Un rapport américain s’inquiète des ventes d’armes européennes à la Russie, l’industrie de l’armement russe aussi

Le sénateur américain Richar Lugar (Parti républicain) avait demandé, au début de cette année, au Congressional Research Service d’établir un rapport afin d’évaluer les conséquences de ventes d’armes à la Russe par des pays membres de l’Otan. Et le document en question a été publié la semaine passée.

Ainsi, et comme l’on pouvait si attendre, ce rapport de 31 pages explique que ces contrats d’armement passés avec Moscou préoccupent certains pays membres de l’Otan, à commencer par ceux de l’Europe centrale et de l’Est ainsi que par les Etats baltes, qui craignent toujours l’attitude de la Russie à leur égard, les contentieux du passé n’ayant toujours pas été évacués.

Le document s’attaque surtout à la vente par la France de deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) de type Mistral pour 1,2 milliard d’euros ainsi que celle de deux autres en option.

« Il s’agit de la première vente d’armements offensifs importants par un pays membre de l’OTAN à la Russie. Ce contrat met en lumière les tensions au sein de l’Alliance sur les relations à adopter avec la Russie » fait valoir le rapport. Cela étant, il n’y a rien de neuf dans cette affirmation, dans la mesure où, déjà, plusieurs parlementaires américains ont critiqué ce contrat. Et si l’administration Obama ne l’a pas vu non plus d’un bon oeil, elle a laissé faire au titre de sa politique de « reset » à l’égard de Moscou.

Mais le rapport ne mentionne pas que les ventes françaises : des pays comme l’Allemagne et l’Italie sont également cités. Le premier, via le groupe Rheinmetall, a signé un contrat de 131 millions de dollars pour construire un centre d’entraînement, qualifié de « plus avancé au monde » par le document.

Quant au second, il a accordé une licence à la société d’Etat russe Oboronservis afin de l’autoriser à assembler des véhicules tactiques blindés à roues LMV. Appelés Lynx par l’armée russe, certains ont été vus à la traditionnelle parade militaire organisée tous les 9 mai sur la Place rouge. Conçu par Iveco, ce modèle a déjà été livré à plusieurs forces armées de l’Otan.

L’autre dossier qui concerne l’Italie est celui de la vente du char à roues Centauro, produit par Oto-Melara. Deux blindés de ce type ont récemment été envoyés en Russie à des fins d’évaluation. Selon un responsable de l’entreprise italienne, il se pourrait que Moscou obtienne une licence pour produire ce modèle. Seulement, cette éventualité, quand elle ne suscite pas du scepticisme, n’est pas du goût de tout le monde en Russie, à commencer par les industriels de l’armement, qui s’opposent aux importations de matériels étrangers.

Ainsi, en février dernier, le vice-premier ministre de l’époque, Dmitri Rogozine, avait déclaré que la Russie « renoncera à acheter des véhicules blindés à l’étranger dans les meilleurs délais ». « Le ministère russe de la Défense critique régulièrement le faible niveau de sécurité des blindés produits en Russie. Les producteurs nationaux prennent en considération ces réclamations et perfectionnent les véhicules en question » avait-il ajouté, se faisant ainsi l’avocat des industriels de l’armement locaux.

Cela étant, l’état-major russe voit les choses autrement. Etant donné qu’il doit moderniser 70% de ses équipements à moyen terme, il lui faut du matériel qui ne soit pas technologiquement dépassé et livré dans les temps. Ce que l’industrie russe n’est pas toujours en mesure de faire…

« En se fournissant ailleurs, le gouvernement russe maintient la pression sur son industrie de défense nationale afin de l’inciter à une plus grande compétitivité, tant sur la qualité que sur les prix et les délais de livraison » avait expliqué, en octobre 2011, au Monde Diplomatique, Rouslan Poukhov, le directeur du Centre d’analyse des stratégies et des technologies (CAST)

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