Syrie : Le dispositif militaire en vue d’une intervention se met en place

La mission des Nations unies chargée d’enquêter sur l’emploi présumé d’armes chimiques dans la région de la Goutha, près de Damas, le 21 août dernier, a été contrainte de reporter ses travaux d’au moins une journée étant donné que la sécurité de ses inspecteurs, déjà visés par des tirs d’origine inconnue lundi, ne peut pas être totalement garantie.

Pour autant, et sans attendre les conclusions de cette mission, une intervention militaire contre le régime syrien se dessine peu à peu et cela même si le Conseil de sécurité des Nations unies ne devrait pas adopter de résolution allant en ce sens dans la mesure où la Russie, alliée de Damas s’y oppose.

Ainsi, selon la presse américaine, une action militaire, si elle est décidée, devrait être brève – pas plus de deux jours – et limitée afin d’éviter, comme le rapporte le Washington Post, qui a eu la primeur de quelques indiscrétions de responsables de l’administration Obama, d’éviter une « implication plus grande dans la guerre civile » syrienne.

Comme le régime de Bachar el-Assad est accusé d’avoir franchi la « ligne rouge » fixée l’an passé par le président Obama, ce dernier se retrouve piégé et doit donc réagir d’une manière ou d’une autre afin de ne pas perdre la face. Mais comme une intervention militaire en Syrie suscite des réticences, y compris au sommet du Pentagone, c’est donc à une opération a minima que songe la Maison Blanche.

D’après le New York Times, l’intervention envisagée ne chercherait donc pas à faire tomber le régime de Bachar el-Assad, ni à renverser le cours du congflit. Elle se limiterait probablement à des frappes sur des cibles militaires syriennes, en particulier les unités d’artillerie capables d’utiliser des gaz neuro-toxiques. Bien évidemment, compte tenu des risques de dispersions, il est impensable de viser les stocks d’armes chimiques syriens. A moins d’y envoyer des troupes spécialement entraînées pour aller les récupérer…

En tout cas, le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, a affirmé, ce 27 août, que le Pentagone a « positionné des éléments capables de répondre à toute option choisie par le président ». « Nous sommes prêts à y aller », a-t-il insisté, en indiquant que les Etats-Unis allaient bientôt présenter des preuves de l’emploi par le régime syrien d’armes chimiques.

Ces derniers jours, la marine américaine a renforcé sa présence en Méditerranée en portant à 4 le nombre de ses destroyers de classe Arleigh Burke déployés dans cette région. Le porte-avions USS Harry Truman n’est pas trop loin non plus de la Syrie (il vient de traverser le Canal de Suez), ce qui suppose aussi la présence d’au moins un sous-marin nucléaire d’attaque. Deux batteries antimissiles Patriot ont été installées, en janvier, et dans le cadre d’une mission de l’Otan, en Turquie, le long de la frontière syrienne. A cela s’ajoute des avions F-16, laissés en Jordanie après l’exercice Eager Lion de mai dernier.

Sur ce point, un responsable jordanien a cependant indiqué que son pays ne voulait pas être « la rampe de lancement pour une quelconque opération militaire contre Damas. » Info ou intox? A voir… Cela étant, selon le quotidien grec Kathimerini, Washington a demandé à Athènes d’utiliser les bases aériennes de Kalamata et de Souma.

A Chypre, le quotidien The Guardian a rapporté une activité aérienne inhabituelle sur la base britannique d’Akrotiri, située à moins de 160 km des côtes syriennes. Des appareils de transport C-130 Hercules et des avions de combat ont ainsi été aperçus par des pilotes commerciaux.

D’après The Daily Telegraph, ce site, qui a déjà servi à la Royal Air Force lors de l’opération Unified Protector en Libye et qui abrite des stations d’écoute, pourrait être utlisée par les forces américaines et britanniques.

Toujours en Royaume-Uni, un porte-parole du Premier ministre David Cameron a confirmé que des plans sont en préparation en vue d’une éventuelle action militaire en Syrie. Mais aucune décision de la lancer n’a encore été prise, a-t-il précisé. Quoi qu’il en soit, le dossier syrien fera l’objet d’un vote, le 29 août, au le Parlement britannique, à l’occasion d’une convocation anticipée. Il se dit qu’un SNA de la Royal Navy serait déjà dans la région et que des navires qui avaient appareillés pour prendre part des exercices en Méditerranée, pourraient être mobilisés.

Quant à la France, aucune information concernant d’éventuels préparatifs n’a été officiellement confirmée. Mais si opération il y a, et même si il n’est pas impossible que des appareils de l’armée de l’Air soient envoyés à Chypre, elle devrait concerner essentiellement la Marine nationale. Et, bien évidemment, l’on ne peut penser qu’à un déploiement du porte-avions nucléaire (PAN) Charles de Gaulle, de nouveau opérationnel après avoir été immobilisé pendant 6 mois pour cause d’indisponibilité pour entretien intermédiaire.

« Nous avons le dispositif classique en Méditerranée avec la présence de bâtiments militaires. Pour le moment, il n’y a pas de changement dans la posture. Notre mission consiste à recueillir des informations et à anticiper pour nous tenir prêts et être disponibles avec des bâtiments de surface, des sous-marins et des avions », a récemment expliqué le capitaine de vaisseau Philippe Ebanga, commandant du Sirpa Marine, d’après l’agence Reuters.

Mais, selon Challenges, qui cite une source du ministère de la Défense, le PAN Charles de Gaulles devrait « rejoindre de façon imminente le théâtre est-méditerranéen, quelque part entre Chypre et les cotes syriennes. (…) La décision a été prise, même si elle n’est pas encore officielle. » Ce que l’Etat-major des armées, à Paris, a démenti. « Il est toujours à quai et n’a reçu aucun d’ordre », a précisé le colonel Gilles Jarron, son nouveau porte-parole.

En attendant, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, s’est entretenu par téléphone avec son homologue américain pour évoquer « longuement » le cas syrien. Il en a fait de même avec le prince héritier des émirats, cheikh Mohamed Ben Zayed Al-Nahyane, vice-commandant des forces armées.

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