Violences islamistes au Nigéria
Depuis 2000, la charia, ou loi islamique, a été instaurée dans une douzaine d’Etats du Nigeria, pays de 140 millions d’habitants où la le nombre de musulmans est sensiblement égal à celui des chrétiens, principalement localisés dans le sud.
Les tensions entre les deux communautés ont été fréquentes depuis. En février 2000, des affrontements entre musulmans et chrétiens, qui manifestaient contre la charia, avaient entre 2.000 et 3.000 tués à Kaduna, dans le nord du pays. Des violences intercommunautaires, en juillet 2001, avaient poussé des milliers de personnes à fuir leurs maisons dans l’Etat de Bauchi. En septembre de la même année, de nouveaux affrontements, ayant toujours la même cause, avaient fait plus de 900 morts à Jos, un village du centre du Nigeria.
Les troubles interconfessionnels ont par la suite continué, notamment en 2006, avec la publication des caricatures de Mahomet. Récemment encore, des heurts entre chrétiens pentecôtistes et musulmans ont eu lieu à Bauchi.
Seulement, et même si la charia a été instaurée dans une bonne partie du pays, il n’en reste pas moins que les islamistes radicaux en veulent toujours plus. Cette fois, ces derniers ont dans leur ligne de mire « l’éducation occidentale », vue comme un « péché ». C’est en tous les cas la justification donnée à leur combat par les « taliban » nigérians. Ce mouvement, apparu en 2002 et composé par des étudiants en rupture avec l’université, n’a aucun lien avec les taliban afghans. Tout au plus, ils s’en inspirent et veulent établir, à l’instar de leurs homologues, une Etat islamique « pur ».
Si, au cours de sa courte existence, ce groupe, fort, à l’origine de 200 personnes, mais dont on ignore aujourd’hui les effectifs, a affronté à plusieurs les forces de police nigériane, il a franchi un nouveau pallier, le 26 juillet dernier, en lançant une offensive générale, commencée par l’attaque d’un commissariat dans l’Etat de Bauchi et qui s’est ensuite étendue à trois Etats voisins (Borno, Yobe et Kano).
Selon le président nigérian, Umaru Yar’adua, ces « taliban » se sont « infiltrés dans la société, ont préparé des armes, appris à fabriquer des explosifs, pour déclarer le jihad (guerre sainte) ». Pour les contrer, les forces de sécurité ont reçu des renforts militaires (blindés, mitrailleuses lourdes) et le moins que l’on puisse dire est qu’elles n’ont pas fait dans le détail pour mater cette insurrection. « L’opération que nous avons lancée nous en débarrassera une fois pour toutes » a assuré M. Yar’adua, avant de partir en visite officielle au Brésil.
Le fait est, au terme de cinq jours de violences qui ont fait plus de 600 morts, dont 300 islamistes en une seule journée à Maidugari, leur bastion, un calme relatif est revenu dans les zones touchées par l’offensive. Le 30 juillet au matin, le numéro deux du mouvement, Abubacar Shekau, a été tué lors d’une tentative d’échapper aux forces de l’ordre avec 200 compagnons.
Plus tard, c’est le chef de ces taliban nigérians, Mohamed Yusuf, âgé de 39 ans, qui a été arrêté par les militaires. Il a été exécuté alors qu’il avait été placé en détention. Il faut dire que les forces de sécurité nigériannes ont la réputation d’être quelque peu expéditives.
Cela étant, la mobilisation reste de mise dans les Etats touchés par cette flambée de violence et il n’est pas question pour l’armée de baisser la garde alors que la situation est sous contrôle. « Selon les ordres du chef d’état-major de la défense, nous allons faire à partir de vendredi une démonstration de force dans toutes les zones » où les affrontements ont eu lieu, à déclaré le porte-parole du ministère nigérian de la Défense, Mohammed Yerima.
« Les soldats vont venir avec leur équipement et patrouiller dans les villes des Etats de Borno, Yobe, Bauchi et Kano pour bien montrer aux gens qu’ils sont protégés et peuvent vaquer normalement à leurs occupations » a-t-il ajouté.