Des millions de données téléphoniques interceptées en France par le renseignement américain

Que les Etats-Unis, via la National Security Agency (NSA), surveillent les communications téléphoniques et électroniques à des fins de contre-terrorisme, passe encore. Mieux même : si cela permet de déjouer des projets d’attentats et que les renseignements sur des cellules dormantes puissent être transmis aux services de renseignement nationaux, alors c’est une bonne chose. En revanche, quand cette surveillance est massive, cela pose des questions…

Ainsi, sur la base de documents transmis par Edward Snowden, l’ex-consultant de la NSA actuellement en fuite en Russie qui a révélé l’existence du programme PRISM, le quotidien Le Monde affirme que le renseignement américain a collecté, en France, 70,3 millions données téléphoniques entre le 10 décembre 2012 et le 8 janvier 2013.

« Pour les personnes ciblées à l’extérieur de nos frontières, nous ne pouvons les viser sans de motifs légalement fondés, tels que la menace terroriste, informatique ou de prolifération nucléaire », avait affirmé James Clapper, le directeur national du renseignement américain (DNI), le 8 juin dernier. Visiblement, au vu du flux d’informations obtenues en France, l’on peut supposer que la surveillance a été étendue à d’autres domaines…

Deux techniques de collecte de données sont utilisées par la NSA. Le premier, codé « DRTBOX », a permis de glaner 62,5 millions d’informations téléphoniques. Grâce au second, appelé « WHITEBOX », ce sont 7,8 millions d’éléments qui ont été moissonnés.

L’utilisation de certains numéros de téléphone active un signal qui permet d’enregistrer automatiquement les conversations. La NSA récupère également les échanges par SMS en fonction de mots clés pré-définis. En outre, selon Le Monde, l’agence américaine concerverait systèmatiquement l’historique des connexions de chaque cible.

En moyenne, donc, sur la période considérée, la NSA a récolté 3 millions de données par jour. Cela étant, deux pointes ont été observés sur les graphiques communiqués par Edward Snowden, à savoir le 24 décembre 2012 et le 7 janvier 2013, jours où 7 millions d’interceptions. Reste à savoir pourquoi…

En outre, toujours d’après les documents fournis par l’ancien consultant, la NSA a surveillé de près, entre le 1er et le 31 janvier 2013, les 4,5 millions d’adresses de messagerie du domaine wanadoo.fr (ancienne filiale d’Orange, ndlr) ainsi que celles liès à alcatel.lucent.com, l’entreprise franco-américaine spécialisées dans les routeurs de réseaux et la pose de câbles sous-marins pour les télécommunications.

Ce programme de surveillance est appelé US-985D. Aucune explication n’a été founie au sujet de ce sigle. Le journal pense qu’il correspondrait au  « cercle qualifié par les Etats-Unis de ‘troisième partie’ auquel appartiennent la France, l’Allemagne mais aussi l’Autriche, la Pologne ou encore la Belgique », le second étant constitué par les pays anglo-saxons historiquement proche de Washington (Royaume-Uni, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, soit les « Five Eyes ».

Quoi qu’il en soit, ces révélations n’ont pas manqué de faire réagir le gouvernement français. Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, les a estimées « choquantes ». Elles « vont appeler des explications précises des autorités américaines dans les heures qui viennent », a-t-il affirmé, ce 21 octobre, à l’antenne d’Europe1. « Si un pays ami, un pays allié, espionne la France ou espionne d’autres pays européens, c’est tout à fait inacceptable », a-t-il ajouté.

Quant à son collègue des Affaires étrangères, Laurent Fabius, il a annoncé la convocation « immédiate » de l’ambassadeur des Etats-Unis au Quai d’Orsay.

Photo : extraite de la série « Person of Interest »

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