Otan : La France exprime à nouveau ses réserves sur la défense antimissile

Les ministres de la Défense et leurs collègues des Affaires étrangères des pays membres de l’Otan ont été réunis à Bruxelles, ce 14 octobre, pour évoquer le nouveau concept stratégique de l’Alliance atlantique, qui sera soumis lors du prochain sommet de l’organisation prévu les 19 et 20 novembre.

Outre la question de la réforme de la structure militaire de l’Otan, qui devrait passer par une réduction des quartiers généraux et des agences, et donc, des effectifs, plusieurs sujets ont été abordés, comme les nouvelles menaces auxquelles les pays membres de l’Alliance doivent faire face ou encore la mise en place d’une défense antimissile.

Sur ce dernier point, le secrétaire général de l’Alliance atlantique, qui en est l’ardent avocat depuis qu’il a pris ses fonctions, a réaffirmé ses arguments dans une tribune publiée par le quotidien Le Monde (daté du 14 octobre). Considérant que « plus d’une trentaine de pays possèdent ou acquièrent actuellement des missiles qui pourraient être utilisés pour emporter non seulement des charges conventionnelles, mais aussi des armes de destruction massive », l’ancien Premier ministre danois propose de relier la défense antimissile de théâtre développée par l’Otan aux systèmes américains afin de « défendre les populations et le territoire des pays alliés européens ».

Quant au coût de cette défense antimissile, Anders Fogh Rasmussen estime qu’il ne « mènera pas à la banqueroute » : aux 800 millions d’euros dépensés par les alliés sur 14 ans pour le système antimissile destiné aux troupes en opérations, il suffirait d’ajouter moins de 200 millions d’euros supplémentaires, « prélevés sur le budget commun et répartis sur 10 ans ».

Seulement, la France n’a jamais été convaincu par les arguments avancés par le secrétaire général de l’Otan. Et, encore une fois, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, a exprimé « ses réserves » concernant ce projet, tout en insistant sur le nécessaire dialogue avec la Russie sur ce sujet. Cela étant, il a laissé entendre que Paris ne bloquerait pas cette initiative si elle est adoptée par une majorité d’Etat-membres à Lisbonne.

Les raisons qui justifient les réserves d’Hervé Morin sont les mêmes que celles qu’il avait exprimées en mars dernier, à l’occasion d’une visite d’Anders Fogh Rasmussen à Paris. Visiblement, le ministre de la Défense n’est pas convaincu par le montage financier pour prendre en charge le coût de ce système de défense antimissile, lequel, selon lui, n’aurait pas la capacité de « faire face aux menaces d’un Etat terroriste doté de moyens nucléaires rustiques ».

« Personne ne peut imaginer » que ce système antimissile puisse défendre efficacement les villes européennes « d’une attaque massive » a-t-il estimé. « C’est un peu comme la ligne Maginot » a-t-il déclaré, « cela pourrait donner aux Européens le sentiment d’assurer leur sécurité sans engager de dépenses » pour leur défense.

« La meilleure façon de se faire respecter, c’est de détenir un arsenal de dissuasion crédible » a affirmé Hervé Morin. C’est d’ailleurs la ligne qui a été définie lors de la cohabitation Mitterrand/Balladur dans les années 1990.

Seulement, la question de la dissuasion nucléaire ne fait pas que des émules. Si la France peut compter sur le soutien de la Grande-Bretagne, elle s’oppose à l’Allemagne, mais aussi à la Belgique, aux Pays-Bas, au Luxembourg et à la Norvège. En effet, ces pays demandent le retrait des 200 têtes nucléaires tactiques déployées par l’Otan sur leur territoire. En effet, Berlin est favorable au développement d’un bouclier antimissile et plaide, dans le même temps, pour le désarmement nucléaire, considérant que le concept de dissuasion est désormais dépassé.

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