendemain, Mme Ashton a fait savoir que « l’UE allait étudier des sanctions contre les responsables de la répression en Ukraine ». Plusieurs pays européens sont sur cette ligne, dont la Pologne, la France, l’Allemagne ou encore la Suède, où le ministre des Affaires étrangères, Carl Bildt, a accusé Viktor Ianoukovitch d’avoir du « sang sur les mains ».

De son côté, le vice-président des Etats-Unis, Joe Biden, a lancé un « appel au président Ianoukovitch à retirer les forces gouvernementales et à faire preuve de la plus grande retenue ».

Photo : Place de l’Indépendance (ou Maïdan), via Twitter

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