Un mois de prison avec sursis pour un sous-officier déserteur de l’armée de l’Air

En 2008, Benjamin Pisani est incorporé à l’école des sous-officiers de l’armée de l’Air, implantée à Rochefort (Charente-Maritime). Ce fils d’un commandant de police, originaire de la région lyonnaise, en ressort, un an plus tard, avec la spécialité de mécanicien avion et le grade de sergent.

Il est par la suite affecté à la base aérienne d’Istres, plus précisément à l’Escadron de soutien technique spécialisé (ESTS) en charge du maintien en condition opértionnel des Mirage 2000N. Seulement, trois ans plus tard, le jeune sous-officier demande la résiliation de son contrat au 1er août 2011.

Mais l’armée de l’Air refuse de donner une suite positive à sa demande. Qu’à cela ne tienne, le sergent décide de quitter l’uniforme quand même et part se réfugier chez sa famille, à Lyon. Il est ainsi devenu déserteur, ce qui, selon les articles L 321-2 et suivants du code de justice militaire, est passible de trois ans de prison en temps de paix.

Jusqu’en janvier dernier, le jeune sergent se cache, avant d’être rayé des cadres de l’armée de l’Air. Mais cela n’a pas mis un terme aux poursuites judiciaires engagées contre lui pour sa désertion. L’affaire a donc été jugée le 21 mai par le tribunal chargé des affaires militaires de Marseille.

Pour l’armée de l’Air, les choses sont simples : « Ce sergent faisait partie de l’ESTS, une unité fortement engagée l’année dernière dans l’opération Harmattan » a expliqué, en janvier, le colonel Jean-Pascal Breton, le chef du Sirpa-Air. « Toute défection au sein de cette unité portait donc atteinte au service. En outre, la formation qui lui a été délivrée à Rochefort, assez longue et reconnue dans le civil, représentait un investissement pour l’armée de l’air. Et son engagement finissait en juin 2013 : nous ne laissons jamais partir quelqu’un à qui il reste plus de six mois » a-t-il ajouté.

Qui plus est, le sous-officier en question venait d’être muté, à sa demande, au soutien des C-135, les avions ravitailleurs, car, toujours selon le colonel Breton, « cela l’intéressait plus car il disait qu’on voyageait davantage ».

Pour sa défense, l’ancien sergent a indiqué avoir été victime d’un bizutage, lequel l’aurait décidé à demander la résiliation de son contrat, puis à déserter. « On a été pris à partie à l’occasion d’un pot de départ, l’ambiance s’est rapidement dégradée », a-t-il raconté, précisant qu’il a été « bâillonné et ligoté » par cinq ou six de camarades, en présence d’un lieutenant-colonel, avant d’être « descendu dans les vestiaires ». « Je n’ai pas voulu me laisser faire, je me suis rebellé », a-t-il poursuivi, en ajoutant que tout s’est terminé sans violences physiques, sauf des « claques ».

« L’armée n’accepte pas le bizutage et à tout moment un militaire peut se plaindre de ce genre de pratiques auprès de sa hiérarchie, mais il ne l’a jamais fait », a rétorqué le colonel Breton. « Il affirme des choses dont nous n’avons jamais eu connaissance et dont nous n’avons pas trouvé trace. S’il apporte des preuves, si les faits sont avérés, nous ferons le nécessaire, mais il nous a dit qu’il voulait partir parce qu’il n’était pas satisfait de son travail », a-t-il fait valoir.

Quoi qu’il en soit, le tribunal chargé des affaires militaires de Marseille n’a pas retenu cet éventuel bizutage comme étant de nature à expliquer la désertion de Benjamin Pisani, compte tenu du délai entre son arrivée, en octobre 2009 à la base d’Istres et son départ, en juillet 2011. « On ne rentre pas n’importe comment dans l’armée et on n’en sort pas n’importe comment » a affirmé le substitut du procureur.

Cela étant, ce dernier a indiqué, au sujet du bizutage, que « ce sont des faits scandaleusement inadmissibles et s’il y a confirmation (de la gravité des faits, ndlr), il y aura une réponse pénale ». Une enquête a été ouverte dès le début de cette année, suite à la médiatisation de cette affaire mais l’ancien sergent, qui n’a pas porté plainte, a refusé de déférer une première convocation à ce sujet.

Finalement, Benjamin Pisani a été condamné à un mois de prison avec sursis (trois mois avaient été requis par le parquet), soit une peine inférieure aux deux mois avec sursis généralement infligés dans ce type d’affaires. Selon l’armée de l’Air, qui emploie 57.000 militaires, une cinquantaine de cas de désertion ont été constatés en 2011, ce qui est un chiffre « en déflation » selon le Sirpa Air.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]