Le contrat des Mirage 2000 taïwanais dans la ligne de mire

Le contrat concernant la vente de six frégates de la classe La Fayette à Taïwan pour 14 milliards de francs en 1991 interdisait tout recours à des intermédiaires. Seulement, afin de lever le véto mis par le gouvernement français à cette vente – sous pression de la Chine – il s’est révélé nécessaire, aux yeux de certains, d’avoir recours à cette pratique. En France, cela donnera lieu à plusieurs affaires politico-financières qui alimenteront les gazettes, avec Roland Dumas, le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Christine Deviers-Joncour, Alfred Sirven et la compagnie Elf en tête d’affiche.

Pour faire avancer ce dossier, baptisé « Bravo », des interlocuteurs ont donc été rémunérés de façon occulte, comme notamment un certain Andrew Wang. L’on passera sur les morts mystérieuses qui ont émaillé cette affaire, comme celle du capitaine de vaisseau de la marine taiwanaise Yin Chin-feng, qui, en décembre 1993, s’apprêtait à révéler l’existence de ces commissions interdites, dont une partie serait revenue en France sous forme de « rétro-commissions » pour financer on-ne-sait-qui, les demandes de levée du secret défense à se sujet ayant été sans effet.

Cela étant, et en vertu des dispositions contractuelles liées à la vente des frégates, Taïwan a réclamé le remboursement de ces commissions occultes. Finalement, et après presque dix ans d’attente, la Cour internationale d’arbitrage a condamné Thales (ex-Thomson CSF à l’époque de faits) à verser 591 millions de dollars à Taïpeh. Ce montant, dont une part devrait être payée par l’Etat français en sa qualité d’actionnaire majoritaire de DCNS) pourrait d’ailleurs être encore plus important si l’on prend en compte les intérêts, les frais d’arbitrage et les dommages et intérêts. Pour l’instant, le groupe français d’électronique de défense envisage de faire appel de cette condamnation.

Reste que cette affaire des frégates a éveillé la suspicion sur un autre contrat d’armement passé avec Taïwan. En effet, la France a vendu à l’île 48 Mirage 2000-5Ei et 12 Mirage 2000-5D en 1992 pour initialement 22,8 milliards de francs, soit pratiquement à la même période du fameux contrat Bravo.

Plusieurs éléments ont éveillé les doutes. D’abord, la période à laquelle le contrat a été établi : elle correspond à celle de la vente des frégates. Et puis Thales est encore dans le coup puisque le groupe français fourni l’avionique des avions de Dassault. Enfin, le montant total du contrat aurait été supérieur de 6 milliards de francs par rapport à ce qui avait été initialement prévu.

En fait, les autorités de contrôle taïwanaises ont des suspicions au sujet de ce contrat depuis 2002, au point qu’elles avaient même recommandé l’ouverture d’une enquête judiciaire à son sujet afin de déterminer l’existence d’éventuelles commissions occultes.

D’où l’annonce faite le 7 mai dernier par l’armée de l’Air taïwanaise de « réexaminer » le contrat portant sur la vente des Mirage 2000, d’autant plus que le nom d’Andrew Wang, déjà cité dans l’histoire des frégates, a également été évoqué dans cette affaire.

Dans le cas où le versement de commission interdites venait à être découvert, l’armée de l’Air taïwanaise a d’ores et déjà prévenu qu’elle saisirait la Cour international d’arbitrage.

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