Syrie : Les Etats-Unis et la France entendent maintenir la pression militaire

Aux échecs, le roque est un mouvement combiné d’une tour et d’un roi afin de protéger ce dernier des attaques frontales de l’adversaire. En quelque sorte, c’est un coup similaire qu’a fait la diplomatie russe en proposant à la Syrie de placer son arsenal d’armes chimiques sous contrôle international avant de le détruire pour écarter la menace d’une intervention militaire franco-américaine contre le régime de Bachar el-Assad, tenu pour responsable de l’attaque au gaz neurotoxique lancée dans la banlieue de Damas le 21 août dernier.

Comme dirait Paul Wolfoni dans les Tontons flingueurs, « au fond maintenant, les diplomates prendraient plutôt le pas sur les hommes d’action. L’époque serait aux tables rondes et à la détente. » Enfin, presque…

Pour le président Obama, l’initiative lancée par Moscou « peut permettre de mettre un terme à la menace des armes chimiques sans recourir à la force, en particulier parce que la Russie est l’un des plus puissants alliées d’Assad. »

Cependant, a-t-il aussi indique, le 10 septembre, il n’est pas question d’écarter l’option militaire et les forces américaines, essentiellement navales, déployées dans la région restent sur leurs positions « afin d’être prête à réagir si la diplomatie échoue. »

Mais pour le moment, l’imminence d’une opération militaire n’est plus d’actualité. D’ailleurs, le Congrès américain, qui devait ou non l’autoriser, se prononcera à une « date ultérieure ». En attendant, la commission des Affaires étrangères du Sénat planche sur un nouveau projet de résolution prenant en compte la nouvelle donne.

Ainsi, le feu vert à une intervention ne serait plus donné qu’en cas d’échec au plan russe et il prévoirait « une date limite spécifique pour que le Conseil de sécurité de l’ONU vote une résolution, et une date limite séparée pour que les inspecteurs vérifient que les Syriens ont bien transféré leurs armes chimiques ».

Côté français, l’on a réagi à la proposition russe en voulant porter au Conseil de sécurité des Nations unies un projet de résolution sous chapitre VII, lequel autorise le recours à la force en cas de manquement aux obligations. En outre, il était question de faire reconnaître la responsabilité du régime syrien dans l’attaque du 21 août et de traduire les coupables devant la Cour pénale internationale.

Ce que la Russie a bien évidemment jugé inacceptable, comme l’on pouvait s’y attendre. Cependant, il faudra bien que Moscou avance une solution pour s’assurer que le régime syrien se conformera aux obligations qu’il a acceptées… Faute de quoi, le roque n’aura servi à rien, si ce n’est à retarder l’échéance

A l’issue d’un Conseil de défense restreint, qui s’est tenu ce 11 septembre, le président Hollande a fait savoir que Paris « restera mobilisé pour sanctionner l’usage d’armes chimiques par le régime syrien » et souhaite « toutes les voies au Conseil de sécurité » pour un « contrôle effectif et vérifiable » des armes chimiques.

Par ailleurs, la position française est similaire à celle affichée par Washington. Le porte-parole du gouvernement, Mme Najat Vallaud-Belkacem, a ainsi affirmé, sur les ondes de RFI, que « la France reste déterminée à sanctionner l’usage des armes chimiques par Bachar el-Assad ». Et d’ajouter : « L’option militaire est bel et bien envisagée » si la diplomatie échoue. Et « il ne s’agit en rien d’une menace hypothétique », a-t-elle encore fait valoir.

Reste que la destruction de l’arsenal chimique sera un processus à la fois long et compliqué. D’où, d’ailleurs, l’habilité de la proposition russe… Cette opération devrait être réalisée par les inspecteurs internationaux de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).

L’un des problèmes sera d’assurer leur protection, alors que la Syrie est en pleine guerre civile. Ensuite, il faudra procéder à l’élimination de ces armes, ce qui demande des usines spécialement dédiées à cette tâche. Et évidemment, il n’y en pas sur le territoire syrien…

Pour donner une idée de l’ampleur du travail à effectuer, les Etats-Unis ont commencé à détruire leur arsenal chimique au cours des années 1990. Jusqu’à présent, ils ont dépensé, selon le quotidien Le Monde, 35 milliards de dollars. Et ils n’auront pas terminé avant 2021. Quant aux Russes, ils savent aussi ce qu’il en coûte car ils sont engagés dans le même processus, mais l’aide internationale.

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