Nouvelle commande de drones Sperwer pour l’armée de Terre

Le groupe français Safran a indiqué, le 15 janvier, avoir reçu une commande de la Direction générale de l’armement (DGA) portant sur la livraison de 3 drones tactiques Sperwer destinés à l’armée de Terre. Une option d’achat a été posée pour deux exemplaires supplémentaires. Ces appareils seront livrés par sa filiale, Sagem, en 2015. Le montant du contrat n’a pas été précisé.

« Ce nouveau contrat impliquera les établissements Sagem de Dijon et de Poitiers pour les capteurs optroniques, de Fougères pour les cartes électroniques et de Montluçon pour les systèmes de pilotage, de navigation et l’intégration des drones, ainsi que de nombreuses sociétés françaises fournissant des sous ensembles du drone. Ce tissu industriel permet à Sagem de soutenir le SDTI de l’Armée de Terre au-delà de 2017 », précise le groupe Safran dans son communiqué.

Pour rappel, acquis en 2004 dans l’attente du drone multi-capteurs multi-missions (MCMM), le système de drone tactique intérimaire (SDTI) repose notamment sur le vecteur aérien « Sperwer ». D’une masse d’environ 300 kg, cet engin décolle au moyen d’une catapulte et se pose grâce à un parachute et des coussins gonflables. Doté d’une liaison radion et d’une charge utile optique et infrarouge, il a une autonomie d’au moins 4 heures et un rayon d’action de 80 km. Sa vitesse peut atteindre 180 km/h, à une altitude de 3.500 mètres. Il permet d’effectuer des missions de surveillance et de renseignement, en appui des unités terrestres.

A priori, cette acquisition de drones Sperwer supplémentaires doit permettre à l’armée de Terre, via le 61e Régiment d’Artillerie (RA) de Chaumont qui les met en oeuvre, de maintenir sa capacité en matière de drones tactiques dans l’attente de nouveaux systèmes, prévus par la Loi de Programmation Militaire (LPM) 2014-2019.

Dans le rapport indexé à cette dernière, il est écrit en effet que « la génération actuelle (SDTI, pour Système de drones tactiques intérimaire) arrivera à obsolescence entre 2015 et 2017; de nouveaux systèmes de drones plus récents seront acquis pour disposer d’une quinzaine de vecteurs à l’horizon 2019 sur la trentaine prévue dans le modèle » d’armée.

Ce n’est pas la première fois qu’une acquisition complémentaires de drones Sperwer est faite. Ainsi, en 2009, 6 exemplaires furent rachetés auprès du Canada, de même que 6 autres, de nouvelle génération, les années suivantes, dont 3 au titre du plan de relance gouvernemental en 2010.

En outre, un rapport du Sénat concernant l’équipement des forces dans le cadre du projet de loi de finances initiale pour 2012 indiquait que « des acquisitions complémentaires de nouveaux lanceurs et de 5 VA NG (vecteurs aériens de nouvelle génération) (étaient) prévues à partir de 2012 afin de maintenir cette capacité avant l’arrivée du système de drone tactique (SDT) ».

Selon le sénateur Daniel Reiner, a présenté, l’automne dernier, le 35ème rapport d’ensemble du Comité des prix de revient des fabrications d’armements (CPRA) à ses collègues de la commission des Affaires étrangères et des Forces armées, sur les 30 drones Sperwer livrés à l’armée de Terre, 13 avaient été perdus, fin 2011, en opération et que sur les 17 encore en dotation, de « nombreux drones sont en réparation ». En outre, leur maintenance coûte cher. « Le coût total de possession constaté sur 10 ans est de 273 millions d’euros, alors qu’il était évalué à l’origine à près de 116 millions d’euros », avait indiqué le parlementaire.

S’agissant du futur Système de drone tactique, le Watchkeeper, de Thales semble tenir la corde. Devant prochainement entrer au service au Royaume-Uni, ce dernier a fait l’objet d’une évaluation en France l’an passé, menée suite à un memorendum of understanding (MOU), signé en juillet 2012, entre les deux pays, dans le cadre des accords de Lancaster House de novembre 2010. Seulement, ces expérimentations n’ont pas complétement convaincu Laurent Collet-Billon, le délégué général à l’armement, lequel a pointé son manque de maturité.

« C’est en effet le cas en ce qui concerne les liaisons du drone avec le sol. Mais ses capacités de vol et d’emport ne sont pas en cause : il est prêt de ce point de vue. Je retiens de mes contacts avec la partie britannique que l’industriel a beaucoup travaillé sur les problèmes de liaisons au cours des deux derniers mois et qu’ils seraient en voie de règlement », lui avait répondu le général Ract-Madoux, le chef d’état-major de l’armée de Terre (CEMAT) lors d’une audition devant la commission Défense de l’Assemblée nationale, en octobre dernier. Et de plaider pour l’achat « d’un ou deux drones Watchkeeper en leasing avant leur livraison prévue en 2017, tant nous en avons besoin ».

Au sujet de ces expérimentations, le député Jean-Yves Le Déaut nous apprend, dans son avis « Environnement et prospective de la politique de défense« , établi dans le cadre de l’examen des crédits alloués aux forces armées pour 2014, que « seulement 40 heures d’essais ont pu être réalisées sur les 120 prévues, ce qui est tout-à-fait regrettable pour un essai qui a coûté 8 millions d’euros ».  Un montant qui a étonné le parlementaire, qui souligne « à ce propos que la coopération franco-britannique sur le projet Watchkeeper nécessite des précisions quant au partage des coûts et des retombées industrielles ».

Aussi, le Sénat est réservé sur un achat « sur étagère » du Watchkeeper, même s’il répond aux besoins et aux concepts d’emploi des forces terrestres françaises et britanniques et offre une opportunité réelle de coopération en matière de formation et de soutien.

Ainsi, dans un rapport intitulé « Projet de loi de finances pour 2014 : Défense : équipement des forces et excellence technologique des industries de défense« , Daniel Reiner, Xavier Pintat et Jacques Gautier ont dit être « favorables à ce que le choix du futur système de drones tactiques (…) se fasse dans le cadre d’un appel d’offres afin de préserver les intérêts financiers de l’Etat et doter l’armée de terre du meilleur matériel correspondant à ses besoins opérationnels. Cet appel d’offres devrait intervenir le plus rapidement possible, afin de pouvoir respecter le calendrier d’acquisition de la capacité. » Une telle procédure serait une opportunité pour Sagem de défendre les chances de son drone Patroller, qui pourrait être une alternative au Watchkeeper.

D’ailleurs, c’est ce qu’ont fait valoir les auteurs du rapport, en relevant que « au-delà de toutes les déclarations d’intention, la filière de drones tactiques mise en place par l’industriel Sagem avec le drone Sperwer et le drone Patroller, est la seule filière industrielle française et même européenne à l’oeuvre depuis plus d’une décennie, qui produit et qui crée des emplois ».

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