Drones : On efface tout et on recommence?

Pour le moment, l’armée de l’Air met en oeuvre des drones MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) de type Harfang, lesquels arrivent en bout de course. Dans le même temps, il est question que BAE Systems et Dassault Aviation développent conjointement un appareil franco-britannique, le Telemos, dans le cadre des accords de défense de Lancaster House de novembre 2010, le groupe EADS, qui défend le programme Talarion, étant écarté.

Mais le temps que ce nouveau drone soit opérationnel, l’armée de l’Air doit trouver une solution intermédiaire pour faire la « soudure » et éviter une rupture capacitaire. D’où la décision prise par le précédent gouvernement de la doter du « Voltigeur », c’est à dire la version francisé par Dassault Aviation de l’appareil Heron TP du groupe israélien IAI. Cela avait donné matière à débat au Parlement, certains ayant préféré, comme les militaires d’ailleurs, le MQ-9 Reaper de l’industriel américain General Atomics, qui, en plus d’être moins cher, a la possibilité d’être armé et peut donner lieu à des coopérations européennes, l’Italie et le Royaume-Uni l’utilisant déjà.

Ca, c’était avant mai 2012. La donne politique a changé à Paris et le successeur de Gérard Longuet au ministère de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé son intention de remettre le dossier à plat en promettant des décisions avant le 14 juillet prochain. Et comme, pendant la campagne présidentielle, le candidat François Hollande avait pointé, sans le nommer, la trop grande influence de Dassault Aviation dans l’industrie française de défense, il faut s’attendre à un éventuel changement de cap dans cette affaire.

Ainsi, BAE Systems et Dassault Aviation espéraient signer le contrat portant sur le développement du Telemos, qui, normalement, devrait voir le jour à l’horizon 2020, à l’occasion du salon aéronautique de Farnborough, outre-Manche. Seulement, la conférence de presse prévue à ce sujet pour le 10 juillet a finalement été annulée.

Pour autant, cela ne veut pas forcément dire que le Telemos ait du plomb dans l’aile : selon le président Hollande, Jean-Yves Le Drian se rendra à Londres le 24 juillet « pour approfondir encore nos relations sur les perspectives de coopération militaire, notamment concernant les drones ». L’on en saura davantage à ce moment-là.

Cela étant, et c’est un autre signe qui ne va pas en faveur du projet commun à Dassault Aviation et BAE Systems, la France et l’Allemagne ont signé, en juin, une lettre d’intention concernant la coopération en matière d’armement, dont les drones.

Et du côté d’EADS, on n’est pas resté les deux pieds dans le même sabot. Notamment avec l’acquisition récente de Rheinmetall Airborne systems, qui produit le drone tactique KZO dont la Bundeswehr est dotée et qui s’occupe des Heron-1 de cette dernière.

D’où l’argument du groupe européen selon lequel il est désormais le seul à équiper les armées françaises et allemandes avec des drones opérationnels, dont l’Euro Hawk de la Bundeswehr, développé conjointement avec Northrop Grumman à partir du RQ-4 Global Hawk américain.

Qui plus est, EADS, qui défend l’idée d’une alliance européenne dans le secteur des drones afin d’éviter de revivre ce qu’il s’est passé pour les avions de combat avec le Rafale et l’Eurofighter, est rejoint par le groupe italien Finmeccanica, dont la filiale Alenia Aermacchi a estimé, selon l’AFP, que « seule une large coopération permettra à l’industrie européenne de préserver savoir faire et capacités technologiques. »

Et selon un responsable d’EADS, le « ministre français (ndlr, Jean-Yves Le Drian) a compris très rapidement que si on pouvait se le permettre, il fallait faire un drone européen. « Nous sommes confiants de trouver d’ici peu une solution européenne globale », assure Stefan Zoller, directeur de la branche défense du groupe européen dans les colonnes du Frankfurter Allgemeine Zeitung. « A la fin de l’année, début 2013 nous connaîtrons une percée », a-t-il prévenu.

Quant à la solution interimaire pour éviter une rupture capacitaire de l’armée de l’Air, Dassault Aviation attend toujours la confirmation de la commande concernant le « Voltigeur ». Mais le constructeur français pourrait attendre encore longtemps car il serait désormais question de moderniser… les Harfang.

« On s’oriente vers une prolongation du Harfang et le jeu sera plus ouvert pour le drone franco-britannique, avec le rapprochement en cours avec l’Allemagne dans la défense », a confié un source industrielle à l’agence Reuters.

Le quotidien Les Echos a indiqué, dans son édition du 10 juillet, que la Direction générale de l’armement (DGA) va négocier avec EADS une extension du contrat de maintenance des Harfang, lequel arrive à échéance en octobre 2013 alors que le Voltigeur est attendu, au mieux en 2014. D’où la tentation, avec la fin de l’engagement en Afghanistan et l’état des finances publiques, de moderniser ces appareils afin de patienter jusqu’à l’arrivée du Telemos ou du drone européen.

Mais le journal évoque une autre hypothèse : « En guise de solution d’attente, le ministre pourrait aussi confier à EADS une adaptation des Reaper » de General Atomics, « très prisés de l’armée de l’Air ».

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