Les dessous de l’élimination des chefs d’al-Qaïda en Irak

Le 9 mars 2007, les autorités irakiennes annoncent l’arrestation d’un certain Abou Omar al-Bagdadi, présenté comme étant un important responsable de la branche irakienne d’al-Qaïda. Seulement, pour les forces américaines, ce Bagdadi n’existe pas et serait en fait une invention pour servir la propagande djihadiste.

Ainsi, le 3 mai de la même année, le général William Caldwell, alors porte-parole des forces américaines en Irak, déclare  » qu’il y a beaucoup de discussions au sujet d’une personne appelée al-Bagdadi, mais nous n’avons actuellement aucun renseignement sur qui ça peut être… et ne savons pas qui c’est ».

Pourtant, le 30 décembre 2007, Oussama ben Laden, le chef d’al-Qaïda, demande à « tous les musulmans d’Irak de se rallier à Abou Omar al-Bagdadi », ce qui tendrait à prouver que cette personne existe bel et bien.

En avril 2009, le gouvernement irakien annonce une nouvelle fois la capture d’al-Bagdadi et donne ce qui passe pour être sa véritable identité : Ahmad Abed Ahmad.

Comment se fait-il alors qu’un homme dont l’existence a été niée par les forces américaines et qui a été plusieurs fois donné pour mort ou capturé puisse avoir été tué le 18 avril dernier dans la région de Tikrit en compagnie du chef militaire d’al-Qaïda en Irak, à savoir Abou Ayyoub al-Masri?

Une explication a été donnée par le Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki. « Al-Qaïda a tenté de camoufler Abou Omar al-Bagdadi en présentant plusieurs personnes sous ce nom mais aujourd’hui, c’est l’original » a-t-il ainsi déclaré.

Quant à l’homme arrêté en 2009 sous le nom d’al-Bagdadi, le porte-parole du commandement militaire à Bagdad, le général Qassam Atta, a assuré, le 20 avril, qu’il s’agissait en fait d’une opération de manipulation pour tromper l’organisation terroriste.

« Nos services de renseignements nous ont demandé de le présenter à la télévision et d’affirmer avec certitude que c’était lui, pour faire croire à al-Qaïda que nous étions tombés dans le panneau » a-t-il expliqué. « Mais pendant ce temps, nos enquêteurs ont continué à traquer le vrai jusqu’à dimanche » a-t-il poursuivi.

Il reste cependant à établir le parcours d’al-Bagdadi. Selon la télévision officielle irakienne, il aurait été un militant islamiste de longue date, ayant commencé ses activités terroristes en 1985, avant de revenir en Irak en 1991 et de se faire connâitre lors de la bataille de Falloujah en 2004.

Pour le gouvernement irakien, le vrai nom de Bagdadi serait Hamid Daoud Muhammad al-Zawi, un ancien général de police sous le règne de Saddam Hussein. Cette information corrobore celle qui avait été donnée lors de l’arrestation du « faux » responsable djihadiste en 2009, ce qui peut se comprendre étant donné qu’il s’agissait « d’enfumer » al-Qaïda.

Un autre mystère concerne la façon dans l’armée américain a pu identifier le corps d’al-Bagdadi grâce à des tests génétiques. Comment, en effet, aurait-elle pu être aussi formelle sans disposer préalablement d’échantillons ADN de celui qui se faisait appeler le « prince de la foi »?

La réponse a été donnée par Nouri al-Maliki : al-Bagdadi « a été arrêté début 2009 par l’armée américaine et libéré quelques mois plus tard » a-t-il affirmé, en présentant une photo représentant le chef terroriste arborant la tenue orange caractéristiques des détenus des prisons américaines.

Quant au cheminement qui a permis le lancement de l’opération « Saut du lion », qui a donc permis l’élimination d’al-Bagdadi et de Masri (alias Abou Hamzah al-Moujaher), le successeur d’Abou Moussab al-Zarkaoui depuis 2006, il faut remonter au 11 mars dernier.

Ce jour là, la brigade 54 de l’armée irakienne et une unité de renseignement spécialement créée pour traquer al-Qaïda interpellent un dénommé Manaf Abdel Rahim al-Ghawi, un Irakien qui a rejoint al-Qaïda en 2003 et qui a été présenté comme étant le responsable de la récente vague d’attentats qui a endeuillé Bagdad.

C’est donc sur la base des informations qu’il a fournies durant son interrogatoire et les documents qui ont été trouvés dans sa cache que l’opération « Saut du Lion » a été planifiée.

Cette dernière a été qualifiée de « coup le plus significatif porté contre al-Qaïda en Irak depuis le début de l’insurrection » par le général Ray Odierno, le chef des forces américaines dans le pays. Cependant, elle ne marque pas la fin de la lutte contre l’organisation terroriste, qui, bien que vaincue militairement, a su prouver qu’elle était encore capable de mener des attaques aussi meutrières que spectaculaires.

En effet, deux jours après l’élimination de Bagdadi et de Masri, un autre chef militaire d’al-Qaïda a été tué à Mossoul, dans le nord de l’Irak, lors d’une opération, là-encore, conjointe américano-irakienne. Le responsable neutralisé, Ahmad al-Obeidi, aurait refusé de se rendre avant l’attaque de la maison où il se cachait.

Selon les autorités militaires irakienne, al-Obeidi, alias Abou Souheib, était le « chef militaire d’al-Qaïda pour les provinces de Ninive, Salaheddine et Kirkouk ». Avant l’opération Iraqi Freedom, il était officer de renseignement de l’armée irakienne.

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