Le gouvernement afghan négocie avec les insurgés

Le Conseil de sécurité des Nations unies a encouragé, ce 22 mars, le gouvernement afghan à trouver une solution politique afin de mettre un terme à l’insurrection islamiste.

Ainsi, le Conseil « se félicite des efforts renouvelés du gouvernement afghan (…) pour faciliter le dialogue avec les éléments de l’opposition qui sont prêts à renoncer à la violence, à couper les liens avec al-Qaïda et d’autres organisations terroristes, à dénoncer le terrorisme et à accepter la Constitution afghane » et a salué son engagement de mettre en place « un programme national de paix et de réintégration qui soit efficace, sans exclusive, transparent et viable ».

Lors de la conférence sur l’Afghanistan, organisée le 28 janvier dernier à Londres, la question de la politique de la main tendue « aux frères désabusés qui ne sont pas membres d’al-Qaïda ou d’une autre organisation terroriste », pour reprendre les mots du président afghan Hamid Karzaï, avait été abordée et acceptée par la communauté internationale.

Cela fait déjà un moment que des discussions ont été engagées avec les responsables du mouvement taleb afghan (ndlr: la chourra de Quetta), notamment par l’entremise de l’ancien représentant de l’ONU en Afghanistan, le Norvégien Kai Eide. En effet, et pour la première fois, le gouvernement afghan a officiellement reconnu, le 20 mars, l’existence de ces négociations, par la voie de Siamak Hirawi, le porte-parole du président Karzaï.

Seulement, ces discussions ont connu un coup d’arrêt. La cause? L’arrestation, à Karachi, de plusieurs responsables du mouvement taleb afghan, dont le numéro deux de l’organisation, à savoir le mollah Abdul Ghani Baradar. La rumeur disait que ce dernier était favorable à des pourparlers avec Kaboul, ce qui le mettait en opposition avec le mollah Omar, le chef de la Choura de Quetta.

Aussi, sa capture, qui s’est faite par hasard, si l’on en croit les informations du New York Times publiées le mois dernier, aurait eu un « impact négatif » sur le « processus de paix », selon Siamak Hirawi. Et Kai Eide n’a pas dit autre chose, le 19 mars, sur les ondes de la BBC, en déplorant que ces captures avaient quasiment détruit un « canal secret » de négociations entre les Nations unies et les taliban.

Du coup, le Pakistan, qui a aidé le mouvement taleb afghan à prendre le pouvoir à Kaboul dans les années 1990 afin de bénéficier à la fois d’une profondeur stratégique face à l’Inde et d’une sécurisation de ses voies d’approvisionnement énergétiques et commerciales venant d’Asie centrale, aurait ainsi « torpillé » des discussions qui auraient pu mettre un terme à l’instabilité de l’Afghanistan.

Cependant, Washington se félicite de ces captures d’importants dirigeants taliban. L’émissaire américain pour le Pakistan et l’Afghanistan, Richard Holbrooke, l’a encore répété le 19 mars. Mais il a aussi indiqué que les Etats-Unis étaient au courant des négociations menées par les Nations unies et souligné que le président Obama « soutenait la réconciliation » tout en faisant une différence « entre réintégration et réconciliation ».

Autre mouvement insurgé, le parti islamiste Hezb-e-Islami de l’ancien Premier ministre Gubbuldin Hekmatyar est engagé dans des discussions avec le gouvernement afghan.

« Un délégation comprendant des chefs du Hezb-e-Islami est à Kaboul avec une proposition de plan de paix en 15 points afin d’en discuter avec le gouvernement » a ainsi déclaré, ce 22 mars, le porte-parole de ce mouvement créé dans les années 1970 avec la bienveillance du Pakistan.

En fait, l’équipe de négociateurs du Hezb-e-Islami, emmenée par l’adjoint d’Hekmatyar, Qutbuddin Helal, doit proposer, entre autres, un calendrier de retrait des troupes de l’Otan et la mise en place d’une administration intérimaire.

Il n’est pas certain que ces discussions soient vues d’un bon oeil à Washington. En effet, Gubbuldin Hekmatyar a souvent trahi sa parole par le passé et, selon ses dires, ses troupes auraient aidé Oussama ben Laden à échapper aux forces américaines dans les montagnes de Tora Bora, en décembre 2001. D’ailleurs, en mai 2006, il avait indiqué, dans un enregistrement diffusé par al-Jazira, sa volonté de combattre pour al-Qaïda.

Le chef islamiste, qui a aussi revendiqué l’attaque de la vallée d’Uzbeen d’août 2008 au cours de laquelle dix soldats français avaient perdu la vie, entretient des relations mouvementées avec le mouvement taleb, ayant été son ennemi avant 2001, puis son allié contre les forces américaines et de l’Otan.

Récemment, ses troupes ont affronté les taliban dans le nord de l’Afghanistan et les évènements n’ont pas, semble-t-il, tourné à leur avantage. Un dizaine de commandants du Hezb-e-Islami se seraient même rendus aux forces de l’ordre afghane.

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