Pour le chef d’état-major des forces aériennes indiennes, il n’y a pas d’alternative au Rafale

Pour maintenir ses lignes d’assemblage, Dassault Aviation doit produire un minimum de 11 avions Rafale par an. Jusqu’ici, les commandes françaises ont permis d’atteindre cet objectif. Mais la future Loi de programmation militaire (LPM) prévoit la livraison de seulement 26 appareils sur la période 2014-2019, un contrat à l’exportation est primordial, faute de quoi, le ministère de la Défense aura à revoir ses plans en 2015/2016…

« Si nous parvenons à obtenir un contrat dans des conditions compatibles avec une livraison en 2017-2018, tout ira bien. Dans le cas contraire – et rappelons qu’il est difficile de signer de tels contrats –, l’alternative, pour l’État, est la suivante : soit il arrête le programme, soit il le maintient à hauteur d’un Rafale produit par mois. Dans ce cas, la question du financement devra être abordée en 2015 », a résumé, le mois dernier, Eric Trappier, le Pdg de Dassault Aviation, à l’Assemblée nationale, lors d’une audition devant la commission de la Défense.

Pour le moment, les chances les plus fortes de décrocher un contrat sont au Qatar et surtout en Inde, où, en janvier 2012, le Rafale a été sélectionné aux dépense de l’Eurofighter dans le cadre de l’appel d’offre MMRCA ( Medium Multi-Role Combat Aircraft). Depuis, Dassault Aviation est en discussion exclusive avec New Delhi pour finaliser le contrat de vente de 126 avions, destinés à remplacer les MiG-21 des forces aériennes indiennes.

Seulement, l’on ne négocie pas un contrat de 20 milliards de dollars sur le coin d’une table. Comme il est prévu d’assembler 108 appareils en Inde, il faut se mettre d’accord sur le montage industriel, les cessions de licences, les transferts de technologie, etc.  Du coup, les discussions prennent du temps. Qui plus est, il faudra au moins trois ans pour livrer le premier Rafale aux spécifications indiennes, dont les détails sont confidentiels.

Cette affaire se résume donc à une course contre la montre. Pour la France, l’idéal serait que le contrat soit finalisé d’ici la fin de cette année. Le Pdg de Dassault Aviatio comme Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, sont confiants.

Seulement, le sentiment à New Delhi est que rien ne sera probablement signé d’ici la fin de l’année fiscale 2013, qui se terminera en mars prochain. Et le décès récent du négociateur pour le contrat Rafale n’arrange évidemment pas les choses. Après, il y aura des élections générales, à l’issue desquelles un nouveau gouvernement sera susceptible d’être nommé.

Or, pour le chef d’état-major de l’aviation indienne, l’Air Chief Marshal NAK Browne, il est primordial de pouvoir disposer des premiers avions du contrat MMRCA dès 2017, sous peine de voir les capacités aériennes du pays passablement dégradées alors que la Chine et le Pakistan, deux adversaires potentiels de l’Inde, font des efforts pour moderniser les leurs.

C’est d’ailleurs déjà le cas, si l’on en croit les propos tenus le 4 octobre dernier par l’Air Chief Marshal Browne. « Nous sommes autorisés à disposer de 42 escadrons de chasse, mais, à l’heure actuelle, nous sommes bien en dessous », a-t-il avancé lors d’une conférence de presse.

Le fait est, l’India Air Force (IAF) aligne actuellement 34 escadrons, comptant chacun entre 16 et 18 appareils. Et pour maintenir ce niveau, il est envisagé de prolonger une centaine de MiG-21 et de MiG-27 jusqu’en 2025, alors que, en avril, l’officier indien avait indiqué espérer pouvoir commencer à les remplacer après 2019. Et la modernisation des Mirage 2000H ainsi que la livraison des SU-30MKI commandés auprès de la Russie ne suffiront pas. Quant au chasseur dit de 5e génération, développé en coopération avec Sukhoï, il faudra encore un an pour fixer tous les détails et prévoir une dépense de 11 milliards de dollars.

Aussi, pour le chef d’état-major de l’IAF, il n’y a pas d’autres alternative que de diposer, dès 2017, des premiers Rafale. « Si le MMRCA ne nous est pas livré d’ici la fin du plan quinquennal 12 (ndlr, 2017), le niveau de nos forces descendra rapidement. C’est ce que nous devons éviter. Nous devons maintenir le niveau de nos forces pour fournir des capacités de dissuasion », a-t-il expliqué.

Interrogé sur la possibilité qu’il n’y ait pas d’accord avec Dassault Aviation, l’Air Chief Marshal Browne a été clair. « Nous tenons le ministère de la Défense informé. Il n’y a pas de deuxième option. Il doit travailler. Le gouvernement est pleinement conscient de nos besoins », a-t-il fait valoir, en précisant que « si le contrat devait être signé l’année prochaine, le premier MMRCA serait livré seulement en 2017 ». Et d’insister : « À mon avis, la meilleure chose est de s’en tenir à un seul plan. Nous allons perdre notre chemin si nous continuons à avoir des plans de secours ». Une façon d’inviter New Delhi à faire preuve de plus de célérité…

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