Ouverture d’une information judiciaire au sujet de l’embuscade d’Uzbeen

En août 2008, dix militaires français furent tués au cours d’une embuscade tendue par les insurgés afghan dans la vallée d’Uzbeen, en Surobi, à une cinquantaine de kilomètres de Kaboul. Ce secteur avait été sous le contrôle des soldats italiens avant d’être transféré à la France.

Quelques mois plus tard, des familles endeuillées par ce drame déposèrent plainte contre X pour « mise en danger de la vie d’autrui » devant le Tribunal aux armées de Paris. Le père d’un des soldats tués, Joël Le Pahun, avait déclaré, à l’époque, « soupçonner l’existence d’une série de manquements dans la chaîne de commandement ». Et d’expliquer qu’il ne s’agissait pas de viser « le président de la République, son gouvernement ou le chef d’état-major des armées » mais « des individus qui n’ont pas assumé leurs responsabilités, qui n’ont pas su gérer la mission qu’ils devaient mettre en place ».

En février 2010, cette plainte avait été classée sans suite, au motif « qu’envoyer des soldats au combat est le propre du métier des armes », selon une source judiciaire dont les propos avaient été rapportés par l’AFP.

Cependant, les familles et leur avocat, le très médiatique Me Gilbert Collard, ne se sont pas arrêtés là : une nouvelle procédure fut lancée un mois plus tard. Et cette dernière a abouti puisqu’un juge d’instruction parisien y a donné une suite favorable, le 23 mars dernier, en indiquant qu’il y a lieu d’instruire pour « homicide involontaire ». En clair, une information judiciaire va être ouverte, contre l’avis du Parquet.

« Il y a une différence entre aller combattre en ayant estimé le risque et les envoyer se faire tuer sachant pertinemment qu’ils allaient se faire attaquer dans cette embuscade » a déclaré Joël Le Pahun, sur les ondes de RTL, avant de mettre en cause l’absence de reconnaissance préalable, l’attitude de l’interprète accompagnant les militaires français et l’absence d’appuis mortiers.

Cela étant, cette procédure laisse craindre une « judiciarisation » des opérations militaires, et pourrait faire passer le soldat tué au combat pour une « victime » d’un fait divers.Par ailleurs, le code pénal ne prévoit pas, par exemple, de sanctions si une reconnaissance aérienne n’a pas été effectuée. Et cela peut aller loin, car l’on peut imaginer que toute décision amenant à la mort d’un combattant puisse être reprochée au chef de section, au commandant de compagnie, voire au chef de corps et faire l’objet de justifications.

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