Et si le Congrès américain s’opposait à une intervention militaire en Syrie?

Comme l’a laissé entendre le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, ce 5 septembre, sur les ondes de RMC, l’intervention franco-américaine contre le régime syrien aurait dû être lancée dans la nuit du 31 août au 1er septembre. Seulement, le président Obama, dont le feu vert était attendu, a préféré sollicité le Congrès avant d’entreprendre une telle action. Et cette décision a pris les responsables français par surprise.

Mais maintenant que cette procédure a été choisie, l’administration Obama doit désormais convaincre les parlementaires américains du bien-fondé d’une telle opération militaire, laquelle vise à « punir » le régime de Bachar el-Assad pour avoir fait usage d’armes chimiques. Et le secrétaire d’Etat, John Kerry, s’active en ce sens.

Ainsi, devant la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, le chef de la diplomatie américaine a défendu l’idée d’une action militaire en précisant que Washington cherche à construire une coalition « avec d’autres pays, dont ceux de la Ligue arabe ».

Et d’ajouter : « Des pays ont exprimé leur volonté d’agir », en citant l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, le Qatar, la Turquie et la France. Quant aux coûts financiers de cette opération, qui n’impliquera pas de « troupes au sol », John Kerry a fait savoir que des « pays arabes avaient offert de les prendre à leur charge. »

Dans le même temps, une résolution autorisant le président Obama à lancer une action militaire limitée d’une durée de 60 jours, avec une possibilité de la prolonger de 30 jours supplémentaires, a été adoptée à une courte majorité (10 voix contre 7) par la commission des Affaires étrangères du Sénat, au terme d’un long débat.

Comme l’on pouvait s’y attendre, la Maison Blanche a salué ce vote, estimant que la « l’intervention autorisée par la résolution permettra(it) de défendre les intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis, en affaiblissant les capacités d’Assad à utiliser des armes chimiques et en dissuadant l’usage futur de ces armes, alors que nous poursuivons une stratégie plus globale pour renforcer l’opposition de façon à accélérer une transition politique en Syrie.

Cela étant, cette question d’une opération militaire en Syrie divise les partis américains. Ainsi, au sein des rangs républicains, le sénateur John McCain, ancien candidat à la Maison Blanche, y est clairement favorable. Et, entre deux parties de poker en ligne, il a obtenu que la version de la motion adopté précise que la « politique officielle des Etats-Unis vise à changer la dynamique sur le champ de bataille en Syrie. »

Une position qui est loin d’être partagée par son collègue Rand Paul (le fils de Ron Paul), républicain comme lui, quoique proche de la mouvance du Tea Party. « J’estime franchement que bombarder la Syrie augmente la probabilité de nouvelles attaques au gaz, cela pourrait augmenter les attaques contre Israël et la Turquie, les morts de civils, l’instabilité au Moyen-Orient et pousser la Russie et l’Iran à s’impliquer encore plus dans cette guerre civile », a-t-il en effet estimé.

Quant à la Chambre des représentants, où le Parti républicain est majoritaire, les jeux sont loin d’être faits. Si les responsables du Grand Old Party (GOP) sont favorables à une intervention en Syrie, ce n’est pas le cas des élus de base. Selon un décompte effectué par le Washington Post, 140 représentants sur 433 ont déjà fait connaître leur opposition – ou seraient sur le point de le faire – à une action militaire. Seulement 17 s’y sont dits favorables.

Quoi qu’il en soit, les responsables de l’administration Obama devront mouiller leur chemise pour obtenir cet accord du Congrès. Faute de quoi, la parole du président américain sera décrédibilisée, lui qui avait fixé une ligne rouge à Bachar el-Assad. Ligne rouge que ce dernier aurait, selon toute vraisemblance, franchie. Et un refus ne manquera pas d’avoir des répercussions en France, où le président Hollande se dit « déterminé » à « punir » le régime syrien. Mais sans les Etats-Unis, ce sera extrêmement compliqué.

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