Allemagne : Le service militaire sur la sellette

Contrairement à la France, l’Allemagne n’a pas fait le choix de suspendre la conscription et de s’orienter vers une professionnalisation de son armée. Le 19 mai dernier, le Conseil fédéral des ministres (le Bundeskabinet) a adopté une réduction du service militaire de neuf à six mois, à compter du 1er juillet prochain.

Sauf que cette mesure, bien qu’elle avait été annoncée lors de la dernière campagne électorale, a mis du temps avant d’être adoptée. En effet, un jeune allemand a le choix d’effectuer soit un service militaire, soit un service civil au profit d’organisations sociales ou éducatives semi-publiques.

Et pour ces dernières, la réduction de la durée du service militaire, qui, initialement, allait de pair avec son alternative civile, n’a pas été une bonne nouvelle étant donné qu’elles comptent, grâce à ce dispositif, sur une main d’oeuvre à la fois disponible et bon marché. D’où des tergiversations qui ont retardé la décision du Bundeskabinet.

Cela étant, l’armée allemande est appelée à faire d’importantes économies, de l’ordre de 1 à 1,2 milliards d’euros par an. Déjà que Berlin consacre seulement 1,3% de son Produit Intérieur Brut (PIB) à sa défense (ce qui en fait un des budgets les plus faibles de l’Otan), il est inutile d’insister pour dire que la marge de manoeuvre est étroite d’autant plus que, dans le même temps, il faut financer le contingent de la Bundeswehr en Afghanistan, lequel va être prochainement engagé dans une opération majeure, avec l’appui des forces américaines, dans le nord du pays. En mai dernier, le ministre de la Défense, Karl-Theodor zu Guttenberg, avait annoncé l’envoi de véhicules blindés de combat d’infanterie supplémentaires et plus généralement, d’équipements supplémentaires.

Le 2 juin, la presse d’outre-Rhin a indiqué que l’armée allemande pourrait voir ses effectifs réduits de 50.000 à 150.000 hommes, soit une baisse de 20 à 40% par rapport au niveau actuel qui est de 250.000 soldats. Et le ministre zu Guttenberg de préciser qu’il allait se pencher sur l’avenir du service militaire, qu’il juge « anachronique ».

Va-t-on vers la fin de la conscription en Allemagne? Sans doute, si Karl-Theodor zu Guttenberg, qui est membre de la CSU, le parti chrétien-démocrate bavarois, réussit à convaincre ses homologues de la CDU, lesquels sont, pour l’instant, plutôt réticents à cette idée, à la différence de leurs partenaires libéraux-démocrates du FDP avec qui ils forment un gouvernement de coalition. La décision en reviendra à la chancelière, Angela Merkel, qui s’est dite « ouverte à toute option ».

Quoi qu’il en soit, la suppression du service militaire permettrait aux forces allemandes d’économiser 400 millions d’euros par an. Ce qui est encore loin du milliard d’euros exigé pour remettre à flot les finances publiques.

La question se pose alors de savoir si l’Allemagne entend « partager le fardeau » avec ses alliés dans le règlement des conflits, comme c’est actuellement le cas en Afghanistan, ou si, au contraire, Berlin attend des autres qu’ils fassent le « sale boulot » pour ensuite tirer les marrons du feu – commercialement parlant – avec toute la bonne conscience de celui qui n’a pas eu à se salir les mains.

« A mons avis, la société (allemande) dans son ensemble est en train d’accepter progressivement (…) que dans le doute et en cas de nécessité, un engagement militaire peut être nécessaire pour protéger nos intérêts, par exemple la liberté des voies commerciales, ou en empêchant l’instabilité dans des régions entières qui aurait des effets négatifs sur nos échanges, nos emplois et nos revenus » a déclaré, la semaine passée, Horst Köhler, le président fédéral allemand. Sauf que devant la polémique que ses propos ont déclenché outre-Rhin, il a démissionné le 31 mai. Sans doute un début de réponse…

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