Pékin provoque Tokyo au sujet d’Okinawa

Il ne faut pas s’y tromper. Quand deux universitaires en vue, Zhang Haipeng et Li Guoqiang, chercheurs à l’Académie chinoise des sciences sociales (CASS), estiment que « le temps est venu de reconsidérer des problèmes non résolus concernant les îles Ryukyu » dans les colonnes du Quotidien du Peuple, organe officiel du Parti communiste chinois (PCC), c’est une pierre lancée par Pékin dans le jardin de Tokyo.

Bordé, à l’ouest, par la mer de Chine méridoniale et, à l’est par la mer des Philippines, cet archipel a Okinawa pour île principale. Situées entre Kyushu (sud du Japon) et Taïwan, les îles Ryukyu ont longtemps formé un royaume indépendant avant de subir les influences japonaises et chinoises.

En 1879, il fut annexé par Tokyo et devint la préfecture d’Okinawa. Après la Seconde Guerre Mondiale, l’archipel fut administré par les Etats-Unis, qui ne le rendirent au Japon qu’en 1972. Il accueille désormais l’essentiel des troupes américaines déployés sur le territoire nippon.

Les deux universitaires chinois basent leur argumentation sur la dénonciation du traité de Shimonoseki, qui, signé le 17 avril 1895, mettait un terme à la guerre sino-japonaise de 1894-95, alors perdue par la dynastie mandchoue des Qing. Ce texte, qu’ils considèrent « inégal », attribuait au Japon des territoires qui étaient jusque là sous domination chinoise.

Priée de dire si Pékin considère ou non qu’Okinawa fait effectivement partie du Japon, la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hua Chunying, a simplement répondu que les deux universitaires « ont longtemps étudié l’histoire des îles Ryukyu et d’Okinawa. »

Mais la contestation de la souveraineté japonaise sur cet archipel n’est pas nouvelle. En septembre dernier, l’Institut chinois d’études politiques a en effet estimé que « l’occupation des îles Ryukyu par le Japon ne repose sur aucune base juridique » et que, par conséquent, « elle est complétement illégale. » Et d’ajouter : « Tokyo doit respecter inconditionnellement les termes des déclarations du Caire, les accords de Potsdam et d’autres lois internationales, et mettre immédiatement fin à l’occupation armée et au gouvernement colonial aux Ryukyu. »

Quelques mois plus tôt, un texte de Luo Yuan, vice-président permanent de l’Association chinoise pour la Promotion de la Culture et des Stratégies, et publié par le Quotidien du Peuple, avait exactement la même teneur.

Quoi qu’il en soit, l’on goûte peu ce genre de provocation à Tokyo. Et le secrétaire général du gouvernement nippon a répondu que les arguments des deux chercheurs chinois n’étaient pas « pertinents » et que la souveraineté japonaise sur les îles Ryukyu était reconnue « à la fois historiquement et par la communauté internationale ».

Cette nouvelle remise en cause de l’intégrité territoriale japonaise intervient alors que les tensions entre Pékin et Tokyo restent vives au sujet de l’archipel Senkaku/ Diaoyu, qui fait l’objet d’un bras de fer entre les deux capitales depuis plusieurs mois.

Signe de ces tensions, l’activité des forces aériennes d’autodéfense japonaises. Au cours de l’année 2012, ses avions de combat ont décollé en urgence à 306 reprises pour intercepter des appareils chinois s’approchant d’un peu trop près de l’espace aérien nippon. Et le nombre de ses interventions ne cesse d’augmenter au fil des mois.

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