Les armes saisies en Thaïlande étaient destinées à l’Iran

L’affaire des armes d’origine nord-coréenne saisies le 12 décembre à bord d’un Ilyouchine-76 lors d’une escale à Bangkok révèle ses secrets au fur et à mesure que l’enquête progresse.

Officiellement, l’avion, immatriculé en Géorgie et loué par une société, devait se poser en Thaïlande pour se ravitailler en carburant avant de se rendre au Sri-Lanka où il devait livrer, selon son livre de bord, du matériel de forage pétrolier et rejoindre ensuite l’Ukraine.

Seulement, sur la base de renseignements transmis par un satellite espion américain, les autorités thaïlandaises se sont intéressées d’un plus près à la cargaison de l’appareil, d’où la découverte de 35 tonnes d’armes en provenance de la Corée du Nord. A priori, et même si l’équipage aurait pu trouver un autre point de chute plus accueillant – comme la Birmanie par exemple – il ne semble donc pas qu’il y ait eu une intervention particulière pour le contraindre à se poser sur l’aéroport de Don Mueang.

Quant à l’Ilyouchine, il aurait servi à Viktor Bout, un autre trafiquant d’armes notoire, arrêté en mars 2008 avec le concours d’agents américains et actuellement sous les verrous en Thaïlande, tout comme ses cinq membres d’équipage, constitué par quatre Kazakhs et un Biélorusse. « Ces appareils sont comme des bandes d’oiseaux migrateurs. Ils passent d’une firme à l’autre parce que la première firme a été fermée ou identifiée dans un rapport des Nations unies » a affirmé Hugh Griffiths, un expert en trafic d’armes.

Reste la nature des 145 caisses d’armement trouvées dans les soutes de l’avion et leur destination finale. Selon un officiel du gouvernement thaïlandais, des pièces détachées de missiles balistiques nord-coréens Taepodong-2 figureraient dans l’inventaire dressé par les experts, ce qui laisse à penser que la cargaison de l’Ilyouchine était destinée à l’Iran.

En effet, les missiles Shehab-5 et 6 iraniens ressemblent beaucoup au Taeopodong-2, qui a une portée théorique de 6.700 km mais dont le dernier essai, réalisé en avril dernier par Pyongyang n’a pas été très concluant, l’engin s’étant abîmé en mer après avoir parcouru 3.000 km. Pour Dennis Blair, le chef du renseignement américain – qui a fournit les informations à Bangkok pour l’inspection de l’Ilyouchine – il ne fait aucun doute que la destination de ces armes et autres matériels militaires était l’Iran. C’est en tout les cas ce qu’il a affirmé au Washington Post, le 18 décembre.

Par ailleurs, le Wall Street Journal, dans son édition du 21 décembre, s’est intéressé à la société qui a loué l’avion inspecté par les autorités thaïlandaises et cette enquête montre la complexité des circuits des trafiquants d’armes. Ainsi, l’appareil bel et bien enregistré au nom de Air West, une compagnie géorgienne. Cette dernière l’aurait loué, le 5 novembre, à la société SP Trading, enregistrée en Nouvelle-Zélande, qui l’a ensuite reloué à une autre compagnie, basée cette fois à Hong Kong mais dont la maison mère est située aux Iles Vierges britanniques. Selon des chercheurs cités par le quotidien économique, l’Ilyouchine appartiendrait en fait à Overseas Cargo FZE, une société basée aux Emirats arabes unis, là même où un cargo rempli d’armes nord-coréennes avait été saisi l’été dernier.

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