LPM : Un amendement visant à conditionner des accords de défense à l’arrêt du financement du terrorisme a été débattu

Il est toujours intéressant de se plonger dans les débats suscités les amendements déposés à l’occasion d’un projet de loi. En l’occurence, de nombreux ont été déposés pour celui concernant la programmation militaire 2014-2019, actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale. Certains sont plus intéressants que d’autres. Comme le n°46, défendu par le député Jean-Jacques Candelier, du groupe Gauche démocrate et républicaine.

Cet amendement visait à compléter l’alinéa 27 de l’article 2 du projet de LPM en précisant que « la France conditionne la conclusion d’accords de défense à l’arrêt du financement souverain du terrorisme international ».

Dans l’exposé sommaire, il était expliqué qu’il s’agissait de « conditionner les accords de défense de la France, ou les projets d’accords de défense, à l’arrêt du financement souverain des réseaux islamistes radicaux ». Une évidence, en somme… Au cours des débats, le député Candelier a précisé en introduction que cet amendement, « sage », ne visait « personne en particulier ». Mais en poursuivant son argumentation, il a clairement désigné le Qatar et l’Arabie Saoudite.

« Il est établi que le Qatar, je ne pense pas me tromper, et l’Arabie saoudite dépensent des milliards de dollars dans le financement et l’armement des mouvements islamistes, mouvements qui sont actuellement au cœur des problèmes que vivent la Tunisie, l’Égypte, le Mali, la Syrie ou encore la Libye », a ainsi affirmé le parlementaire.

« Vous êtes parfaitement informé de cette réalité, non par de simples articles de presse, mais par le biais de notes stratégiques de vos propres services. On ne peut plus fermer les yeux. Nous ne sommes pas dans des allégations, mais dans l’information produite par nos services de renseignement », a-t-il poursuivi, en s’adressant à Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense.

Et d’ajouter : « On ne peut pas d’un côté lutter, comme au Mali, contre l’islamisme armé et, de l’autre, soutenir et défendre des puissances qui jouent double jeu. Il faut un monde plus sûr, il faut agir de manière éthique. »

Cet amendement a reçu le soutien du député UMP Nicolas Dhuicq, qui l’a jugé « particulièrement lucide et important ». « Nous connaissons de véritables guerres civiles au sein du monde musulman, avec l’émir du Qatar qui se voit en nouveau prophète », a-t-il estimé.

Seulement, cet amendement a été refusé par la commission de la Défense et le gouvernement. « Nous comprenons l’esprit de cet amendement, monsieur Candelier. Mais les accords de défense – domaine extrêmement sensible – résultent d’un processus diplomatique et stratégique complexe », a répondu, au nom de la première, Geneviève Gosselin-Fleury.

De son côté, M. Le Drian est allé plus loin. « En aucun cas, nous ne pourrions engager un accord de défense avec un État dont la politique inclurait le financement du terrorisme international », a-t-il avancé. « Nous faisons, au contraire, de la lutte contre le terrorisme et contre ce genre de pratique étatique une des conditions de nos relations. Chacun peut partager ce point de vue », a-t-il poursuivi. Et de conclure : « Cela étant, je ne peux accepter un amendement qui laisse entendre que nous tolérerions aujourd’hui ce type de comportement de la part d’États auxquels nous sommes liés ».

La France négocie d’importants contrats d’armement avec les pays cités par le député Candelier. Ainsi, selon la Tribune, et après avoir décroché la modernisation de 4 frégates et de 2 pétroliers-ravitailleurs pour 1 milliard d’euros, Paris vise, auprès de Riyad, la commande de 6 FREMM (frégates multimissions) et de 5 à 6 sous-marins dans le cadre du programme Sawari III. Sans compter les projets en matière de défense aérienne. Même chose avec le Qatar, qui pourrait se décider pour le Rafale, l’hélicoptère NH-90 et le système SAMP/T… Autant de ventes potentielles que l’amendement n°46 aurait pu torpiller s’il avait été adopté!

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