Bugaled Breizh : Morin va « tout mettre sur la table »

Quelle est la cause du naufrage du chalutier Bugaled Breizh, qui a provoqué la mort de ses cinq membres d’équipage, le 15 janvier 2004? Pour les familles des victimes et une quarantaine de maires bretons, ce serait un sous-marin qui en serait à l’origine.

Cette hypothèse a été en quelque sorte confirmée dans un rapport rendu par l’amiral en retraite Dominique Salles. Par ailleurs, elle n’est pas sans fondement car, dans le passé, des accrochages entre des submersibles et des bateaux naviguant en surfance se sont déjà produits. Seulement, il reste à identifier le sous-marin – plus précisément un SNA, ce qui limite le champ des possibles – qui serait responsable de cet accident et la chose n’est pas aisé car au moment du naufrage, l’Otan organisait un exercice dans la même zone de pêche que le chalutier.

Et même si des informations classées « secret défense » et portant sur la position des sous-marins français lors du drame ont été communiquées au procureur en charge du dossier, la suspicion concernant l’éventuelle implication d’un submersible français n’a toujours pas été écartée dans l’esprit des familles des marins disparus.

Et ces doutes ont été renforcés en février dernier lors de l’aveu fait par la Marine nationale au sujet des dégâts constatés sur le SNLE Le Triomphant. Dans un premier temps, la Royale avait affirmé que le sous-marin avait heurté un container, puis elle avait été contrainte d’admettre une collision avec un bâtiment du même type appartenant à la Royal Navy, après des révélations faites par la presse britannique.

« Avec cette affaire du Triomphant, on se rend compte que l’on ne peut plus croire la Marine sur ses seules affirmations. Dans le procès du Bugaled, la Marine donne un certain nombre d’informations et parce que c’est la Marine, on pense que cela correspond à la vérité. (…) Là, on a la preuve que l’on ne peut plus croire l’état-major de la Marine sur parole » avait alors déclaré Me Christian Bergot, lavocat des familles des victimes du naufrage du Bugaled Breizh. Sauf que ce pieu mensonge concernait un sous-marin nucléaire lanceur d’engins, et par conséquent la dissuasion nucléaire française. Et dans ce domaine, l’on peut comprendre que la Marine cherche à donner le moins d’informations possibles à ceux qui justement, surveillent les mouvements des submersibles dédiés à cette mission.

Cette accusation de mensonge avait été reprise par le député socialiste du Morbihan, Françoise Olivier-Coupeau. « L’on peut s’interroger sur le mystère qui entoure le naufrage du chalutier Bugaled Breizh et sur la crédibilité des réponses apportées aux familles des victimes » avait écrit, au ministre de la Défense, la parlementaire, au sujet de cette affaire de collision.

Du coup, près de quarante maires bretons ont demandé au président Sarkozy de lever le secret défense sur les documents concernant le naufrage du Bugaled Breizh. Ainsi, le ministre de la Défense, Hervé Morin, a indiqué, le 11 novembre, à l’antenne de Canal +, avoir donné « comme consigne à (son) cabinet de les recevoir pour qu’on leur mette tout sur la table », tout en assurant que « tout a déjà été fourni là-dessus ».

« Je veux entendre (les maires), leur parler et qu’ils aient la conviction que la République française n’a rien à leur cacher » a encore déclaré, quelques heures plus tard, le ministre sur les ondes de RTL après avoir réaffirmé sa certitude qu’aucun sous-marin de la Marine nationale n’était impliqué dans cette affaire.  M. Morin a également affirmé que Michèle Alliot-Marie, à qui il a succédé à l’Hôtel de Brienne, avait « levé le secret défense sur l’ensemble des documents » classifiés du ministère de la Défense.

Sur le plan judiciaire, le juge d’instruction en charge du dossier avait refusé de poursuivre son enquête, estimant qu’il n’était pas en mesure d’obtenir les informations sensibles dont il avait besoin et que cette dernière était « sans espoir ». Mais les familles des marins du Bugaled Breizh ont fait appel de cette décision devant la chambre d’instruction de la cour d’appel de Rennes, qui se prononcera sur la suite à donner le 27 novembre prochain.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]