Des bases américaines très discrètes en Afrique
Les Etats-Unis s’intéressent de très près à l’Afrique au point que le président Obama a dévoilé, le 14 juin, une stratégie visant à encourager le développement économique de ce continent, qui dispose, avec ses ressources en matières premières, un potentiel « sensationnel ».
« L’Afrique est plus importante que jamais » a déclaré le président Obama. « Au moment où nous regardons vers l’avenir, il apparaît clairement que l’Afrique est plus importante que jamais pour la sécurité et la prospérité de la communauté internationale et pour les Etats-Unis en particulier » a-t-il ajouté.
Ainsi, le plan présenté par la Maison Blanche, qui se décline en 4 points : renforcer les institutions démocratiques, stimuler la croissance et les investissements, donner la priorité à la paix et la sécurité et promouvoir le développement. Mais il s’agit aussi de contrer l’influence grandissante de la Chine en Afrique, dont les échanges avec ce continent ont atteint, l’an passé, les 120 milliards de dollars, soit un bon de 100 milliards en l’espace de 10 ans.
Quant à la question de la sécurité, Washington s’y intéresse plus particulièrement depuis 2007, selon le Washington Post. Et pour cause : l’Afrique est aux prises avec l’émergence de groupes jihadistes, notamment au Sahel avec al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), les Shebabs en Somalie et la secte Boko Haram au Nigéria. Et l’on peut y ajouter d’autres mouvements rebelles qui entretiennent des foyers d’instabilité dans la région des Grands Lacs, comme par exemple le LRA (l’armée de résistance Seigneur) du chef de guerre Joseph Kony.
L’on savait déjà que les Etats-Unis avaient établi des bases à Djibouti, en Ethiopie, au Kenya et aux Seychelles afin d’y déployer des drones pour surveiller et, le cas échéant, frapper les combattants islamistes en Somalie ou au Yémen, ou encore que, via l’US Africom, le commandement pour l’Afrique, des coopérations militaires avec plusieurs pays africains avaient été lancées.
En fait, nous apprend l’édition du Washington Post du 13 juin, la présence militaire américaine en Afrique serait encore plus importante. C’est d’ailleurs ce qu’avait laissé entendre le général Carter Ham, le patron de l’US Africom, lors d’une audition au Congrès en mars dernier, en affirmant que les opérations ISR (intelligence, surveillance, reconnaissance) en Afrique avaient été étendues.
Ainsi, le Pentagone y aurait installé une douzaine de bases « secrètes » afin de mener des missions de renseignement menées par des équipes de forces spéciales et des « contractors », c’est à dire des employés de sociétés militaires privées.
Pour cela, ces derniers utilisent des avions de type Pilatus PC-12 (photo) à l’allure civile, dotés de capteurs et de caméras afin de survoler les régions où les groupes jihadistes et autres mouvements rebelles sont actifs. Cet appareil, appelé U-28A par l’armée américaine, peut opérer depuis des pistes à la fois très courtes et sommaires, ce qui permet de les avitailler discrètement et d’étendre ainsi leur rayon d’action. D’où son utilisation en Afrique.
L’une de ces bases « discrètes » est située à Ouagadougou, au Burkina Faso. Et au vu de sa situation, elle est même l’un des principales de cette opération appelée « Creek Sand » étant donné qu’elle est proche du Sahel. Les U-28A en décollent pour survoler survoler le nord du Mali où sont actifs des groupes comme AQMI, Ansar Dine et le MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad).
Pour Ouagadougou, ce partenariat très discret avec les Etats-Unis est apprécié, d’après Djibril Bassole, le ministre burkinabé des Affaires étrangères, interrogé par le quotidien américain. Cela étant, il n’a pas souhaité commenter les opérations des forces spéciales.
Le rôle de ces dernières est de former les armées des pays dans lesquels elles sont présentes. Mais pas seulement étant qu’elles peuvent mener, avec des équipes légères des missions visant à traquer et à éliminer les responsables de groupes terroristes.
Et c’est là une des marques de la présidence Obama. En effet, depuis 2009, les forces spéciales jouent un rôle de plus en plus prépondérant dans la stratégie de sécurité nationale américaine, et cela, au détriment de la CIA, qui voit des domaines de compétences qui lui étaient autrefois réservés lui échapper. Et l’Afrique en était un mais ces effectifs sont sans commune mesure avec ceux des l’US SOCOM (commandement des opérations spéciales).