Des Rafale chez Kadhafi

Cela fait maintenant plusieurs mois qu’un contrat portant sur l’achat éventuel d’avions de combat Rafale par la Libye est en cours de négociation. En décembre 2007, alors que le colonel Kadhafi était en visite officielle en France, Charles Edelstenne, le PDG de Dassault Aviation, avait affirmé que la vente d’au moins 14 appareils était « a priori acquise ».

Sauf que depuis, les choses traînent en longueur d’autant plus qu’un protocole d’accord prévoyait alors « une négociation exclusive d’ici au 1er juillet 2008″… Qui plus est, une telle vente doit encore obtenir l’agrément de Washington, compte tenu que le fleuron de l’aéronautique militaire française contient des composants électroniques fabriqués aux Etats-Unis. Au total, le chef d’Etat libyen envisageait l’achat de 35 hélicoptères et de divers équipements militaires, en plus des Rafale. Le tout pour 4,5 milliards d’euros.

D’ailleurs, le sujet est épineux. En mai dernier, le ministre de la Défense, Hervé Morin, avait estimé que « moins on parle » de la vente du Rafale à la Libye, « mieux on se porte ».

Cela étant, et pour fêter les 40 ans de l’arrivée au pouvoir du colonel Kadhafi, trois Rafale F2ont quitté leur base de Saint-Dizier pour rejoindre Tripoli, où il prendront part, le 1er septembre, à une parade aérienne organisée pour l’occasion, officiellement pour traduire « la volonté de la France de renforcer sa collaboration avec la Libye dans le domaine de la défense ». Ce défilé doit réunir au moins 75 appareils, libyens et étrangers.

Réhabilité sur la scène internationale depuis 2003, année où il avait renoncé à l’acquisition d’armements nucléaires et reconnu la responsabilité de son pays pour plusieurs attentats, le colonel Kadhafi est devenu fréquentable et l’embargo qui frappait son pays a été levé.

Même si l’accueil triomphal qui a été réservé à Abdelbaset Ali Mohammed Al-Megrahi, le 20 août dernier, condamné pour les attentats de Lockerbie (1988) et libéré par la justice britannique pour des raisons sanitaires, a provoqué quelques grincements de dents, il n’est pas question pour autant de déplaire à celui qui s’est autoproclamé « roi des rois traditionnels d’Afrique ».

Il faut dire que sur un plan purement économique, la Libye a de quoi séduire. Avec 43 milliards de barils, ce pays dispose en effet des premières réserves d’or noir d’Afrique… Et elles ont l’immense avantage d’être proches de l’Europe. Et qui dit pétrole, dit énormes rentrées d’argent. D’autant plus que Tripoli a prévu d’augmenter sa production de brut, pour la faire passer de 1,8 à 3 millions de barils à l’horizon 2013. C’est pourquoi une vingtaine de compagnie pétrolières y sont présentes, dont le français Total, dont la part de pétrole libyen représente 12% du total de sa production africaine. La société française vient d’ailleurs de prolonger ses contrats jusqu’en 2032.

Avec une telle manne, la Libye compte réinvestir pour développer ses infrastructures et certains secteurs, comme par exemple le tourisme. Initialement, il était question de 75 milliards de dollars, avant que ce montant ne soit revu à la baisse. Mais on comprend bien qu’un tel marché présentant d’aussi belles opportunités a de quoi attirer du monde prêt à être moins regardant sur le passé et la politique du dirigeant libyen.

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