Les effectifs de l’armée de Terre sont arrivés à un « seuil plancher »

Le général Bertrand Ract-Madoux, le chef d’état-major de l’armée de Terre (CEMAT), attend non sans inquiétude la prochaine Loi de Programmation Militaire (LPM) qui traduira en termes financiers les orientations stratégiques définies par le dernier Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (LBDSN).

S’il peut se réjouir de la confirmation du programme Scorpion (Synergie du contact renforcée par la polyvalence et l’infovalorisation), structurant pour l’armée de Terre, avec  le remplacement de matériels pour certains très anciens, le général Ract-Madoux est nettement plus réservé sur les 24.000 nouvelles suppressions de postes prévus, lesquelles viennent s’ajouter aux 10.000 qui restent encore à effectuer.

Le LBDSN prévoit de réduire le contrat opérationnel concernant les opérations de coercition majeure (de 30.000 à 15.000 hommes). Le général Ract-Madoux a ainsi expliqué, lors d’une audition devant la commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat, que ce passage « justifie le resserrement de la force terrestre projetable qui devrait passer de 71 000 hommes aujourd’hui à environ 66 000 hommes demain. »

Or, le CEMAT a estimé que ce contrat opérationnel présente « plusieurs risques, relatifs au niveau de ressources budgétaires, qui, s’il demeure au seuil de ‘stricte suffisance’ qui le caractérise ces dernières années, est susceptible de mettre à mal, d’emblée, les ambitions stratégiques de la France. »

Le général Ract-Madoux a ainsi fait valoir que « par la force des évènements, l’armée de Terre, depuis une dizaine d’années, remplit un contrat opérationnel qui est très proche de celui qui lui est confié dans le nouveau Livre blanc », mais, et c’est là toute la nuance, avec « un volume de forces supérieur ».

D’où la conclusion que tire le CEMAT : « Il est donc crucial de réaliser que, dans ces conditions, notre capacité à remonter en puissance entre deux interventions et à conduire simultanément plusieurs opérations ne seront pas les mêmes qu’aujourd’hui. En conséquence, avec l’équivalent d’une brigade interarmes en moins, tout en conservant l’intégralité du spectre des capacités, le modèle à 66 000 hommes conditionne, à un seuil de stricte suffisance, la faisabilité de ce nouveau contrat. »

Aussi, pour le général Ract-Madoux, les effectifs de l’armée de Terre, laquelle pourrait être contrainte de supprimer plus de 10.000 postes, sont arrivés à « un seuil plancher pour un pays de plus de 65 millions d’habitants. »

Cela étant, l’armée de Terre devrait perdre des unités. Encore que, les arbitrages ne sont pas encore rendus à ce sujet. L’on sait que le président Hollande voudrait qu’il y ait le moins possible de fermetures de casernes et de bases. Mais pour le CEMAT, il ne sera pas évident de faire autrement.

« La préservation de la cohérence de notre modèle d’armée impose de préférer des dissolutions de formations au ‘saupoudrage’ de réductions de postes qui déstructurerait en profondeur l’outil terrestre et ne générerait finalement pas les gains escomptés, ni en effectifs, ni en budget », a-t-il expliqué, en soulignant que « la conséquence territoriale se traduira bien sûr par un accroissement inévitable des déserts militaires. »

Cependant, le général Ract-Madoux entend réduire le « moins possible le nombre d’unités » dans la mesure où il dit craindre que « la recréation de régiments dans le futur ne relève de l’utopie. » Difficile équation à résoudre…

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