Politique de la main tendue en Afghanistan

La conférence internationale de Londres sur l’Afghanistan, qui s’est tenue le 28 janvier, a lancé un processus devant permettre aux Afghans de prendre eux-mêmes les destinées de leur pays.

Ainsi, d’un point de vue civil, plusieurs mesures ont été définies, notamment en matière de développement économique. A cette fin, la déclaration finale de la conférence a estimé primordial « un effort civil mieux coordonné et doté de meilleurs ressources ». Pour cela, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) ont confirmé l’annulation de la dette extérieure de l’Afghanistan de 1,6 milliards de dollars.

Par ailleurs, l’aide internationale au développement sera augmentée de 50% dans les deux prochaines années et distribuée via le gouvernement afghan, lequel devra faire des progrès en matière de « gestion des finances publiques » et de « réduction de la corruption ».

Justement, à propos de corruption, qui est endémique en Afghanistan, Kaboul devra mettre en place, dans un délai d’un mois, une structure spécialisée chargée « d’enquêter et sanctionner les reponsables corrompus ». Une équipe internationale anticorruption devrait se rendre sur place d’ici trois mois pour mesurer les progrès accomplis en la matière. « Combattre la corruption sera la priorité de mon second mandat » a déclaré Hamid Karzaï, le président afghan dont l’entourage n’est pas exempt de tout reproche à ce sujet.

Au plan militaire, le maître mot est « afghanisation ». En effet, l’Otan va transmettre progressivement la responsabilité de plusieurs provinces aux forces afghanes dès la fin de l’année 2010 et poursuivre ce processus en 2011. « L’armée afghane devra conduire la majorité des opérations dans les zones dangereuses dans un délai de trois ans » indique la déclaration finale. Ce transfert commencera par les régions les plus stables actuelleemnt, c’est à dire celles qui sont situées au nord et à l’ouest de l’Afghanistan.

En parrallèle, un effort important sera consenti pour augmenter les forces de sécurité afghanes et accélérer leur formation. Ainsi, d’ici à octobre 2011, les effectifs de l’armée nationale afghane (ANA) devront passer de 134.000 à 171.000 hommes tandis qu’il est prévu que ceux de la police atteignent 134.000 agents contre 109.000 actuellement.

Pour autant, aucun calendrier de retrait des forces de l’Otan n’a été arrêté. « La mission va continuer tant et aussi longtemps que les Afghans ne seront pas capables d’assurer seuls la sécurité de leur pays » a affirmé Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Alliance atlantique, qui a par ailleurs réfuté toute idée de « stratégie de sortie » au sujet de cette « afghanisation ». D’ailleurs, le président Karzaï a estimé, au cours d’un entretien donné à la BBC, que son pays aurait besoin d’être soutenu militairement pendant 5 à 10 ans.

Quant aux 40.000 hommes envoyés en renfort en Afghanistan, à la demande du général Stanley McChrystal, le chef de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF) afin de mettre en oeuvre une nouvelle stratégie basée sur les principes de la guerre contre-insurrectionnelle, ils doivent permettre d’affaiblir les groupes d’insurgés afin d’arriver à une paix négociée.

« En tant que soldat, je pense qu’il y a eu assez de combats et je crois qu’une solution politique, comme dans tous les conflits, est inévitable » a déclaré l’officier américain au Financial Times, le 25 janvier. « Je pense que tout Afghan peut jouer un rôle s’il se focalise sur l’avenir et par sur le passé » a-t-il encore ajouté, à propos d’une question portant sur la possibilité de la présence de taliban au gouvernement afghan.

Justement, et c’est là un autre point auquel s’est rallié la communauté internationale, le président Karzaï a proposé de « tendre la main » à tous les Afghans, « en particulier à nos frères désabusés qui ne sont pas membres d’al-Qaïda ou d’une autre organisation terroriste ».

Le plan de réconciliation qu’il a proposé prévoit de l’argent, du travail et de l’éducation aux insurgés, dans le cas où ces derniers déposeraient les armes. Un fonds international a été créé pour soutenir cette politique. Pour l’instant, 140 millions ont d’ores et déjà été réunis (l’objectif étant d’atteindre les 500 millions). Les Etats-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni et le Japon y ont le plus contribué.

Pour initier cette politique, le président Karzaï souhaite organiser une « jirga de la paix » (ndlr: une assemblée) à Kaboul, au printemps prochain. Seulement, les taliban ne semblent guère sensibles, du moins pour le moment, à cette proposition. « Les tentatives de l’ennemi pour acheter les moudjahidine en leur offrant de l’argent et des emplois afin qu’ils abandonnent le djihad sont vaines » a répondu le Conseil du commandement des taliban afghan, via un communiqué diffusé par un site Internet islamiste.

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