L’immunité des Nations unies confirmée pour l’affaire du massacre de Srebrenica
Commis le 11 juillet 1995, le massacre de Srebrenica, en Bosnie-Herzégovine, reste la pire tuerie jamais commise en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, avec plus de 8.000 musulmans bosniens victimes des forces serbes de Bosnie alors commandée par le général Ratko Mladic.
Au moment des faits, le secteur de Srebrenica était sous la surveillance de casques bleus néerlandais de la FORPRONU, alors sous les ordres du général français Bernard Janvier. Seulement, ces derniers ne purent rien faire pour éviter le massacre.
Dans cette affaire, les responsables français et néerlandais se renvoient la responsabilité du massacre, les seconds reprochant que la demande d’appui aérien fut restée sans suite tandis que les premiers mettent en avant « l’erreur tactique » des casques bleus bataves, qui se laissèrent désarmer par les forces du général Ratko Mladic. Cependant, les deux parties sont d’accord pour mettre en cause les Nations unies, et en particulier la lourdeur de ses procédures.
« L’ensemble de la communauté internationale n’a pas regardé la réalité et n’était par conséquent pas suffisamment préparée aux crimes de guerre commis par les Serbes de Bosnie », avait ainsi déploré un rapport parlementaire néerlandais. « Si des erreurs ont été commises, c’est moi qui doit les assumer. Le général Janvier n’a fait qu’appliquer les règles de l’ONU. Faire la guerre avec des casques bleus à qui l’on demande de ne pas tirer, moi, je ne sais pas faire », avait expliqué François Léotard, qui était alors le ministre de la Défense à l’époque.
D’où la volonté des Mères de Srebrenica de faire reconnaitre la responsabilité des Nations unies dans ce massacre. D’abord en s’adressant à la justice néerlandaise. Mais, en avril 2012, la Cour suprême des Pays-Bas a estimé que de telles poursuites ne pouvaient pas être possible, étant donné que les Nations unies bénéficiaient d’une immunité totale.
Suite à cet avis, les Mères de Srebrenica ont alors déposé une requête auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour contester cet avis rendu par la justice néerlandaise. En vain puisque les juges européens les ont déboutées à nouveau.
« L’octroi de l’immunité à l’ONU poursuit un but légitime et n’est pas disproportionné », ont-ils estimé, le 27 juin. « Faire relever de la compétence des juridictions nationales les opérations militaires menées dans le cadre de l’ONU reviendrait à permettre aux États d’intervenir dans l’accomplissement de la mission essentielle de maintien de la paix et de la sécurité internationales dont est investie l’ONU », ont-ils expliqué.
Qui plus est, toujours selon la Cour de Strasbourg, « une action civile ne l’emporte pas sur l’immunité au seul motif qu’elle repose sur une allégation faisant état d’une violation particulièrement grave du droit international, fût-ce un génocide » et « l’absence d’un autre recours n’imposait pas pour autant aux tribunaux néerlandais de se sentir obligés d’intervenir pour déterminer la responsabilité de l’ONU. »
Cependant, le volet judidicaire de cette affaire n’est pas terminé étant donné que plusieurs plaintes visant d’anciens casques bleus néerlandais ayant servi à Srebrenica sont en cours d’examen au Pays-Bas. Les décisions qui ont jusqu’à présent été rendues sont mitigées.
Ainsi, le tribunal d’appel de La Haye a reconnu la responsabilité de l’Etat néerlandais dans la mort de 3 musulmans mais ce jugement a été porté devant la Cour de cassation. En mars dernier, le parquet a annoncé sa décision de ne pas poursuivre trois haut responsables militaires ayant été en poste au moment de l’affaire de Srebrenica après une plainte déposée par des familles de victimes.
Par ailleurs, les Nations unies sont également mis en cause par 5 organisations de défense des droits de l’homme de Bosnie-Herzégovine, de Serbie, du Kosovo et de Croatie. Ces dernières ont effet demandé au secrétaire général, Ban Ki-moon, d’ouvrir une enquête portant sur « l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité » des juges du Tribunal pénal internationale pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).
La raison de cette requête s’explique par de récentes décisions prises par le TPIY, jugées surprenantes par ces organisations. Sont notamment visés les acquittements du général croate Ante Golovina, de l’ex-chef d’état-major serbe Momcilo Perisic, et, plus récemment, de Jovica Stanisic, l’ancien chef des services de renseignement de Belgrade.