Vers une force de dissuasion conjointe entre Paris et Londres
Ce n’est pas la collision, en février 2009, entre deux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la Marine nationale et de la Royal Navy qui aura donné l’idée au président Sarkozy de proposer au Royaume-Uni une force de dissuasion conjointe. En effet, cette option a été mise sur la table par le chef d’Etat français à l’occasion d’un voyage officiel à Londres, en mars 2008.
Concrètement, et selon le quotidien The Guardian, il s’agit pour les deux pays d’assurer à tour de rôle la permanence à la mer, qui consiste à maintenir tout le temps au moins un SNLE en mission.
Cette question a été abordée le 12 mars dernier, lors d’une rencontre à Londres entre le Premier ministre britannique, Gordon Brown, et le président Sarkozy. Les discussions ont également porté « sur un partage plus large des tâches de défense », d’après les confidences faites par un responsable français au Guardian.
Toujours est-il que, malgré les réticences que cela peut susciter outre-Manche, surtout en période électorale, l’actuel locataire du 10 Downing Street a confirmé, ce 19 mars, un éventuel rapprochement entre la France et la Grande-Bretagne en matière de dissuasion nucléaire.
« Nous avons convenu d’un niveau de coopération qui est, je pense, plus important que ce nous avions auparavant » a ainsi déclaré Gordon Brown, en évoquant la discussion qu’il avait eue avec le président français. « Mais nous allons conserver, tout comme la France, l’indépendance de notre pouvoir de dissuasion nucléaire » a-t-il ajouté, sans donner, cependant, plus de précisions.
La force de frappe britannique repose uniquement sur l’utilisation de quatre SNLE qui emportent des missiles balistiques américains depuis le Polaris Sales Agreement de 1963, revu en 1982. La dissuasion française, quant à elle, met en oeuvre le même nombre de SNLE mais elle dispose de ses propres vecteurs, ainsi qu’une composante aéroportée. Cette dernière ne serait pas visiblement, concernée par les discussions entre Paris et Londres.
Cela étant, en septembre 2009, Gordon Brown avait proposé une réduction de l’arsenal nucléaire de son pays, en ne remplaçant que trois SNLE sur les quatre de la classe Vanguard que compte la Royal Navy. « Si nous sommes sincèrement contre la prolifératon nucléaire dans le monde, il faudra faire appel aux qualités de gouvernance et ne plus recourir à la stratégie de la corde raide » avait-il alors estimé.
Reste à voir les conséquences d’un possible accord sur le format de la dissuasion nucléaire française. Alors que le SNLE « Le Terrible » va bientôt entrer en service, la question de savoir si la Force océanique stratégique (FOST) garderait ses quatre submersibles peut se poser.
La refonte des SNLE français est prévue pour commencer en 2010. Il s’agit de leur permettre d’accueillir le nouveau missile M51 et de les doter d’un nouveau système de combat (SYCOBS), c’est à dire de les porter aux mêmes standards que Le Terrible. Ces travaux d’adaptation devrait durer entre deux et trois ans pour chaque sous-marins.