L’état-major polonais décimé

Septembre 1939. Près de 22.000 officiers polonais, pour la plupart réservistes, sont faits prisonniers par l’Armée Rouge alors qu’ils battaient retraite face à l’avancée des troupes allemandes sur leur front ouest. Six mois plus tard, sur ordre de Staline, alors allié à Hitler après le pacte germano-soviétique, ils sont tous exécutés d’une balle dans la nuque.

Jusque-là attribuée aux nazis, il faudra attendre 1990 pour que l’URSS, alors dirigée par Mikhaïl Gorbatchev, reconnaisse la responsabilité de ce massacre, laquelle a été une fois affirmée par le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, la semaine passée.

Avril 2010. Soixante-dix ans plus tard, une délégation officielle conduite par le président polonais conservateur Lech Kaczynski doit se rendre le 10 avril sur les lieux du massacre, près de Smolensk en Russie. Seulement voilà, l’avion officiel, un Tupolev 154 (TU-154), s’écrase à l’atterrissage. Bilan : les 96 occupants de l’appareil sont tués.

Parmi les victimes, outre le président Kaczynski, l’on trouve les principaux responsables de l’armée polonaise, dont les généraux Franciszek Gagor, son chef d’état-major, Bronislav Kwiatkowski, le responsable des forces opérationnelles, Tadeusz Buk, ne numéro un de l’armée de Terre, Andrzej Blasik, celui de des forces aériennes et Wojciech Potasinski, le patron des forces spéciales. Enfin, l’amiral Andrzej Karweta, le commandant en chef de la marine de guerre, a également perdu la vie dans l’accident.

Selon les règlements en vigueur en Pologne, ce sont les premiers adjoints des reponsables militaires qui assurent l’intérim, dans l’attente de nouvelles dipositions et nominations.

« La direction de l’état-major de l’armée polonaise se réunit aujourd’hui (ndlr: le 10 avril). Face à cette situation de crise, elle prendre des décisions appropriées » a sobrement indiqué Dariusz Niedzielski, un porte-parole des forces armées polonaises, cité par l’Agence France Presse.

Quant à la cause de l’accident, et bien que le TU-154 n’a pas très bonne réputation avec une soixantaine d’incidents à son passif, les autorités russes ont mis en cause les pilotes de l’avion présidentiel.

En effet, étant donné les conditions météorologiques (brouillard avec 500 mètres de visibilité), le contrôle de l’aéroport de Smolensk a voulu dérouter le TU-154 polonais vers Minsk, ce que l’équipage a refusé. Après trois tentatives d’atterrissage manquées, l’appareil aurait alors accroché des arbres à environ 1,5 kilomètres de la piste.

Ce n’est pas la première fois que des responsables polonais perdent la vie dans un accident d’avion. En janvier 2008, un Casa C-295M, avec à son bord des responsables de la force aérienne polonaise, s’était écrasé non loin de la base aérienne de Miroslawiec, dans des circonstances similaires à celles du drame de Smolensk, c’est à dire une visibilité réduite due au brouillard et le système ILS (système d’atterrissage automatique) inexistant.

Mais l’affaire la plus emblématique reste l’accident d’avion dans lequel fut tué le Premier ministre du gouvernement polonais en exil, le général Wladyslaw Sikorski, et quelques uns de ses ministres, le 4 juillet 1943, à Gibraltar. A cette époque aussi, il était question de Katyn puisque le charnier des officiers venait d’être découvert quelques semaines plus tôt et que la question d’une responsabilité soviétique se posait déjà. D’où la suspicion d’un sabotage de l’avion du général, d’autant plus renforcé que celui qui était chargé de sa protection était un certain Kim Philby, un agent du MI6 britannique qui était aussi un espion à la solde de l’URSS.

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