La taille de l’arsenal nucléaire pakistanais a doublé

En avril 2010, les Etats-Unis appelèrent une quarantaine d’Etats à prendre des mesures contre le terrorisme nucléaire à l’occasion d’un sommet à ce sujet organisé à Washington.

Parmi les principales inquiétudes, l’ex-URSS et le Pakistan figuraient alors en bonne place. Pour le premier cas, le déficit de sécurité des laboratoires et des réacteurs disséminés sur le territoires de l’ancien empire soviétique laisse en effet craindre que du matériel nucléaire puisse tomber entre de mauvaises mains d’autant plus qu’une quinzaine de cas de trafic d’uranium et de plutonium ont été recensés par l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA) entre 1993 et 2008.

Pour le Pakistan, le risque est de voir des militants islamistes s’emparer de matières fissiles, voire même d’armes nucléaires, le tout avec l’aide d’une partie des services de renseignement Pakistanais (ISI, Inter-Services Intelligence), lesquels sont par ailleurs suspectés d’apporter un soutien au Lashkar-e-Taïba, actif au Cachemire, ainsi qu’aux taliban afghans. Par ailleurs, le père de la bombe pakistanaise, le docteur Abdul Qadeer Kahn, a livré des secrets de fabrication à la Libye, à la Corée du Nord et à l’Iran.

Jusqu’à présent, Islamabad a toujours avancé que ses installations nucléaires étaient « hautement sécurisées ». Pour autant, cela n’empêche pas d’avoir des doutes, notamment exprimés par les diplomates américains, d’après les câbles diplomatiques révélés par WikiLeaks.

« Les islamistes ne cherchent pas seulement le pouvoir au Pakistan mais ils essaient aussi de mettre la main sur du matériel nucléaire » pouvait-on lire dans un des documents confidentiels du département d’Etat, publié par The Guardian en novembre dernier. « Entre 120.000 et 130.00 personnes travaillent aux programmes nucléaire et de missiles du Pakistan (…), il est impossible de garantir à 100% leur fiabilité et leur loyauté » ajoutait encore le télégramme diplomatique.

Cette crainte est aussi partagée par une partie de la presse pakistanaise. Ainsi, en 2009, le quotidien The Dawn écrivait « qu’avec l’antiaméricanisme qui atteint des sommets au Pakistan, on peut redouter qu’il y ait des sympathies pour la cause des extrémistes au sein même de ceux chargés d’assurer la sécurtié de l’arme nucléaire ».

Bien évidemment, le risque que des islamistes s’emparent de matériels nucléaires – et al-Qaïda n’a jamais fait mystère de son intention de le faire – augmente à mesure que l’arsenal pakistanais prend de l’importance.

Et plusieurs données récentes ont donné à penser qu’Islamabad cherchait justement à accroître son armement nucléaire. Ainsi, des images satellites, publiées le 19 mai 2009, ont montré que deux sites pakistanais avaient fait l’objet d’agrandissements : le complexe chimique de Dera Ghazi, où est produit l’uranium entrant dans la fabrication d’armes et celui de Rawalpindi où une deuxième usine de séparation du plutonium a été construite.

« Une expansion des capacités de production d’armements nucléaires complique inutilement les efforts visant à sécuriser les avoirs nucléaires du Pakistan » avait alors estimé l’Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS).

Ces efforts pakistanais avaient été mis au jour un an plus tôt par les services américains, si l’on en croit, encore, les télégrammes diplomatiques révélés par WikiLeaks. « En dépit d’une situation économique catastrophique, le Pakistan continue de produire des armes nucléaires à un rythme plus élevé que tout autre pays au monde » indiquait une dépêche rédigée en 2008 par un responsable du renseignement américain, à l’intention de l’Otan.

Résultat : l’arsenal nucléaire du Pakistan a doublé en quatre ans, passant de 30 à 60 armes à plus de 100. C’est du moins l’estimation faite par des analystes non gouvernementaux, cités par le Washington Post. Et cela s’accompagne par le développement de nouveaux vecteurs pour transporter ces têtes nucléaires, comme notamment le missile balistique Shaheen-3, qui devrait avoir une portée théorique de 4.000 à 4.500 km.

Si ces estimations sont exactes, cela voudrait dire que le Pakistan aurait pris l’avantage sur l’Inde en matière d’armes nucléaires. Aux prises avec de graves difficultés économiques, les efforts d’Islamabad dans cette voie s’expliquent par la supériorité indienne en matière d’armes conventionnelles.

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