Suisse : Le choix du Gripen fortement critiqué mais pas remis en cause par une commission parlementaire

La meilleure façon de savoir où l’on va est encore d’y aller. Voilà ce que l’on peut se dire après la publication du rapport de la sous-commission parlementaire suisse chargée d’examiner la question de l’achat de 22 avions Gripen, conçus par le constructeur suédois Saab.

Pour mémoire, afin de remplacer les F-5 Tiger de ses forces aériennes, Berne avait lancé un appel d’offres auquel participèrent, outre le Gripen, le Rafale de Dassault Aviation et l’Eurofighter. La sélection de l’avion suédois, fin 2011, avait suscité une polémique, étant donné qu’il s’agissait de l’appareil le moins performant des trois en compétition.

Pour autant, a estimé la sous-commission présidée par Thomas Hurter, a jugé « correcte » le processus d’évaluation qui a permis de choisir le Gripen, il n’en reste pas moins qu’elle a formulé quelques critiques, comme par exemple au sujet de la communication tout au long de la procédure.

Ainsi, les constructeurs « ont eu l’impression que l’avion doté des meilleures qualités techniques serait sélectionné; ils n’étaient pas informés que le prix jouerait un rôle si important dans le choix final, même si ce critère avait été souligné de manière récurrente au cours » est-il écrit dans le rapport qui estime « qu’une stratégie de communication plus active aurait permis d’éviter bien des malentendus. »

En outre, la sous-commission a relevé que la possibilité d’acheter moins de 22 avions n’a jamais été étudiée et les barêmes utilisés pour les évaluations n’étaient pas les mêmes pour les Forces aériennes suisses et Armasuisse. Qui plus est, le document rapporte que « Les constructeurs dont l’offre n’a pas été retenue ont critiqué le fait que les innovations techniques apportées à leurs appareils après 2009 n’aient pas été prises en compte, alors que Saab avait fourni une troisième offre qui prévoyait des développements de ce genre. »

Cela étant, le rapport souligne que « Le choix de l’appareil opéré par le Conseil fédéral est celui qui comporte le plus de risques – de nature technique, commerciale, politique, financière ou en lien avec le respect du calendrier. »

Le problème est que la version E/F retenue du Gripen – ce qui n’était pas le cas au départ, la sous-commission en a été informée qu’au printemps 2012 – est en cours de développement. Pas moins de 98 modifications doivent être apportées. D’où des craintes sur les délais de livraison et les surcoûts éventuels.

« Alors que les premiers appareils seront livrés en 2018, il faudra, selon les déclarations de représentants des Forces aériennes, certainement attendre 2023 ou 2026 pour que toutes les caractéristiques du Gripen E/F soient opérationnelles » avance le rapport.

Quant aux coûts, la sous-commission « se demande ce qu’il adviendrait si la configuration des appareils livrés ne correspond pas à celle convenue, si des difficultés techniques apparaissent (…) ou si Saab déclare ne pas être en mesure de procéder aux développements ultérieurs au prix convenu ». Et cela d’autant plus que l’évaluation du Gripen E/F est « juste satisfaisante ».

Par ailleurs, cette question des coûts a également une dimension politique. Pour que tout se passe comme prévu, il faut, au minimum, que les forces aériennes suédoises se dotent d’au moins 60 Gripen E/F. Or, pour le moment, Stokholm n’a pas pris de décision et la sous-commission se demande « si c’est la Suisse qui attend un signal de la Suède pour procéder à l’acquisition ou le contraire. »

Ainsi donc, si la sous-commission n’a pas remis en cause la sélection du Gripen, elle laisse au Parlement le soin de trancher quand ce dernier aura reçu les réponses concernant ces risques de la part du Conseil fédéral.

« Ses chances (ndlr, du Gripen) sont modestes mais pas inexistantes. Il s’agit dorénavant pour le Conseil fédéral et le DDPS d’apporter des réponses aux questions posées par le rapport. Mais cela restera difficile, car il y a des risques politiques, économiques et aussi techniques sur le développement de l’appareil » a expliqué le conseiller national Yvan Perrin (UDC) au quotidien Le Matin.

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