Etats-Unis : La médaille destinée aux pilotes de drone méritants ne verra pas le jour
En février dernier, Leon Panetta, qui vivait alors ses derniers jours à la tête du Pentagone, avait proposé la création de la Distinguished Warfare Medal, c’est à dire une médaille destinée à reconnaître les mérites des pilotes (ou opérateurs?) de drones ainsi que ceux des spécialistes de la cyberguerre, pourvu que leurs actions aient eu des conséquences déterminantes sur les opérations de combat.
Pour l’ancien secrétaire américain à la Défense, il est indéniable que les drones ont changé la façon de faire la guerre depuis le début des années 2000. Et même si leurs pilotes ne prennent pas de risques physiques et ne sont pas envoyés sur les théâtres d’opérations, ils ont une charge de travail d’autant plus élevée que le recours à leurs services ont augmenté depuis l’arrivée de Barack Obama à la Maison Blanche et peuvent être victimes de syndromes de stress post-traumatique (PTSD).
Quant aux informaticiens, leur rôle peut également s’avérer déterminant en cas de cyberattaques, dont les dégâts qu’elles sont susceptibles de provoquer sont sans cesse mis en avant pour justifier la hausse des budgets afin d’améliorer les capacités tant défensives qu’offensives en la matière.
D’où le projet de créer cette Distinguished Warfare Medal. Seulement, cette idée s’est heurtée à une forte opposition, notamment celle des vétérans. En effet, il était question que cette médaille ait un rang supérieur à la Bronze Star et la Purple Heart, lesquelles ne peuvent être décernées qu’à des soldats ayant affronté le feu ennemi.
« Ces gars sont acharnés au travail, dévoués et bons dans ce qu’ils font, mais c’est complètement différent avec les difficultés de servir au combat et d’être sur le champ de bataille », avait fait valoir, au sujet des pilotes de drones, John Bircher, le porte-parole de Military Order of the Purple Heart.
Du coup, le Pentagone s’est heurté à un problème moral, sur fond de contestation, à Washington, de l’usage des drones pour réaliser des frappes ciblées contre des militants de groupes terroristes.
Finalement, devant la levée de boucliers, Chuck Hagel, le successeur de Leon Panetta, a décidé de suivre les recommandations du général Martin Dempsey, le chef d’état-major interarmées, en abandonnant le projet de créer cette médaille controversée pour mettre en place un nouveau dispositif basé sur les médailles existantes afin « de reconnaître les actions extraordinaires de ce petit nombre d’hommes et de femmes ». En clair, les critères « d’éligibilité » pour certaines décorations, hormis celles qui ne peuvent qu’être gagnée sous le feu ennemi, seront revus pour permettre leur attribution aux pilotes de drones et aux experts en informatique.
Mais ce qui est intéressant de noter dans cette affaire est la perception que le public peut avoir de l’usage des drones. Outre-Atlantique, la Distinguished Wafare Medal a été qualifiée de « médaille X-Box », du nom de la console de jeu vidéo. Or, piloter un avion à distance et effectuer une frappe contre un chef terroriste est, quoi qu’on en dise, une mission de guerre qui n’a rien à voir avec le fait de tirer virtuellement sur un adversaire dans Call of Duty… Après, que cette distinction ait pu avoir, si elle avait été effectivement créée, un rang supérieur à celles obtenues en prenant des risques contre un ennemi est un autre débat.