Les pays du golfe de Guinée veulent une stratégie régionale pour combattre la piraterie maritime
Jusqu’à une époque récente, les côtes somaliennes, et plus généralement, celles de la Corne de l’Afrique, étaient considérées comme étant les plus dangereuses en terme de piraterie maritime. Mais ce phénomène tend à prendre de plus en plus d’ampleur dans le golfe de Guinée, si l’on en croit les statistiques du Bureau Maritime International (BMI).
D’ailleurs, en 2012, les attaques de marins dans cette région ont été plus nombreuses qu’au large des côtes somaliennes (966 contre 851). La raison est que le golfe de Guinée est le point de passage du pétrole nigérian et des productions des différents Etats d’Afrique centrale et de l’Ouest, comme par exemple le cacao.
Les pirates actifs dans cette zone ne recherchent pas forcément à obtenir des rançons en échange de la libération des marins qu’ils prennent en otage mais plutôt à revendre au marché noir les cargaisons des navires dont ils se sont emparés. Cependant, le BMI a constaté que la plupart de leurs attaques impliquent « un niveau élevé de violence ».
Aussi, les dirigeants 12 pays d’Afrique centrale et de l’Ouest se sont réunis, ce 25 juin, à Yaoundé (Cameroun) afin d’évoquer ce problème. « Les efforts des pays du Golfe de Guinée pour éradiquer la piraterie s’avèrent insuffisants », a constaté Paul Biya, le président camerounais Paul Biya. « Une approche collective du problème est donc impérieuse pour éviter que le mal, une fois combattu au niveau d’un pays ou d’une des zones du Golfe de Guinée, ne se régénère ailleurs », a-t-il estimé.
Pour le moment, les pays concernés s’attaquent à la piraterie maritime de manière isolée, voire, dans le meilleur des cas, dans le cadre d’une coopération bilatérale. C’est ainsi que le Cameroun a lancé l’opération Delta, dans la péninsule de Bakassi, avec le Bataillon d’intervention rapide (BIR), une unité d’élite appelée à appuyer celles de la marine locale. Et il est question d’une acquisition prochaine d’avions de surveillance maritime.
Quant au Nigeria, pays le plus affecté par la piraterie, avec 45% des cas recensés l’an passé, il a lancé, en 2011, l’opération « Prospérité » avec le Bénin. Il s’agit essentiellement de mener des patrouilles maritimes conjointes au large des côtes béninoises.
« Beaucoup de pays côtiers ont acquis des équipements navals conséquents mais n’investissent pas assez dans le soutien logistique pour une véritable présence en mer », a estimé la critique en revanche la Communauté des Etats de l’Afrique du centre (Céeac).
Du coup, l’idée de la mette en place une stratégie régionale entre les pays concernés a fait son chemin. Et c’est ce qui a été convenu lors du sommet de Yaoundé. L’idée est de mutualiser les moyens dans le domaine naval et d’améliorer le partage du renseignement. Et il est aussi question d’harmoniser les règles de poursuite au-delà des limites maritimes de chaque pays, ce qui suppose une convergence des textes législatifs.
La Céeac, la Communauté économique d’Afrique de l’Ouest (Cédeao) et la Commission du Golfe de Guinée (CGG) pourraient également créer un mécanisme de financement pour lutter contre la piraterie.
Pour autant, les pays du golfe de Guinée attendent un soutien de la communauté internationale. Ainsi, le président ivoirien, Alassane Ouattara, l’a invité « à faire preuve de la même fermeté (…) que celle affichée dans le golfe d’Aden.
Pour le moment, aucun déploiement important de forces navales, comme l’on a pu le voir pour l’océan Indien, avec notamment les opérations Atalante (UE) et Ocean Shield (Otan), n’est prévu dans cette zone pour tenter de réduire ce phénomène.
Cependant, dans le cadre de la mission Corymbe, lancée en 1990, la Marine nationale maintient, dans le golfe de Guinée, la présence permanente d’au moins un de ses navires (actuellement, la FASM Latouche-Tréville). A cela s’ajoute le 6e Bataillon d’Infanterie de Marine (BIMa) installé à Libreville (Gabon), voire la Force Licorne, en Côte d’Ivoire.
En janvier dernier, l’Union européenne a mis sur pied le programme Crimgo (routes maritimes critiques du Golfe de Guinée), destiné à renforcer la formation des gardes-côtes locaux et à installer un réseau d’échange d’informations sur la piraterie. Enfin, les Etats-Unis ne sont pas en reste étant donné qu’ils financent, tous les ans, l’exercice naval Obangame Express, afin d’améliorer les techniques des forces navales dans la région.