Polémique sur l’abandon du programme Nimrod MRA4 au Royaume-Uni

Avec un budget en baisse de 8% pour les cinq prochaines années, le ministère britannique de la Défense a été contraint de faire des choix, au risque de susciter des ruptures capacitaires.

Quelques jours après l’annonce des décisions visant à faire des économies, d’anciens officiers supérieurs avaient pris la plume pour dire, dans les colonnes du Times, tout le mal qu’ils pensaient de la politique du gouvernement dirigé par David Cameron, notamment au sujet du retrait du service actif des avions Harrier et du désarmement du porte-aéronefs Ark Royal, en dénonçant une mesure « stratégiquement et financièrement illogique », considérée comme « une invitation à l’Argentine » à « infliger une humiliation nationale comparabe à la perte de Singapour » pour « les dix prochaines années ».

Mais l’abandon des Harrier et de l’Ark Royal n’est pas le seul sujet qui suscite de l’inquiétude chez les militaires britanniques. Ainsi, six anciens officiers supérieurs, qui ont exercé de hautes responsabilités par le passé, ont interpellé leur gouvernement dans une tribune publiée le 26 janvier par le Daily Telegraph et dans laquelle ils dénoncent l’arrêt du programme d’avion de patrouille maritime Nimrod MRA4.

Initialement, ces appareils devaient remplacer, à partir de 2012, les Nimrod MR2 de la RAF, retirés du service actif en mars 2010, après 40 ans de service. Dotés de moyens d’écoutes et de détection sophistiqués, ces avions jouait un rôle capital dans la sécurisation des départs et des retours des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) britannique. Autrement dit, ces missions de patrouille maritime (PATMAR) contribuent à crédibilité de la dissuasion nucléaire.

D’ailleurs, le retrait des Nimrod MR2 sans attendre l’arrivée de leurs successeurs a ainsi permis, en août dernier, à un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) russe de type Akula de pister un SNLE britannique dès sa sortie de la base de Faslane (Ecosse).

Outre les missions PATMAR, les Nimrod pouvaient également être utilisés pour coordonner des actions de sauvetage en mer ou encore pour des missions anti-terroristes et de lutte contre les trafics.

Aussi, pour les six anciens officiers, l’arrêt du programme Nimrod MRA4 risque de « porter sérieusement atteinte aux intérêts du pays sur le long terme », pour une économie de 2 milliards de livres sterling sur les dix prochaines années.

Les missions dévolues à ces appareils peuvent être assumées « par des frégates, des hélicoptères Marlin anti-sous-marin ou encore des C130 Hercule. Ils sont loin, cependant, de remplacer la contribution stratégique multi-rôle du Nimrod » ont écrit les officiers, qui notent que, dans le même temps, d’autres pays cherchent à renforcer leurs capacités en matière de patrouille maritime en acquérant des P8-A Poseidon de Boeing.

Cela étant, le projet Nimrod MRA4 a été victime de dépassement de coûts et de retards, au point que le ministre britannique de la Défense, Liam Fox, s’en était servi pour illustrer tout ce qu’il ne fallait pas faire en matière de gestion de programme.

Reste que la destruction des neuf avions prévus pour remplacer les Nimrod MR2, qui ont coûté jusqu’à présent 4 milliards de livres, a commencé le 26 janvier, c’est à dire le jour même de la parution de la tribune des 6 officiers. Cette opération, qualifiée de « folie » et menée par des entreprises privés coûtera 200 millions de livres au contribuable britannique.

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