L’argent de la drogue finance le terrorisme au Sahel

Le 2 novembre dernier, l’épave d’un Boeing 727 était découverte par une patrouille malienne dans la région de Tarkint, une localité située à une centaine de kilomètres de Gao. Particularité de ce mystérieux appareil : il était chargé de cocaïne, probablement d’origine vénézuélienne.

Pour le directeur du Bureau des Nations unies sur la drogue et le crime (ONUDC), Antonio Maria Costa, cette affaire serait une preuve « du lien entre drogue, crime et terrorisme » qui serait d’autant plus « terrifiante » qu’elle a été découverte « par hasard ».

Seulement, ce que l’on sait, c’est que les cartels de la drogue sud-américains utilisent de plus en plus souvent l’Afrique comme plaque tournante de leurs trafics pour alimenter le marché de la cocaïne en Europe. En 2008, la Guinée Bissau avait été considérée par l’ONUDC comme le principal point d’entrée de ces produits stupéfiants sur le continent africain. Et la tendance s’est encore accentuée avec la découverte récente de sept laboratoires en Guinée (Conakry), ce qui fait dire au directeur de l’agence des Nations unies que « l’Afrique de l’Ouest est aussi en train de devenir productrice de drogues synthétiques et de cocaïne de synthèse ».

L’Est du continent est également affecté par ce phénomène, notamment à cause de la situation qui règne en Somalie, qui « est en train de devenir une zone économique franche pour toute sortes de trafics: drogue, migrants, armes, déchets tociques et ressources naturelles ». Selon l’ONUDC, entre 30 et 35 tonnes d’héroïne afghane sont introduites chaque année en Afrique de l’Est.

Reste une question : qui profite de ces juteux trafics? « Nous avons acquis des preuves » que les flux de cocaïne à l’ouest de l’Afrique et ceux d’héroïnes, à l’Est, « se rejoignent désormais dans le Sahara, empruntant de nouveaux itinéraires à travers le Tchad, le Niger et le Mali » a déclaré Antonio Maria Costa, le 8 décembre dernier. « Des répercussions dans les pays voisins, au Maghreb par exemple, sont inévitables » a-t-il ajouté. D’où des suspiciens que ces trafics servent à alimenter les caisses de groupes terroristes présents au Sahel, tels qu’Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), qui y trouve un moyen pour acheter des armes et financer ses opérations.

Seulement, les choses ne sont pas si simples. Deux groupes issus de l’AQMI sont particulièrement actifs au Sahel. L’un, dirigé par « l’émir » Belmoktar », serait opposé à toute forme de narcotrafic. Du moins, c’est la rumeur qui court à son sujet. En revanche, celui commandé par Abou Zeïd, qui détient actuellement des ressortissants européens en otage – dont un Français – serait beaucoup moins regardant quant à l’origine de ses ressources.

« Dans certains cas, le lien de plus en plus étroit entre le trafic de drogue et le financement du terrorisme constitue une source de préoccupation croissante » a encore averti le directeur de l’ONUDC. « Il importe d’intensifier la coopération transrégionale et internationale afin de lutter contre le problème de la drogue dans le monde et les activités criminelles connexes » a-t-il recommandé.

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