Un traité sur le commerce des armes en cours de négociation aux Nations unies

Les 193 pays membres des Nations unies ont entamé, le 3 juillet dernier, les négociations portant sur un traité visant à réglementer le commerce des armées conventionnelles (TCA), sous la présidence du diplomate argentin Roberto Garcia Moritan, lequel avait déjà dirigé les travaux préparatoires à cette conférence.

Il s’agit de réglementer un marché évalué à 70 milliards de dollars par an, en imposant des critères stricts afin d’interdire la vente d’armes à des pays elles pourraient être utilisées contre des populations civiles ou alimenter des conflits, comme c’est par exemple le cas en Syrie actuellement.

Actuellement, selon Thédore Christakis, un professeur de droit international cité par Le Figaro, seul « l’envoi d’armes par un pays tiers vers les rebelles ou un groupe infra-étatique quelconque qui lutte contre le gouvernement d’un autre pays » est interdit. Ce qui n’empêche pas que des groupes insurgés bénéficient de livraisons d’armes… A contrario, vendre du matériel militaire à un régime qui s’en prend à sa population est autorisé. D’où la négociation du TCA, qui devrait, en principe, y mettre un terme.

Cela fait 6 ans qu’un tel texte est attendu, précisément depuis l’adoption d’une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies visant à entamer les négociations au sujet de la réglementation des ventes d’armes. Ces dernières ont été rendues possible grâce au président américain, Barack Obama, dont le pays détient 40% des parts du marché de l’armement.

Pour l’Union européenne, l’objectif est d’arriver à un accord large et juridiquement contraignant. « Nous pensons qu’un traité sur le commerce des armes doit couvrir tous les types d’armes classiques, y compris notamment les armes légères et de petit calibre, tous les types de munitions et les technologies associées » ont ainsi conjointement écrit les ministres des Affaires étrangères français, britannique, allemand et suédois dans une tribune publiée par Libération et The Guardian, le 2 juillet.

Seulement, il ne sera pas simple de mettre tout le monde d’accord d’ici le 27 juillet prochain, date à laquelle les négociations seront terminées. Pour les Etats-Unis, il n’est pas question d’inclure les munitions dans le traité. Et pour cause : ils produisent 6 milliards de cartouches chaque année.

Qui plus est, Washington refuse que soit oligatoire le respect de certains critères, comme celui de la « non-violation des droits l’homme » soit obligatoire, comme d’ailleurs Moscou, Pékin et la plupart des capitales arabes. Et cela pour une raison simple : qui va, en effet, décider, si tel pays peut acheter des armes ou pas? Comment seront évalués ces critères?

D’après LaTribune.fr, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiale (Gifas) craint « une catégorisation en ‘bons’ et ‘mauvais’ pays importateurs avec un risque induit de manipulation et d’instrumentalisation de ces listes par les pays ou réseaux d’influence. »

La Chine en veut en outre exclure du traité les armes légères, étant donné qu’elle en exporte massivement dans les pays en voie de développement. Mais là, le texte serait vidé de sa substance. Pour la Russie, deuxième exportateur mondial de matériels militaires (13,2 milliards de chiffre d’affaires), il faudrait mettre davantage l’accent sur la lutte contre les trafics d’armes que de réfléchir à des contraintes visant le commerce légal.

Si les principaux exportateurs ne sont pas favorables à ce que le TCA soit trop contraignant, il en va aussi de même pour les importateurs d’armes, comme le Japon, l’Arabie Saoudite ou encore le Pakistan. Le problème est que des pays où il existe des risque de « violation sérieuse » du droit humanitaire se trouvent aussi à la table des négociations…

Par ailleurs, il faudra voir si le traité s’intéresse aussi aux transferts de technologie et aux licences de fabrication de matériels vendues aux pays susceptibles de faire l’objet de restrictions en matière de ventes d’armes. Et là encore, c’est loin d’être gagné car même les Etats qui souhaitent des règles contraignantes pourraient se priver ainsi d’une certaine marge de manoeuvre.

Reste qu’il est fort probable que le TCA ne soit pas ratifié par les principaux exportateurs d’armes. « Une entrée en vigueur sur la base de 50 à 60 signataires nous fait courir le risque que des pays importants comme la Chine, la Corée, la Turquie, la Russie… ne comptent pas parmi les signataires alors que très certainement la France en fera partie » redoute le Gifas. Autrement dit, Paris se lierait les mains pendant que d’autres pourront continuer leurs petites affaires…

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