Le patron d’EADS enterre le drone Talarion

Lancé à la demande de la France, de l’Allemagne et de l’Espagne, qui en financèrent les études préliminaires, le programme de drone MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) Talarion, porté par EADS depuis 2007, ne verra finalement pas le jour.

« Talarion est mort. Le programme est fini » a ainsi lancé Tom Enders, le président exécutif d’EADS, le 27 juillet dernier, en marge de la présention des résultats semestriels du groupe européen.

« Nous avons investi sur fonds propres pour ce projet. Pour aller plus loin, nous avions besoin d’un engagement sérieux des États, nous ne l’avons pas eu. Donc le programme est mort » a-t-il ajouté.

Initialement, il était prévu de livrer 45 appareils (18 pour la France, 18 pour l’Allemagne et 9 pour l’Espagne), soit 15 système (station au sol et 3 drones) pour un montant de 2,9 milliards d’euros. Mais aucun pays n’a, à ce jour, passé la moindre commande.

En novembre 2010, la France et le Royaume-Uni ont envisagé une coopération dans le domaine des drones MALE, avec BAE Systems et Dassault Aviation. Les deux industriels travaillent, depuis, sur le programme Telemos, auquel aurait pu se joindre EADS en qualité de sous-traitant.

Mais, le groupe européen, alors présidé par Louis Gallois, avait fait savoir en septembre 2011, qu’il n’était pas question de se joindre à BAE Systems et à Dassault Aviation, au grand soulagement, d’ailleurs, de ce dernier. « Avec le Talarion, qui est en avance de cinq ans par rapport aux autres concurrents européens, nous sommes prêts pour la compétition » avait avancé, à l’époque, un porte-parole d’EADS.

Qui plus est, le Telemos devant être prêt à l’horizon 2020, Paris a décidé, en juillet 2011, d’acquérir des drone Heron TP (ou Voltigeur), « francisé » par Dassault Aviation, afin de remplacer les Harfang actuellement en service au sein de l’armée de l’Air. Et cela, sans attendre que le Talarion soit prêt.

Depuis, l’on attend que le programme du Telemos soit effectivement lancé – il aurait dû l’être en juillet de cette année – et que le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, confirme ou non le choix de son prédecesseur en faveur du Heron TP.

L’on craignait que les Européens fassent la même erreur en développant deux drones MALE concurrents, comme ils le firent avec les avions de combat dans les années 1980 avec l’Eurofighter et le Rafale. Mais, avec la fin du Talarion et l’attente de la décision concernant le lancement du Telemos, ce scénario semble s’éloigner.

Pourtant, et malgré qu’il soit sur la sellette depuis 2010, EADS croyait en l’avenir du Talarion. L’an passé, sa filiale défense et sécurité, Cassidian, avait signé un accord de coopération avec Turkish Aerospace Industries, Inc. et le groupe italien Alenia. L’idée était alors de réunir plusieurs pays autour de ce programme afin d’en partager les coûts de développement.

Au total, EADS aura dépensé 250 millions d’euros pour la mise au point du Talarion, qui aurait dû réaliser son premier vol en 2014. D’une masse de 7 tonnes pour 28 mètres d’envergure, capable d’emporter 800 kg en interne et 1.000 kg sous voilure et 500 kg sous le fuselage, cet appareil devait pouvoir évoluer à 15.200 mètres d’altitude et à une vitesse de 670 km/h. Et sa réalisation aura mobilisé 200 ingénieurs.

Aussi, il n’est pas question pour le groupe européen de renoncer à « jouer un rôle dans le futur marché » des drones. « Les technologies que nous avons développées sont vivantes et nous avons acquis de l’expérience » a fait valoir Tom Enders. Est-ce un appel du pied pour finalement participer au programme Telemos? L’avenir le dira.

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