Le président Sarkozy n’a pas insisté pour qu’une frégate française escorte l’USS Lincoln dans le détroit d’Ormuz (MàJ)

Quand, le 22 janvier dernier, le porte-avions américain USS Abraham Lincoln a franchi le détroit d’Ormuz malgré les menaces iraniennes, il n’avait nullement besoin à ses côtés de la présence de frégates européennes, son escorte constituée par un croiseur et deux destroyers étant suffisante pour assurer sa protection. Pourtant, deux frégates, l’une française, La Motte-Picquet, l’autre britannique, l’HMS Argyll, ont bel et bien accompagné le porte-avions de l’US Navy  dans le stratégique détroit d’Ormuz, qui sépare le golfe Persique de la mer d’Oman.

Le quotidien britannique The Telegraph affirme que ce serait le président Sarkozy qui aurait insisté auprès des Etats-Unis pour que la frégate La Motte-Pïcquet se joigne au groupe aéronaval américain, non pas pour un quelconque intérêt militaire mais pour marquer les esprits au niveau diplomatique. Ce faisant, Londres ne pouvait pas être en reste. « Ne pas participer alors que les Français étaient de la partie aurait pu soulever des interrogations sur la ‘relation spéciale’, déjà mise en doute depuis l’élection de Barack Obama » écrit le journal, soulignant que, l’an passé, le président américain « avait qualifié la France d’alliée le plus proche des Etats-Unis ». D’où, finalement, la participation du HMS Argyll à l’opération.

« Les Américains avaient d’abord prévu d’y aller seuls. Ils ont clairement indiqué qu’ils ne voyaient aucun avantage militaire dans la participation de bâtiments européens » a déclaré une source diplomatique au quotidien britannique. « Mais, après que le président (ndlr, Sarkozy) a insisté pour que la France soit représentée, le gouvernement britannique a décidé que la Grande-Bretagne devait aussi y participer, sans tenir compte de l’importance militaire » a-t-elle ajouté. Ces propos ont été confirmés au Telegraph par un responsable du ministère britannique de la Défense (MoD), lequel a d’ailleurs qualifié ces négociations en coulisses « d’humiliantes » pour le Royaume-Uni…

Seulement, cette version des faits est contestée par l’Etat-major des armées à Paris. En effet, selon le porte-parole de ce dernier, le colonel Thierry Burkhard, la frégate La Motte-Picquet a rejoint l’escorte de l’USS Abraham Lincoln à la demande de l’US Navy, au titre de la coordination des mouvements des navires présents dans cette partie du monde. Par conséquent, le président Sarkozy n’y est strictement pour rien, contrairement aux allégations du Telegraph. Et pour mémoire, ce sont les Britanniques qui ont communiqué sur la présence des deux navires européens aux côtés du porte-avions américains dans le détroit d’Ormuz alors que Paris n’avait encore fait aucune déclaration à ce sujet.

Aussi, il est vraisemblable que les sources diplomatiques et militaires qui se sont confiées au Telegraph aient cherché à dramatiser la situation de la Royal Navy, à l’heure où cette dernière doit réaliser d’importantes économies. Un débat sur un probable déclassement des forces armées britanniques a actuellement lieu outre-Manche. Ainsi, une commission sur la défense du Parlement britannique vient de rendre un rapport dans lequel il est clairement posé la question de savoir si le Royaume-Uni serait en mesure de participer à une opération semblable à celle qui a permis de défaire le régime du colonel Kadhafi, en Libye, à l’issue de l’application de la Strategic defense and security review (SDSR).

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