La Pologne privée du bouclier antimissile américain?
En 2008, l’administration Bush était parvenue à trouver un accord avec la Pologne et la République tchèque pour installer dans ces deux pays des éléments du bouclier antimissile américain, conçu pour contrer les menaces liées à la prolifération de missiles balistiques et d’armes de destruction massive, notamment en Iran. Ainsi, Varsovie doit accueillir sur son territoire dix missiles intercepteurs et Prague, un radar.
Sauf que selon le journal polonais Gazeta Wyborcza, qui s’appuie sur différentes sources américaines bien placées, les Etats-Unis seraient sur le point de renoncer à ce projet pour installer des missiles intercepteurs et des systèmes de détection en Turquie, en Israël et même peut être dans les Balkans. Ce que Washington a cependant démenti. « Je qualifierais ces informations d’inexactes » a ainsi affirmé, le 27 août, Philip Crowley, un porte-parole du département d’Etat. « Nous sommes toujours en train de réexaminer notre stratégie antimissile » a-t-il ajouté.
Il se trouve que le président Obama, alors fraîchement élu, a demandé une revue générale du programme de défense antimissile afin de s’assurer de sa viabilité technique, politique et financière. Par ailleurs, cette installation des éléments de ce bouclier en Europe de l’Est constitue une pomme de discorde entre Moscou et Washington.
Pour la Russie, en effet, ce système antimissile est perçu comme une menace contre sa sécurité, même si les Etats-Unis ont toujours assuré le contraire. Mais pour le Kremlin, chaque avancée américaine – et plus largement de l’Otan – dans son ancienne zone d’influence est toujours vue d’un mauvais oeil. C’est pourquoi le président russe, Dmitri Medvedev a menacé, juste après l’élection de Barack Obama à la Maison Blanche, de déployer des missiles Iskander dans l’enclave de Kaliningrad tout en poussant ses pions en Amérique du Sud, avec la complicité d’Hugo Chavez, le chef d’Etat vénézuélien.
Seulement, Washington a besoin de Moscou pour régler quelques problèmes internationaux. Comme par exemple celui de l’Afghanistan, où le soutien de la Russie pour les convois de logistique qui ravitaillent les troupes de l’Otan engagées contre l’insurrection talibane est indispensable. Ou encore comme celui du dossier du nucléaire iranien. D’ailleurs, à ce sujet, Barack Obama aurait proposé secrètement à son homologue russe de renoncer à implanter les éléments du bouclier antimissile en Europe de l’Est pour faire accepter à la Russie l’idée d’adopter de sanctions plus contraignantes à l’égard de Téhéran.
Par conséquent, le scénario évoqué par le journal de Varsovie est donc très probable. D’autant plus qu’un tel abandon peut se justifier devant l’absence de preuves indiquant que l’Iran dispose de vecteurs à longue portée de nature à menacer directement le territoire américain. Sans compter que cette réorientation de la politique de défense antimissile présente plusieurs avantages. Outre les économies qui pourrait être réalisées et un sujet de fâcherie en moins avec Moscou, cela permettrait de protéger l’Europe centrale d’une éventuelle menace balistique iranienne, tout en rassurant Israël, pays dont le président Ahmadinejad a déjà menacé de « rayer de la carte ».